Ursula von der Leyen dévoile la composition de la nouvelle commission européenne : analyse

, par Laura Mercier, Louise Guillot

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Ursula von der Leyen dévoile la composition de la nouvelle commission européenne : analyse
Ursula von der Leyen a présenté l’organisation de la prochaine Commission européenne, le 10 septembre à Bruxelles. Photo : Etienne Ansotte - Source : EC - Audiovisual Service

Ursula von der Leyen a présenté ce 10 septembre l’organisation et la répartition des portefeuilles au sein du nouveau collège des commissaires. On y découvre de nouvelles Directions générales, des noms de poste surprenants tout en distinguant clairement les priorités du prochain exécutif européen.

Quels sont les changements par rapport à la Commission Juncker ?

Nouvelle présidente de la Commission européenne, dit nouvelle approche. Du moins sur le papier. Ursula von der Leyen a choisi de présenter son équipe dans un organigramme en forme de cercle, sûrement une tentative d’abolir la hiérarchie entre les commissaires et les vice-présidents. Il y a cinq ans, Jean-Claude Juncker avait lui choisi de représenter son équipe dans un tableau afin de faire ressortir les postes de vice-présidents puisqu’il venait de créer cette fonction, au risque d’instaurer une certaine hiérarchie entre les commissaires européens.

Mais la présentation n’est pas le seul changement. Le présidente de la Commission européenne ayant le choix des portefeuilles et de leur composition, qu’elle discute et négocie avec les Etats membres, nous assistons à une assez forte réorganisation de l’exécutif européen par rapport à l’équipe précédente. Ursula von der Leyen a fait le choix d’essayer de simplifier et de donner aux portefeuilles des noms moins compliqués que son prédécesseur, sûrement dans le but de rendre la Commission européenne plus facile à lire. Toutefois, l’étendue des prérogatives des commissaires reste importante et est davantage détaillée dans leurs feuilles de mission. Par exemple, le portefeuille “action pour le climat” se transforme en “green new deal”, les portefeuilles de la justice et des affaires intérieures sont séparés, quand le portefeuille “emploi, affaires sociales et inclusion” devient “emploi”, à croire que l’Europe sociale n’y a plus sa place…

Dans la même veine, on remarque que certains “mots clés” disparaissent, et avec eux la priorité donnée à ces sujets, à l’image de la recherche, de la culture, l’éducation ou encore du sport. De nouvelles associations apparaissent comme la jeunesse et l’innovation, ou le numérique et la concurrence.

Autre changement majeur : la création annoncée d’une nouvelle direction générale. En effet, qui dit réorganisation des portefeuilles des commissaires dit restructuration de l’administration européenne et donc des directions générales (DG). La présidente de la Commission européenne a annoncé la création d’une DG Défense et Espace pour épauler le travail de la Française Sylvie Goulard qui se voit confier le portefeuille du marché intérieur agrémenté d’une mission sur le développement de l’Europe de la défense et des programmes spatiaux.

Qui est en charge de quoi ?

Ursula von der Leyen aura réussi à former une Commission (presque) paritaire puisque l’on compte 13 femmes et 14 hommes dans le nouveau collège des commissaires. Il y a maintenant plusieurs approches possibles pour analyser ce nouvel organigramme : la répartition géographique mais aussi politique des dossiers.

Fidèle au programme qu’elle a défendu en juillet dernier devant le Parlement européen, Ursula von der Leyen affiche les priorités de son mandat en confiant aux deux anciens Spitzenkandidaten Frans Timmermans (Sociaux-Démocrates) et Margrete Vestager (Renew Europe) des portefeuilles aux compétences larges. Le néerlandais aura la responsabilité d’élaborer le “Green New Deal”, promis par Ursula von der Leyen dans les 100 premiers jours de son mandat. Margrethe Vestager sera quant à elle en charge des dossiers numériques tout en conservant le portefeuille de la Concurrence qu’elle occupe depuis cinq ans déjà. Les priorités sont ainsi fixées autour de l’action climatique et la transformation numérique.

