Le Plan de relance « Next Generation EU » adopté pour affronter la crise liée au coronavirus est une contribution historique, aussi bien en termes de solidarité entre les États membres de l’Union Européenne (UE) que pour l’approfondissement de la construction européenne.
Ce n’est certes pas la première fois que les États membres de l’UE font preuve de solidarité financière, puisque le budget communautaire l’incarne depuis des décennies, ni la première fois que les Européens empruntent ensemble. Ce sera cependant la première fois que, les États membres s’endetteront ensemble à un tel niveau, non pas seulement pour se prêter de l’argent mais pour le transférer des uns vers les autres. D’évidence, il faut voir là une nouvelle avancée fédérale de l’UE, pour le plus grand profit de ses concitoyens.
Nous invitons l’ensemble des Parlements des pays de l’UE à approuver ce pas en avant politique et budgétaire, afin que les 750 milliards d’euros prévus puissent rapidement venir en aide aux pays et secteurs les plus touchés par l’épidémie. Nous nous félicitons en outre que la France ait vocation à recevoir environ 40 milliards d’euros, soit une contribution substantielle du Plan « France Relance » de 100 milliards d’euros annoncé par le gouvernement, qu’il importe de bien mettre en valeur.
Le plan de relance “Next Generation EU” s’ajoutera aux interventions décisives de la BCE (d’au moins 1 350 milliards d’euros) et à d’autres apports financiers d’environ 550 milliards d’euros issus du budget de l’UE (notamment en soutien du chômage partiel), mais aussi de la Banque européenne d’investissement et du Mécanisme européen de stabilité. Au total, les Européens ont formulé une réponse économique et financière à la fois concrète et convaincante, alors qu’ils se sont montrés plus déficients et décevants dans leurs réponses sanitaires mal coordonnées, liées au déficit de compétences de l’UE, notamment en terme de santé, que nous appelons à combler.
Nous regrettons que les compromis forgés par le Conseil européen lors de l’adoption du « Plan de relance » n’aient pas permis de prévoir davantage de dépenses en matière de santé ou de créer un « Fonds européen d’investissement stratégique » qui aurait été très utile dans une compétition économique mondiale de plus en plus exacerbée.
Nous déplorons également que ces compromis aient été conclus au détriment du budget de l’UE pour la période 2021-2027, et nous appelons les Députés européens à peser de tout leur poids en faveur de l’augmentation de financements tout aussi essentiels.
Les propositions formulées par la Commission européenne avaient clairement identifié les besoins de financement destinés aux programmes Erasmus + et Horizon Europe, à la cohésion territoriale et aux actions dédiées à la création et au patrimoine culturels, qui contribuent à l’émergence d’une citoyenneté européenne. Nous souhaitons que l’augmentation des financements finalement retenue corresponde à ces besoins, encore démultipliés par la crise actuelle, sur la base d’un accord plus ambitieux entre le Parlement européen et le Conseil des ministres.
Les territoires et secteurs ciblés par le Plan de relance bénéficieront des fonds européens dès 2021, en fonction de leurs besoins, tandis que l’ensemble des États membres n’auront à les rembourser qu’entre 2028 et 2058 : ces échéances de long terme traduisent elles aussi une solidarité financière concrète entre Européens, qui doit bénéficier à tous les territoires, ainsi qu’une réaffirmation de leur volonté d’union.
En l’état des règles de financement de l’UE, la France aurait à rembourser environ 65 milliards d’euros à l’horizon 2058, soit beaucoup plus que les 40 milliards d’euros qu’elle devrait recevoir à court terme. Cette solidarité active de notre pays est le reflet de sa situation économique et de sa prospérité relative, qui en font aussi un « contributeur net » du budget communautaire. Cette solidarité est à l’honneur et à la hauteur de notre pays !
La création de nouvelles « ressources propres » finançant le budget de l’UE offrirait cependant une autre perspective : en même temps qu’elle délesterait la France et les États membres du remboursement du plan de relance, elle donnerait davantage d’autonomie budgétaire à l’UE, en lui permettant d’adopter des taxes réorientant son développement économique, social et environnemental original.
La modernisation du système d’échange de droits d’émission (dit « ETS ») et la mise en place d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières de l’UE nous semblent dès lors d’autant plus souhaitables qu’elles donneront également corps au « Pacte vert européen » et au leadership international de l’UE en matière environnementale et climatique. C’est aussi à ce titre qu’il faut s’assurer que les fonds du plan de relance contribuent puissamment à notre transition écologique – de même qu’à notre transition numérique.
Adoption parlementaire et mise en œuvre effective du “NextGenerationEU” ; augmentation et amélioration du budget communautaire 2021-2027 ; modernisation et verdissement du financement de l’UE : c’est à cette triple condition que les Européens pourront répondre efficacement aux défis inédits que leur lance le coronavirus.
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