L’Usage massif des réseaux sociaux
Lors d’un micro-troittoir, les participant
e s ont déclaré passer plus de deux heures par jour sur les réseaux sociaux. Cette tendance est confirmée par des enquêtes menées par Diplomeo et BDM, selon lesquelles les jeunes passent entre trois et cinq heures par jour sur ces plateformes. Il se pose la question si une telle consommation massive de contenu influence nécessairement leur comportement et leur vision de la politique.Le but des contributions sur les réseaux sociaux est de susciter des émotions aussi fortes que possible chez l’utilisateur
rice, conduisant ce tte dernier ère à associer certains thèmes à des émotions précises. Ainsi, les auteur e s de messages peuvent influencer la vision du monde des jeunes.Les émotions et leur impact
Les réseaux sociaux sont particulièrement efficaces pour provoquer des émotions intenses, telles que l’amour, la haine, la douleur ou l’injustice, qui inondent les publications. Les conséquences peuvent être positives ou négatives. Nous examinons ici deux phénomènes particulièrement marquants.
La manipulation de l’opinion publique
La manipulation de l’opinion publique à travers les réseaux sociaux est une problématique croissante, surtout en période d’élections. Comprenant l’importance de ce moyen de communication, de nombreux partis politiques en France et en Allemagne ont ouvert des comptes sur ces plateformes. Le parti d’extrême droite, Alternative für Deutschland (AfD), cumule des audiences singulières sur TikTok. Selon des enquêtes, TikTok arrive troisième parmi les médias les plus utilisés par les jeunes. Les partis de gauche radicale et d’extrême droite sont de plus en plus présents sur des plateformes comme TikTok, YouTube ou Instagram, exerçant ainsi une influence accrue sur la jeune génération. Cette tendance est confirmée par notre micro-trottoir, où les participant
e s ont souvent cité le Parti Belge des Travailleurs et le Mouvement Réformateur comme étant les plus représentés sur les réseaux sociaux.Les bulles de filtre
Comment expliquer cette montée en puissance des partis extrémistes sur les réseaux sociaux ? Eli Pariser, militant sur Internet, met en lumière cette problématique à travers le concept de bulles de filtre. Les algorithmes des réseaux sociaux s’adaptent précisément à chaque utilisateur
rice en collectant un maximum de données pour prévoir ce qu’il elle aimera ou non. Si l’internaute aime ce qu’il elle trouve, il elle restera plus longtemps sur la plateforme, permettant ainsi de collecter encore plus de données. Cependant, ce méchanisme pose un problème majeur : chaque personne est confrontée uniquement à des informations qu’il elle aime, excluant toutes les opinions contraires. Cela crée des bulles où les individus se retrouvent enfermé e s, ce qui polarise les opinions et favorise les partis extrémistes.La réussite des partis extrémistes
Un autre facteur de l’extrémisation des jeunes électeur
rice s est la capacité des partis extrémistes à « percer » sur les réseaux sociaux. Pourquoi donc ? Ces partis semblent avoir mieux compris comment interpeller le public en ligne avec des idées simplifiées.La vigilance des jeunes
Cependant, les jeunes ne sont pas dupes. La majorité a une impression positive des réseaux sociaux mais est consciente des risques de manipulation et d’influence négative. Les jeunes ne sont pas passif
ve s ; ils elles vérifient les sources et consultent plusieurs plateformes internationales pour éviter la désinformation et les fake news. Laura, une jeune femme espagnole de 24 ans a souligné qu’elle ne faisait pas confiance aux médias de son propre pays et préférait s’informer sur des plateformes internationales pour obtenir des informations plus fiables. Cette stratégie permet de se prémunir contre la désinformation. En revanche, les baby-boomers, qui n’ont pas grandi avec les réseaux sociaux, ne sont pas toujours conscient e s des fake news et des manipulations des bulles de filtre.L’engagement politique en ligne
L’influence des réseaux sociaux n’a pas que des aspects négatifs. Un véritable mouvement s’est formé en ligne, notamment grâce à la gauche radicale en France et au parti La France Insoumise (LFI). Ce mouvement a débuté avec la question de la situation en Palestine, permettant à cette gauche de sensibiliser une jeunesse initialement peu intéressée par les élections et la politique. De plus, on observe de plus en plus de prises de parole sur internet et de jeunes personnalités publiques sur les réseaux sociaux appelant à se mobiliser contre l’extrême droite. Cet élan est bien réel et les instituts de sondage le confirment. Manon Aubry, tête de liste de LFI, enregistre la plus forte progression dans les sondages IPSOS, passant de 7 % à 9,5 %, soit une hausse de 1,5 % après une campagne relativement stable. Selon les sondages, cette progression s’explique par une baisse de l’abstention, surtout chez les jeunes. La stratégie de LFI, qui mise sur la politisation des jeunes via les réseaux sociaux, semble porter ses fruits en augmentant non seulement la participation, mais aussi l’intérêt des jeunes pour les élections européennes. Cependant, cet exemple doit être nuancé. La politisation des jeunes sur la question palestinienne découle en grande partie de la mise en avant de ce sujet par LFI. Il s’agit davantage d’une conséquence indirecte qu’une véritable stratégie délibérée. Les réseaux sociaux, malgré leurs risques de manipulation et de polarisation, restent un outil puissant pour mobiliser et informer la jeunesse sur les questions politiques.
L’impact des réseaux sociaux sur la jeunesse et la politique : un tournant pour les élections européennes
Les élections européennes de cette année ont mis en lumière l’influence significative des réseaux sociaux sur les jeunes électeur
rice s. Si ces plateformes peuvent être des vecteurs de manipulation et de polarisation, elles offrent également des opportunités uniques pour la mobilisation et la sensibilisation politique. Les partis politiques, notamment les extrémistes, ont su exploiter ces outils pour toucher un jeune et large public. Cependant, les jeunes ne sont pas passif ve s face à cette influence ; beaucoup adoptent des stratégies pour vérifier l’information et éviter la désinformation.La progression notable de partis comme La France Insoumise, et le RN en France, ainsi que le BSW et l’AfD en Allemagne montre que l’engagement des jeunes peut être stimulé par une utilisation stratégique des réseaux sociaux, augmentant ainsi la participation électorale. Ces résultats soulignent l’importance de comprendre et de réguler l’influence des réseaux sociaux dans le contexte démocratique, tout en reconnaissant leur potentiel à revitaliser la participation politique parmi les jeunes générations. Les élections européennes de cette année marquent donc un tournant, révélant les défis et les opportunités que les réseaux sociaux présentent pour l’avenir de la démocratie en Europe.
L’avenir montrera si les réseaux sociaux jouent un rôle aussi important lors des prochaines élections nationales en France et en Allemagne. Et si d’autres partis comprennent la nécessité de s’adresser à leur groupe cible là où il s’informe.
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