Un nouvel élan avec Friedrich Merz
L’arrivée de Friedrich Merz à la chancellerie ouvre une nouvelle page du couple franco-allemand. Président du parti chrétien-démocrate (CDU), Merz est décrit comme un Européen convaincu. Ancien eurodéputé, il a régulièrement défendu l’Europe et le partenariat franco-allemand. Dans la tradition chrétienne-démocrate, ce lien s’inscrit dans l’héritage de Konrad Adenauer et Charles de Gaulle, qui avaient scellé la réconciliation des deux pays par le traité de l’Élysée en 1963.
Macron-Scholz : une période de mésentente
Pendant les quatre années de la coalition sous Olaf Scholz, le tandem Macron-Scholz a souvent peiné à fonctionner. En effet, le président français et le chancelier allemand affichaient des tempéraments différents et des visions divergentes, notamment sur l’énergie et la défense. En matière d’énergie, Paris a toujours défendu le nucléaire comme une énergie décarbonée, devant donc bénéficier de financements européens, tandis que Berlin s’y opposait, craignant que les subventions accordées au nucléaire français permettent à la France de proposer une électricité moins chère et donc de désavantager l’industrie allemande.
Sur le plan de la défense, la France encourageait fortement l’achat d’équipements militaires européens, alors que l’Allemagne privilégiait souvent des systèmes américains pour répondre à ses besoins opérationnels. Macron avait critiqué l’initiative « Sky Shield » à l’automne 2022, visant à acheter des systèmes de défense aérienne à Israël et aux États-Unis. Les tensions étaient telles qu’un Conseil des ministres franco-allemand, prévu en octobre 2022, avait été reporté.
Premiers signaux de rapprochement
Tout comme ses prédécesseurs, Merz s’est rendu à l’Élysée dès le lendemain de sa prise de fonction, soit le 7 mai dernier. Il s’agissait de discuter de la manière dont le moteur franco-allemand pouvait aider l’Union européenne face aux crises auxquelles elle est confrontée. Les deux dirigeants ont rappelé leur attachement à la coopération franco-allemande. Une tribune commune intitulée « Remettre à plat les relations franco-allemandes pour l’Europe », annonçant une série de mesures pour renforcer l’Union, a été publiée.
En matière de défense, ils se sont engagés à continuer l’augmentation de leurs capacités de défense pour renforcer le pilier européen de l’OTAN, et ont exprimé leur souhait de réduire leurs dépendances stratégiques. Ils ont par ailleurs annoncé la création d’un Conseil de sécurité et de défense franco-allemand sur les questions de stratégie, de défense et de sécurité nationale, notamment pour coordonner leur soutien à l’Ukraine.
En matière d’énergie, les deux dirigeants ont affirmé leur volonté d’aligner leurs politiques en faveur de la neutralité climatique, de la compétitivité et de la souveraineté, afin de faire baisser les coûts de l’énergie et de garantir la sécurité d’approvisionnement.Tandis qu’en matière de commerce, ils ont appelé à un nouvel agenda pour une politique commerciale durable au sein de l’UE et souhaitent explorer les moyens de mettre en place un agenda commercial et d’investissement mutuellement bénéfique avec les États-Unis.
Rencontre à Berlin : une entente cordiale, mais des divergences persistantes
Le 23 juillet, Macron s’est rendu à Berlin pour un dîner de travail à la villa Borsig. Cette rencontre visait à préparer les prochains Conseils des ministres franco-allemands et à affirmer une unité face aux défis internationaux. Si les deux dirigeants ont affiché un front commun contre les menaces de surtaxes américaines, tout deux s ayant plaidé pour une approche ferme vis-à-vis de Donald Trump, des divergences subsistent.
Paris s’oppose toujours à l’accord de libre-échange Mercosur en raison de préoccupations environnementales et agricoles, alors que Merz soutient sa ratification. De plus, le programme SCAF (avion de combat du futur), projet pour l’industrie de défense européenne, reste bloqué par des désaccords industriels. Dassault (France) critique le manque de leadership clair et doute de la viabilité du projet, tandis qu’Airbus (Allemagne) veut maintenir la répartition actuelle des tâches.
Une relance nécessaire
Avec la guerre en Ukraine qui dure depuis plus de trois ans, la menace d’un désengagement des Etats-Unis et de possibles surtaxes commerciales imposées par Washington, relancer la coopération franco-allemande, après quatre années peu fructueuses, est devenu crucial. Si la coopération entre les deux voisins semble aujourd’hui plus étroite qu’elle ne l’a été depuis le début du précédent mandat allemand, des défis demeurent. Les deux pays devront trouver des compromis pour que ce tandem devienne un véritable moteur européen.
Les prochains Conseils des ministres et de défense franco-allemands, prévus pour les 28 et 29 août à Toulon, permettront de voir si le tandem Merz-Macron parviendra à transformer ses promesses en actions concrètes et à donner un véritable élan à l’Europe.

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