Grande coalition : quelle place pour l’Europe ?

, par Daniel Batel, traduit par Thibault Dutoit

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Grande coalition : quelle place pour l'Europe ?
Quelle place pour l’Europe dans la nouvelle grande coalition ? Image : Marco Verch / Flickr Creative Commons 2.0

Presque 6 mois se sont écoulés entre la signature de l’accord de coalition entre la CDU/CSU et le SPD et les élections législatives de septembre 2017. Les semaines décisives entourant le vote des membres du SPD furent mouvementées au sein de l’Union européenne. D’aucuns disaient en effet que cette dernière avait plus que jamais besoin d’un gouvernement allemand stable. Mais quelle importance revêt l’Europe dans cette grande coalition ?

Le titre même de l’accord est limpide : « un nouveau départ pour l’Europe ». Le nouveau gouvernement allemand marque ainsi dès le début sa volonté de porter une attention particulière aux affaires européennes. Le mot « Europe » apparaît 298 fois sur les 179 pages que comporte le document et détrône ainsi tout autre mot-clé. Ce seul point n’est toutefois pas la garantie d’une politique européenne efficace : un premier bilan ne pourra être dressé qu’une fois que les déclarations d’intention du nouveau gouvernement se seront transformées en mesures concrètes. D’ici là, la qualité des concepts avancés et leurs possibilités de mise en œuvre ne peuvent être évaluées que partiellement. Notons toutefois déjà le rapprochement souhaité avec la France. La coalition estime que la coopération entre les deux pays a déjà bien des accomplissements à son actif et qu’elle est nécessaire pour faire fonctionner l’Union. Le président Macron, qui aspire ni plus ni moins à une refondation de l’Europe, n’est sans doute pas étranger à cet objectif. Dans l’ensemble, l’accord de gouvernement favorise une prise de décision sur la scène européenne plutôt que nationale et vise à faire parler l’Europe d’une seule et même voix, ce qui a toujours été son point faible. Selon les partenaires de coalition, les États membres doivent adopter une position commune pour lutter de manière cohérente contre les mouvements antidémocratiques et nationalistes de droite, pour endiguer le chômage des jeunes (surtout dans les pays du sud de l’Europe), ainsi que pour mieux gérer l’arrivée de migrants dans l’espace Schengen et traiter les causes de migration à la source.

De nouveaux objectifs pour préserver et développer davantage l’Union européenne

Les récents bouleversements qui ont ébranlé l’Europe, tels que le Brexit, l’élection de Donald Trump à la Maison Blanche ou le grand nombre de migrants ayant rejoint le territoire européen, ont mis l’Union européenne à rude épreuve. Le nouveau gouvernement allemand dresse le même constat et propose quatre nouveaux piliers autour desquels articuler la politique européenne. Une « Europe de la démocratie et de la solidarité », tout d’abord, devra faire preuve de davantage de transparence, être plus proche des citoyens, promouvoir toujours plus de solidarité et être exempte d’égoïsme. Une « Europe de la compétitivité et des investissements » doit ensuite pouvoir relever les défis de la mondialisation ainsi qu’assurer le maintien des emplois existants et la création de nouveaux postes. Une « Europe des chances et de l’égalité », quant à elle, vise, entre autres, à améliorer l’équivalence des normes éducatives entre les différents États membres. Le dernier pilier prévu par l’accord est une « Europe de la paix et de la responsabilité mondiale » et a pour but d’accroître la capacité aussi bien militaire que civile de l’Union européenne. La politique de développement fera également l’objet d’une attention particulière. L’accord indique clairement : « Nous soutenons la concrétisation d’un plan Marshall pour l’Afrique afin d’aider l’Union africaine à mettre en œuvre son agenda 2063 ».

Responsabilités à l’égard des générations futures : davantage de protection de l’environnement

Dans l’accord de gouvernement, les négociateurs et négociatrices de la CDU/CSU et du SPD rappellent leur intention de transposer directement les dispositions du droit européen dans la politique environnementale de l’Allemagne. Les objectifs climatiques disposent de leur propre chapitre. Celui-ci aborde aussi bien la réduction des émissions polluantes et la protection de l’eau et de la biodiversité que la sortie du nucléaire et le traitement des déchets radioactifs. Si la CDU/CSU et le SPD réaffirment leur engagement envers les objectifs climatiques post-2020 de l’accord de Paris, les objectifs nationaux pour l’horizon 2020 (réduction de 40 % des émissions de CO2 par rapport au niveau de 1990) ont toutefois d’ores et déjà été jugés irréalisables lors des entretiens exploratoires. Bien des points de l’accord de coalition concernant l’Europe ne datent en réalité pas d’hier. Ceux-ci ont déjà été abordés par le passé, mais n’ont pas toujours été mis en œuvre. Les concepts relatifs à la politique européenne sont très souvent abstraits et ne sont que brièvement appliqués. Les récents événements inhérents à la politique étrangère et de sécurité commune, tels que l’attaque chimique de Salisbury ayant coûté la vie à un ancien espion russe, nous prouvent que les questions européennes doivent, elles aussi, pouvoir faire l’objet d’une réponse immédiate. Lors de sa première réunion des ministres des Affaires étrangères à Bruxelles, Heiko Maas n’aura droit qu’à un très court temps d’acclimatation si une telle affaire apparaît à l’ordre du jour.

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