Le bio va-t-il rester bio ?

, par Sarah Vanseveren

Le bio va-t-il rester bio ?
Les exploitations bio proches de cultures intensives ne peuvent prétendre au label. - christomor2003 (CC/Flickr).

Il existe sans conteste une prise de consciences collective des impacts de notre alimentation et des produits qui nous entourent. Prise de conscience enrichit par le succès de films comme « Demain », un documentaire sur des initiatives écologiques locales à travers le monde. L’Union européenne est un échelon particulièrement adapté pour réguler les produits alimentaires, essentiellement fournis par de grandes multinationales. Elle a par ailleurs engagé depuis plusieurs années déjà une réforme de l’agriculture biologique.

La réglementation européenne : enjeux et perspectives

Les eurodéputés de la commission agriculture se sont prononcés début février pour l’abandon de la décertification de produits de l’agriculture biologique contaminés par des OGM ou des pesticides. L’avis du Parlement européen s’inscrit dans la démarche de révision du cahier des charges de l’agriculture biologique entreprise par la Commission européenne depuis 2011. Cette dernière a soumis des propositions qui vont plutôt dans le sens d’un renforcement de cahier des charges, afin d’éviter toute dérives et de garantir la confiance des consommateurs. Elle prévoit également la fin des exploitations mixtes, afin de limiter les dérives et d’intensifier les contrôles.

Le Parlement européen quant à lui souhaite se positionner dans une démarche encourageant le développement des exploitations biologiques, en ne créant pas un cadre trop stricte propre à décourager les entrants sur le marché. En ce qui concerne les pesticides, les députés de la commission agriculture sont favorables à des mesures de précaution plutôt qu’à des seuils spécifiques.

Les eurodéputés de la commission agriculture du Parlement européen ont donc voté une série de mesure qui remet en cause les fondamentaux du bio. Revenons à l’origine du débat : un produit bio est par définition un produit qui ne contient pas de substances chimiques ni d’OGM et qui est produit dans le respect du bien-être animal. En France, un produit bio ne peut contenir plus de 0,9% d’OGM ou de pesticides. Si un contrôle a lieu et qu’il s’avère que les taux sont dépassés, le produit perd sa certification. Cette règle est remise en cause par le vote du Parlement européen, qui souhaite renoncer à cela. La principale raison invoquée concerne les exploitations mixtes. C’est-à-dire que des parcelles de produits bio sont situées à côté de parcelle dites « industrielles » et de fait peuvent être contaminée involontairement par des produits transportés par le vent d’une parcelle à l’autre.

Entre encouragement de ce marché en plein boom et exigence de qualité, l’équilibre est bien difficile à trouver au niveau européen.

Vers une agriculture biologique industrielle ?

Cette révision du cahier des charges de l’agriculture biologique peut apparaître comme une porte ouverte à un assouplissement général des règles concernant les produits issus de l’agriculture biologique, et donc à un amoindrissement de la qualité garantie par ce type de produits. Si les consommateurs peuvent gagner à avoir plus de produits sous le label bio, rien de moins sûr que la qualité suive de façon exponentielle sa croissance. L’Union a donc pour ambition d’harmoniser le cahier des charges européen afin de garantir une qualité égale dans tous les pays.

Car le bio a de plus en plus d’adeptes. Des adeptes qui se tournent majoritairement vers le bio pour les garanties de qualité qu’il représente. Alors encourager le développement de l’agriculture biologique en la galvaudant ? C’est bien évidemment prendre le risque d’être confronté aux mêmes dérives qui touchent l’agriculture industrielle. Ce fut récemment le cas en Allemagne où le bio s’est retrouvé face à des dérives industrielles : des milliers d’œufs “bio” ont dû être rapatriés alors que des volailles avaient été contaminées par une alimentation non certifiée biologique.

Néanmoins l‘agriculture biologique poursuit son essor. Elle représente en moyenne 5,7% de la surface agricole utilisée (SAU) dans les pays européens. La part de la bio est supérieure à 20% en Autriche et 10% en Suède, en Estonie, en République tchèque, en Lettonie et en Italie. En 2015, il y a eu une augmentation générale de 10% des surfaces européennes d’agriculture biologiques

Les consommateurs ont pourtant bien du mal à s’y retrouver dans le foisonnement de labels et de règles européennes. La question de l’étiquetage alimentaire est par ailleurs largement en débat sur la scène européenne, afin de contraindre les industriels à afficher les ingrédients et produits utilisés. Un code couleur pour indiquer la nocivité ou les bienfaits des produits industriels a même été évoqué.

Sera-t-il possible d’avancer vers une alimentation éclairée ? Le bio est-il un effet de mode ou une tendance de fond ? Quoiqu’il en soit les interrogations concernant notre alimentation sont bien là et l’Union européenne est consciente qu’elle doit être leader sur le sujet. L’un des défis majeurs auquel est confronté l’agriculture biologique est bel et bien de ne pas retomber dans le piège de l’agriculture industrielle. La réforme européenne de l’agriculture biologique devrait donner une indication quant aux évolutions futures.

Vos commentaires
  • Le 18 mars 2016 à 17:00, par Jeans En réponse à : Le bio va-t-il rester bio ?

    Pourquoi ne pas interdire tout de suite les produits non traités au Roundup ? ?

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