Une vraie-fausse priorité des institutions
À écouter Tytti Tuppurainen, la ministre finlandaise des Affaires européennes, et Vera Jourova, Vice-présidente de la Commission européenne chargée des Valeurs et de la Transparence, la lutte contre les « interférences malveillantes » est une priorité tant pour le Conseil de l’Union européenne, que pour la Commission européenne.
Les deux institutions mettent en avant la nécessité d’impliquer tout le spectre des acteurs concernés par le sujet : société civile et citoyens, industrie, États membres, Union européenne, journalistes, scientifiques, pouvoirs publics, éducateurs, plateformes en ligne, agences de sécurité… Le tout pour mettre en oeuvre « une politique globale et une méthode transversale ».
Mais quelles ont été les actions concrètes ? Il y a bien eu la création d’un Réseau européen de coopération pour les élections, la mise en oeuvre d’un code de pratiques pour les plateformes et les réseaux sociaux et l’établissement d’un Centre européen de lutte contre les menaces hybrides à Helsinki. Néanmoins, aucune de ces initiatives n’a permis de sécuriser le continent face aux ingérences extérieures : la fermeture, en 2017, d’un centre de données privées en Lituanie, par crainte d’ingérences russes et d’influence sur les élections présidentielles du pays, en témoigne.
Consensus dans l’hémicycle : il y a danger
Ainsi le rappelle l’eurodéputée Kati Piri (S&D) : « les dangers augmentent jour après jour, et ils perdureront si nous ne faisons rien ».
Serge Lagodinsky (Verts/ALE) va jusqu’à parler d’une « guerre de manipulation ». Caroline Voaden (Renew) et Kati Piri n’hésitent pas à se lancer dans des invectives personnelles contre Nigel Farage (non-inscrit) et Boris Johnson, le premier ministre du Royaume-Uni, alors que Domenèc Ruiz Devesa (S&D) affirme qu’il y a « une coalition d’ennemis extérieurs à l’Union européenne, qui sont alliés à des personnes présentes dans nos États membres ».
La seule résistance vient des groupes de droite. Les nationalismes et populismes sont accusés de détruire l’Europe notamment au travers de la désinformation.
Nathalie Loiseau (Renew) parle de « cancer s’acharnant à abîmer notre monde libre ». « Si nous sommes capables de protéger ce qui va dans notre assiette, nous devons être capables de protéger ce qui vient dans nos urnes et détermine l’issue des élections », a-t-elle fait remarquer.
D’autres eurodéputés mentionnent l’absence de transparence pour le financement des partis politiques européens.
Le dilemme : liberté ou sécurité ?
La Française Nathalie Loiseau propose une Agence de protection des démocraties, sans décrire plus avant quels en seraient les missions et fonctionnements. Du côté du Conseil de l’Union européenne, Tytti Tuppurainen incite à collaborer davantage avec l’OTAN et avec les Balkans occidentaux, pour mieux protéger l’Europe.
Ce sera tout pour aujourd’hui, en termes de solutions avancées…
De quoi susciter le désaccord du Français Jordan Bardella (ID), pour lequel « ceux-là même qui dénoncent le complot ont recours au complot » : y comprendre que l’Union européenne elle-même a fait ingérence dans certaines élections, et semble l’avoir oublié. C’est ce que pointent également Peter Lundgren et Hermann Tertsch (ECR) du doigt.
Les députés semblent tiraillés entre deux extrêmes, entre respecter ou restreindre la liberté d’expression, afin de ne pas faire d’internet un espace de non droit, et sans contrôle.
Martina Anderson (GUE) résume finalement le status quo et la stagnation des débats depuis plusieurs mois : « si les choses se passaient ailleurs, l’UE les condamnerait ! »
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