Législatives françaises 2024 : une surprise nommée Nouveau Front populaire

, par Paul Brachet

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Législatives françaises 2024 : une surprise nommée Nouveau Front populaire
Le Nouveau Front Populaire est arrivé légerement en tête des élections législatives françaises. © Jeanne Menjoulet, Flickr

Le 7 juillet au soir, surprise ! Les élections législatives françaises voient la gauche gagnée les urnes, dans une Assemblée qui n’a jamais été aussi divisée.

La surprise de la gauche

C’est un séisme. Pour la première fois depuis 2012, et alors que tout le monde pressentait une extrême droite au plus haut, voire majoritaire, la première force du pays est bel et bien… à gauche. Le Nouveau Front Populaire est en effet arrivé premier du second tour des élections législatives, avec 182 députés, auxquels il faut ajouter une partie des 13 députés divers gauche.

Un séisme alors que l’opinion s’était préparée à un raz-de-marée Rassemblement national. L’extrême droite française n’a pas obtenu la majorité attendue, ni même le titre de première force politique de France, elle arrive troisième avec 143 sièges. C’est plus qu’aux dernières élections législatives de 2022, mais bien moins qu’espéré. Une majorité évitée grâce au sursaut d’un front républicain qui a permis désistements et barrages.

Le bloc libéral Ensemble mené par Gabriel Attal, Premier ministre sortant, a quant à lui réussi à se maintenir, bénéficiant de ce même front républicain. Il obtient 168 sièges, contre 250 sièges en 2022.

Bardellisation ou Bordelisation : la binarité médiatique

La campagne fut rude pour l’ensemble des forces politiques, démontrant la polarisation des débats et la radicalisation en paroles et en actes de la vie politique. Plusieurs candidats, de tous bords, se sont faits physiquement agressés alors qu’ils étaient en campagne.

Si les médias se sont faits le relai de ce tournant de la vie politique française, ces derniers ont également cadré les débats autour d’un choix binaire : la bardellisation ou la bordelisation. Relayant les désistements en faveur des candidats pouvant contrer l’élection des candidats RN, ainsi que la constitution d’un relatif front républicain, la plupart des médias s’est concentré sur une potentielle majorité absolue du Rassemblement national à l’Assemblée nationale. Se basant sur des projections, somme toute fragiles, les commentateurs ont fait état d’une prophétie quasi réalisatrice. Conséquence de ce cadrage médiatique selon la Fondation Jean Jaurès, les responsables du RN ont disposé d’une exposition médiatique inégalée. Inégalée par leur parti dans le passé, mais également inégalée par les autres forces politiques concourantes aux élections législatives. Bref, les médias n’ont jamais parlé autant du RN qu’aujourd’hui ! Une exposition médiatique qui ne doit pas non plus faire abstraction des thèmes de débat choisis par les journalistes, des thèmes plutôt favorables à l’extrême droite.

Infographie: Législatives 2024 : quelle a été la répartition du temps de parole ? | Statista Vous trouverez plus d’infographie sur Statista

Selon les commentateurs, l’autre choix des électeurs était une Assemblée ingouvernable. Une Assemblée nationale sans majorité claire. Une Assemblée nationale “bordelisée”. Dans ce sens, et se basant sur ces mêmes projections fragiles et problématiques, les commentateurs ont dépeint un pays bloqué par les divisions partisanes d’une Assemblée privée de majorité. Un refrain déjà employé il y a deux ans.

Il y a deux ans, les élections législatives ont bien débouché sur une absence de majorité, mais pas sur une ingouvernabilité de la France. Si aujourd’hui le risque est bien réel, il n’en reste pas moins que ce cadrage a pu influencer le vote des électeurs. C’est d’autant plus vrai si l’on retient la sur-représentation médiatique du RN comme parti de l’ordre et de la nation, qui s’est présenté dans la campagne comme “rempart au chaos”.

La défaite d’Emmanuel Macron

Quoi qu’il en soit, les élections législatives de 2024 - qui devaient être une “clarification” pour Emmanuel Macron - sont une défaite pour la majorité présidentielle sortante. Plus, il s’agit là d’une défaite personnelle pour le chef de l’Etat.

En 2014, Emmanuel Macron arrive en politique avec le souhait de voir l’extrême droite disparaître du champ politique français. Pour cela, il a souhaité dès 2014, alors ministre de l’économie, “améliorer” les chiffres de l’emploi et de la compétitivité. Selon lui, les deux moteurs du vote d’extrême droite. Une vision ultralibérale de la politique qui mena Emmanuel Macron à réitérer cette vision une fois à la tête de l’Etat. Se présentant alors comme l’unique rempart contre “les extrêmes”, il a réussi son pari politicien et a été réélu deux fois par le barrage contre cette même extrême droite. Car si son pari a fonctionné d’un point de vue politicien, il n’a pas fonctionné d’un point de vue politique : l’extrême droite n’a cessé d’augmenter et n’a cessé de briser un à un les plafonds de verre. Aujourd’hui, bien que l’extrême droite ait été reléguée à la troisième place, le bloc libéral a permis une augmentation significative de leurs sièges à l’assemblée. Cela, alors même que le chômage et la compétitivité du pays ont connu une nette amélioration.

Alors que le Rassemblement national a de peu manqué les portes de Matignon, il vise désormais la présidence de la République, un désaveu pour celui qui voulait, il y a 7 ans, “ne plus laisser aucune raison de voter pour l’extrême droite”.

Quid de l’avenir politique de la France ?

La situation est inédite pour un pays dont les institutions ont été créées afin d’éviter ce même type de situation. Afin d’éviter des situations d’instabilité. En effet, les élections législatives n’ont débouché sur aucune majorité, et aucune majorité ne semble se dessiner alors que tous sont résolus à appliquer leur programme respectif.

La coutume voudrait que le Président de la République nomme un Premier ministre issu des vainqueurs des élections et capable de former une majorité, même relative, au sein de l’Assemblée nationale.

Dans la situation qui est la nôtre, Emmanuel Macron devrait selon la coutume nommer un Premier ministre issu du Nouveau Front populaire qui susciterait l’adhésion, ou l’abstention, du bloc libéral et des Républicains (centre droit). Mais que valent les coutumes et les règles de convention dans une situation inédite ?

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