En juillet dernier, lorsque le Conseil européen a trouvé un accord sur les noms des prochains présidents de la Commission, du Conseil européen, de la Banque centrale européenne et du Haut représentant aux Affaires étrangères, l’absence de personnalité venant de l’Europe de l’Est avait été remarquée et critiquée par nombre d’observateurs. Dans ses choix de répartition des portefeuilles, Ursula von der Leyen a confié des dossiers majeurs aux prochains commissaires de plusieurs pays de l’Est.

Par exemple, la gestion de la politique agricole commune sera assurée par le commissaire polonais, qui devra par conséquent mener la réforme d’ampleur qui a été initiée par son prédécesseur Phil Hogan. Le benjamin de cette nouvelle Commission, le lituanien et unique représentant des Verts, Virginijus Sinkevicius, sera en charge des dossiers environnementaux (mais le projet de Green New Deal ne sera pas de son ressort). Le portefeuille de l’Energie a été confié à la commissaire estonienne, Kadri Simson. La roumaine Rovana Plumb sera quant à elle en charge des Transports. Les questions de politique de voisinage et d’élargissement seront entre les mains du commissaire hongrois, un choix qui interroge quand on sait que ce poste requiert du commissaire de travailler en relations avec les pays candidats à l’adhésion à l’Union européenne et à y représenter et défendre les conditions liées à cette entrée, parmi lesquelles, le respect de l’acquis communautaire et des valeurs de l’Union européenne. Or, le hongrois László Trócsányi, ancien ministre de la Justice, a été membre du gouvernement de Viktor Orban, adepte des entraves à la liberté de la presse, à l’indépendance de la justice et à la liberté académique (liste non exhaustive)...

Le portefeuille du Commerce a été confié à l’irlandais Phil Hogan, actuel commissaire à l’Agriculture. Un choix fort et symbolique dans le contexte du Brexit, et un message envoyé au Royaume-Uni avec qui Phil Hogan sera ainsi amené à négocier la future relation avec l’Union européenne. D’ailleurs, cette nouvelle équipe n’a pas de membre britannique. C’était la volonté du Premier ministre Boris Johnson de ne pas nommer de commissaire, assurant que son pays sera sorti de l’Union européenne d’ici l’entrée en fonction de la nouvelle Commission, le 1er novembre. Ursula von der Leyen reste prudente et rappelle que Londres devra présenter un candidat si le Brexit n’est pas effectif au 31 octobre.

Comme attendu depuis plusieurs jours, Sylvie Goulard s’est vue confier un large portefeuille avec les dossiers du Marché intérieur tout en menant les travaux sur la défense européenne. Sur un tout autre sujet, c’est le belge Didier Reynders qui aura la responsabilité cruciale de défendre l’Etat de droit au sein de l’Union en reprenant ainsi le portefeuille de Frans Timmermans. A ce titre, il défendra vraisemblablement le mécanisme de suspension des fonds structurels en cas de non respect de l’Etat de droit, actuellement en débat et proposé par son pays et l’Allemagne, notamment.

La question reste maintenant de savoir si les commissaires européens sauront défendre les intérêts de l’Union, au-delà de leur appartenance nationale et partisane. Car c’est bien là le rôle et la responsabilité des Commissaires européens.

Mais où est le commissaire à la bonne ambiance ?

Les réactions ne se sont pas faites attendre à l’annonce de la composition de la nouvelle Commission. Après les traditionnelles félicitations adressées aux commissaires vient le temps de l’analyse et les commentateurs de l’actualité politique européenne ne se sont pas faits prier pour faire remarquer les intitulés plus qu’originaux donnés à certains portefeuilles.

Le grec Margaritis Schinas se voit confier la “protection du mode de vie européen” qui regroupe apparemment l’immigration et la protection des frontières. La croate Dubravka Šuica hérite d’un nouveau portefeuille dénommé “démocratie et démographie”, quant au letton Valdis Dombrovskis, il sera en charge de mettre en place “une économie qui fonctionne pour les citoyens”. Ces intitulés tentent de faire ressortir de nouvelles priorités et de redéfinir le vocabulaire de la Commission, mais restent parfois obscurs.

L’équipe dévoilée, il est maintenant grand temps pour les 26 commissaires de se mettre au travail. Le bal des auditions commencera fin septembre au Parlement européen.

Pour plus d’informations, nous vous invitons à consulter ce trombinoscope réalisé par l’Echo : « Les visages de la Commission von der Leyen »

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