Des micro-États liés à leurs grands voisins
Rescapés des bouleversements guerriers et expansionnistes européens, ces morceaux de souveraineté sont majoritairement issus de systèmes monarchiques féodaux qui ont connu des difficultés pour accéder à la modernité et au monde entier. Même s’ils sont tous indépendants, ces États se distinguent par une grande dépendance vis-à-vis de leur(s) voisin(s).
Ainsi, occupé un temps par la France révolutionnaire puis napoléonienne, Monaco a signé un traité d’amitié protectrice avec Paris au sortir de la Première Guerre mondiale lui garantissant la protection militaire de la France en contrepartie d’un alignement total de sa politique économique et étrangère. Andorre, dont l’indépendance est accordée par Charlemagne en 780, bénéficie d’un système unique au monde instaurant deux coprinces dont les héritiers sont l’évêque catalan d’Urgell et le Chef de l’État français.
La République de Saint-Marin, la plus ancienne du monde, date de 1600 et est enclavée au sein de l’Italie, responsable de sa défense militaire. Le Liechtenstein, quant à lui, acquiert son indépendance en 1806 grâce aux victoires de Napoléon Ier sur le Saint Empire romain germanique. Il se place néanmoins rapidement sous la protection de son voisin helvétique.
Enfin, le Vatican est créé en 1929 par les accords de Latran, sous l’impulsion de Benito Mussolini, pour reconnaître la souveraineté du Saint-Siège, sur un territoire enclavé dans la capitale italienne. La politique étrangère de la plupart de ces États est liée à celle de l’État qui leur garantie défense et sécurité. Comme les micro-États insulaires du Pacifique, ils ont ainsi adhéré tardivement aux organisations internationales comme l’Organisation des Nations Unies, en 1990 pour le Liechtenstein, 1992 pour Saint-Marin et 1993 pour Monaco et Andorre, alors que le Vatican, du fait de sa nature inédite n’est pas membre de l’ONU.
Des relations plus ou moins étroites avec l’Union européenne
Ces six États peuvent être rangés dans trois catégories selon leurs relations avec l’Union européenne. Tout d’abord, Monaco, Andorre et Saint-Marin font l’objet d’une relation particulière et commune vis-à-vis de l’Union. Cette spécificité n’est en rien étonnante puisque leurs États « défenseurs » sont membres de l’UE depuis ses origines. Si Monaco est intégré au territoire douanier de l’UE en même temps que les États membres en 1963 c’est grâce aux accords douaniers passés avec la France un siècle plus tôt. Andorre et Saint-Marin ont quant à eux signé ces accords en 1991. Cependant, depuis 2009, l’UE donne un nouveau souffle aux rapports avec ces trois voisins en tenant compte de la « petite dimension territoriale » des pays concernés pour leur proposer un cadre commun. En 2013, après de nombreuses discussions sur l’évolution des relations entre les quatre entités, et compte tenu de la situation particulière des économies concernées, les institutions européennes préconisent la signature de plusieurs accords d’association avec les trois pays. Les négociations démarrent début 2015 entre les quatre entités. À l’heure actuelle, si la question de la libre-circulation des marchandises est réglée, et celle des capitaux et des services en cours, l’ouverture des frontières aux individus va constituer une difficulté de taille, notamment au regard de certaines législations promouvant la priorité nationale pour les emplois privés et publics.
Le Liechtenstein devient membre en 1995 de l’Accord Européen de Libre-Échange, coopération strictement économique regroupant également la Suisse, la Norvège et l’Islande, et donc de l’Espace Économique Européen, cadre regroupant l’AELE et l’UE dans un vaste marché commun, excluant par là même la confédération helvétique. Il bénéficie ainsi de relations économiques et commerciales privilégiées avec l’Union européenne. Le Vatican, quant à lui, forme une coopération douanière avec l’Italie seule.
L’Euro et Schengen, outils d’une intégration différenciée
Alors que l’obligation de l’adoption de la monnaie unique ne vaut que pour une partie des États membres de l’Union, certains micro-États ont fait le choix d’abandonner leur monnaie nationale, selon des modalités différentes. L’union douanière signée entre la France et Monaco en 1865 contenait également un accord monétaire sur l’utilisation du Franc monégasque. En 2001, un nouvel accord a substitué l’Euro au Franc.
Si la demande d’adoption de la monnaie unique par Saint-Marin en 1999 a été approuvée par les autorités européennes aisément, ce n’est pas le cas d’Andorre. En effet, des désaccords en matière fiscale entre la principauté pyrénéenne et Bruxelles ont empêché une entente jusqu’en 2011 quand Andorre-la-Vieille s’est résolue à respecter les exigences européennes. La mise en circulation des pièces andorranes a cependant été retardée : Bruxelles a refusé le dessin des faces nationales des pièces de 10, 20 et 50 centimes proposé par la Principauté qui représentaient le Christ. Le symbole a été jugé contraire au principe de neutralité. Une fois le dessin modifié, les pièces ont été mises en circulation en 2015.
En 2000, le Vatican a signé un accord avec Bruxelles pour lui permettre d’adopter la monnaie unique. La Cité a ainsi le droit de frapper 1 million d’Euros par an. Concernant le Liechtenstein, c’est la Suisse qui assure les intérêts fiscaux et monétaires de Vaduz sur le plan international, depuis la création d’une union monétaire signée en 1924. C’est donc le Franc suisse qui a court dans la Principauté.
S’agissant de l’espace Schengen, seul le Liechtenstein en fait effectivement partie depuis son adhésion en 2011 qui fait suite à l’intégration des autres États de l’AELE. Monaco respecte les règles Schengen du fait de son union douanière avec la France. Saint-Marin et le Vatican, enclavés dans le territoire italien, font également partie de facto de cet espace puisqu’ils gardent leur frontière ouverte aux citoyens européens. Cependant, Andorre maintient le contrôle à ses frontières et l’obligation de visas et de passeports pour les non-nationaux.
Malgré des relations plus ou moins poussées avec les autorités européennes, aucun micro-État n’envisage actuellement d’adhérer pleinement à l’Union européenne, malgré la présence de partis, généralement sociaux-démocrates ou écologistes, favorables à cette adhésion dans les parlements locaux. Si l’intégration à l’UE n’a pas les faveurs dans les micro-États c’est parce que l’argument du développement économique, fondement des candidatures des Balkans occidentaux par exemple, n’a pas le même poids dans ces pays développés. Au contraire, les gouvernements concernés ont peur de perdre leur autonomie, à cause d’un système de majorité pondéré selon la démographie, système clairement désavantageux pour eux. Il est toutefois intéressant de noter qu’un référendum a été organisé en 2013 par les autorités saint-marinaises à propos de l’ouverture d’une procédure d’adhésion à l’UE. La courte victoire du « oui » n’a toutefois pas suffi puisque le scrutin a été invalidé faute d’atteindre le taux de participation minimal, la question de l’adhésion reste ainsi en suspens.
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