Les fausses informations durant le Covid-19 : une situation à clarifier

, par Annika Pietrus, traduit par Jérôme Flury

Les fausses informations durant le Covid-19 : une situation à clarifier
Les fausses informations sont légion actuellement. Image : Geralt, Pixabay

A l’heure de l’hyperconnectivité, favorisant le partage très rapide d’informations, les infox peuvent se propager rapidement. La peur et l’incertitude offrent un terreau fertile pour la désinformation. En d’autres termes, les fausses informations se diffusent de la même manière que le virus responsable du COVID-19. Un article du « Grand Format Européen » sur le coronavirus.

En lisant et écoutant un vaste nombre de sources, des blogs les plus obscurs sur les réseaux sociaux aux personnages publics, nous avons entendu qu’un médicament contre le paludisme, l’alcool ou encore les aspirateurs pour aquariums pourraient nous soigner du Covid-19. Apparemment, le Pape, comme le footballeur Cristiano Ronaldo auraient tout deux été testés positifs au virus.

Concernant l’origine du virus : il aurait été produit dans des laboratoires chinois, américains ou français, tout dépend de là où vous pensez que l’apocalypse est partie. Bien que les géants des réseaux sociaux comme Facebook, Twitter et Instagram ont mis en place des politiques plus sévères en matière de censure et en supprimant les fausses informations, les groupes et messages privés sur Facebook, non détectés par les algorithmes, peuvent continuer à exister et se répandre.

Se faire avoir par de faux soins

Le problème n’est pas de savoir si un footballeur célèbre pourrait, ou non, être affecté par le virus. Le problème est que les individus commencent à croire en de faux remèdes. Après qu’un couple dans l’Arizona a tenté de se protéger du Covid-19 en ingérant du phosphate de chloroquine, l’homme est décédé, tandis que la femme a été transportée à l’hôpital dans un état critique. La phosphate de chloroquine est un additif employé dans les produits utilisés pour l’entretien des aquariums. Il existe aussi, en petites quantités, dans les médicaments contre le paludisme. Cet exemple souligne la naïveté tragique de deux personnes. Pourtant elles n’ont pas suivi les consignes d’un quelconque blog obscur ou d’une conversation sur un réseau social. Le couple était en train d’appliquer les conseils du 45e président des États-Unis d’Amérique, qui a présenté le médicament comme un remède.

Faisant fi des sa propre équipe médical, le président Donald Trump continue à inciter les Américains à prendre de l’hydroxychloroquine, un remède contre le paludisme, dont l’efficacité ou la sûreté face au Covid-19 n’a pas été prouvé. Le président lui-même s’appuie sur une petite étude menée en France qui n’a pas été évaluée par les autres médecins ; ses résultats peuvent légitimement être considérés comme douteux. Malgré cela, le président Trump n’est pas le seul à promouvoir de fausses informations. Le président brésilien Jair Bolsonaro, admirateur notable de Trump, n’a pas pris en considération la gravité du Covid-19, en le jugeant comme un simple rhume qui causerait au pire des irritations. Alors que Bolsonaro clamait que les Brésiliens « n’attrapaient jamais rien », les trafiquants de drogue à Rio de Janeiro ont ordonné aux habitants des Favelas de rester chez eux. La peur suscitée par l’impact possible du virus sur les plus pauvres a donné plus de crédit moral aux trafiquants de drogue qu’au président du Brésil.

Un appel à une volte-face

Pendant que les fausses informations se répandent à travers l’Amérique, l’Europe aussi n’est pas épargnée par les informations erronées. Alors que des États européens comme l’Italie ou l’Espagne doivent faire face à de nombreux cas de malades du Covid-19 et déplorent des morts, des rumeurs sur la désintégration de l’UE, sur ce virus qui aurait été créé par l’homme et d’autres théories du complots fleurissent. Pour s’attaquer à ce flux de fausses informations, la Commission européenne a mis en place un site internet dédié, sur lequel la présidente Ursula Von der Leyen s’adresse directement aux citoyens européens pour les dissuader de croire ces mensonges.

Il ne s’agit pas seulement de souligner la crédulité des gens. Nous vivons une époque où l’information est devenue l’objet d’une bataille politique entre la droite, la gauche, et tout ce qui se trouve entre. Le Covid-19 n’est pas très différent dans sa polarisation politique, à ceci près que son caractère inconnu exacerbe la dissémination de fausses informations. Ce qui est sans doute vrai aujourd’hui peut être infirmé demain, parce que tout le monde, même les scientifiques, travaillent traitent les informations au compte-goutte.

Cette situation d’incertitude permettent aux Trump et Bolsonaro de ce monde de l’exploiter et de se poser opportunément en « hommes providentiels » en ces temps de crise. Utiliser la confusion, et non les faits, est un instrument qui conduit à développer la méfiance entre les gens. En tant qu’être humains, nous évaluons les informations que nous recevons et nous comparons ce qui nous est dit avec nos croyances préexistantes. Si une nouvelle information correspond à nos opinions déjà existantes, nous l’ajoutons à celle-ci. Mais dans le cas contraire, nous aurons tendance à la rejeter, surtout si cette information remet en cause radicalement nos pensées.

Croire les faits

Dans la crise actuelle, les gouvernements ont demandé des « actes coûteux » de la part des citoyens, comme des mesures de couvre-feu ou de distanciation sociale. Mais une bonne partie de ces conseils ont été rejetés, ignorés ou n’ont simplement pas été entendus. Les populations ne croient pas à l’efficacité des mesures et s’interrogent sur la manipulation des médias.

Une fois de plus, la faute ne peut pas simplement être rejetée sur les fausses informations répandues sur les réseaux sociaux. Plusieurs gouvernements n’ont pas été transparents sur les connaissances qu’ils avaient à propos du virus. Dans d’autres cas, des responsables gouvernementaux ont changé d’opinion si rapidement qu’il n’est pas surprenant que les gens aient du mal à croire ce qu’ils entendent. Un bon exemple de ce modèle est le Premier ministre britannique Boris Johnson, qui a d’abord dit qu’il serrerait la main à n’importe qui dans la rue avant de décréter la fermeture totale du pays. Et Johnson s’est retrouvé lui-même contaminé.

Un remède contre la méfiance n’est pas facile à trouver. Nous n’avons pas besoin de croire en chaque déclaration émise par nos gouvernements. Nous pouvons poser des questions ; en fait, nous devrions. Nous pouvons vérifier les informations encore et encore, mais nous devons aussi écouter pour entendre les conseils et les faits, peu importe s’ils renforcent ce que nous croyons ou non. Comme Ursula Von der Leyen disait dans son intervention à destination des citoyens européens : « Ces fausses informations qui se propagent vous nuisent. La désinformation peut tuer. Mais ensemble, nous pouvons rédiger et tenir de bonnes archives ».

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