L’extrême droite, grande gagnante
Le Rassemblement national est le grand vainqueur de ce premier tour des élections législatives. Le parti nationaliste et xénophobe réunit plus d’un tiers des voix exprimées (33,15%). Cela représente une impressionnante poussée du parti mené par Jordan Bardella et Marine Le Pen, qui avait fait 18% aux élections législatives de 2022. Le score est ainsi dans la droite lignée des résultats des élections européennes lors desquelles le RN avait obtenu 31,37%, ce qui avait mené le Président de la République Emmanuel Macron à dissoudre l’Assemblée nationale.
Le parti à la flamme est ainsi en tête dans une très large majorité des circonscriptions, un fait inédit alors que les élections législatives se jouent principalement sur ce terrain-là. Mieux pour l’extrême droite française, elle réussit à faire élire 39 députés au premier tour, ces candidats ayant obtenu plus de 50% des voix dans leur circonscription respective.
Le Nouveau Front Populaire, l’alliance des partis de gauche, a recueilli près de 28%. Deux scores qui surplombent les autres, y compris celui de la majorité présidentielle sortante qui comptabilise quant à elle 20,8%. La droite traditionnelle, Les Républicains, a quant à elle recueilli 6,5% des voix.
Une participation record pour dépasser les duels
L’autre gagnante du premier tour des élections est la participation. Alors que l’abstention aux élections législatives n’avaient cessé d’augmenter depuis les élections de 1993, les Français leur préférant l’élection présidentielle, les législatives de 2024 ont rassemblé 67,5% de l’électorat.
Une situation inédite qui s’explique par la mobilisation des différents électorats, notamment à gauche et à l’extrême droite. La participation record a permis une multiplication des triangulaires et des quadrangulaires. En effet, pour pouvoir atteindre le second tour, et in fine remporter l’élection, un candidat doit arriver à la première ou seconde place. Dans le cas échéant, il peut espérer une qualification au second tour, si sa candidature récolte les voix de plus de 12,5% des inscrits. La forte participation a donc été essentielle ici. On dénombrerait ainsi 306 triangulaire dans le pays.
Un chiffre qui pourrait très vite changer après les déclarations respectives des chefs de partis appelant pour certains à un front républicain contre l’extrême droite, et donc au désistement des candidats au profit de ceux étant les mieux placés contre les candidats du RN. Une ligne qui fait débat au sein de la majorité présidentielle, certains appelant au désistement contre n’importe quel candidat respectant les valeurs démocratiques et républicaines, tandis que d’autres excluent de ce « front républicain revisité » les candidatures LFI, appelant encore et toujours au ni-ni entre gauche radicale et extrême droite.
Une France chamboule-tout
Car le 30 juin au soir, c’est bel et bien une apocalypse française qui a eu lieu. Une apocalypse au sens commun : la France s’enfonce un peu plus dans le reniement de soi. Une apocalypse au sens littéral également, « une révélation ». Une révélation de l’état politique de la France.
Pendant cette campagne expresse qui n’aura duré que vingt jours, les forces politiques du pays se sont remodelées. Le centre-droit des Républicains s’est fracturé entre d’un côté une alliance de reniement avec le RN menée par Éric Ciotti (président du parti), et de l’autre une indépendance de ligne politique, garantie par Annie Genevard (députée sortante du Doubs) et François-Xavier Bellamy (tête de la liste LR aux européennes).
La gauche s’est quant à elle unifiée au sein du Nouveau Front Populaire. Une base programmatique qui a permis à l’alliance d’obtenir la seconde place du podium, au prix de reniements de certains. Le centre libéral de la majorité présidentielle, Ensemble pour la République, a quant à lui essuyé une grave défaite. Une recomposition qui pourrait faire exploser la coalition libérale aussi bien que la renforcer en un troisième bloc, face à la gauche unie et à une extrême droite puissante.
La France a révélé son nouveau visage. Nous avons vécu une apocalypse française. Reste à savoir si cette apocalypse débouchera sur une majorité d’extrême droite, ou sur un ultime sursaut pour les valeurs de la République, pour l’Histoire.
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