Deux députées européennes au gouvernement

Portrait croisé de Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez

, par Louise Guillot

Deux députées européennes au gouvernement
CC Flickr / European Parliament

Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez ont intégré le gouvernement paritaire d’Edouard Philippe. Les deux députées européennes sont membres du groupe de l’Alliance des Démocrates et des Libéraux pour l’Europe (ADLE) au Parlement européen. Sylvie Goulard devient Ministre des Armées et Marielle de Sarnez sera en charge des Affaires Européennes. Portrait croisé de ces deux femmes qui s’engagent pour l’Europe depuis de nombreuses années.

Deux femmes passionnées par l’Europe

Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez sont deux personnalités politiques françaises finalement peu connues dans l’hexagone. Et pourtant ! Toutes deux ont construit leur carrière politique autour de leur engagement européen.

Après une Licence de droit à l’Université d’Aix-en-Provence Sylvie Goulard poursuit sa formation à Sciences Po Paris puis sur les bancs de la non moins célèbre Ecole Nationale d’Administration (ENA, promotion « Liberté, Egalité, Fraternité » 1989). Elle entre à la direction des affaires juridiques du Ministère des affaires étrangères où elle s’occupera également des questions européennes, puis travaille 4 ans au Conseil d’Etat avant de rejoindre l’équipe du président de la Commission européenne d’alors, Romano Prodi, de 2001 à 2004 en tant que conseillère politique. Sylvie Goulard enseigne plusieurs années à Sciences Po et au Collège d’Europe à Bruges de 2005 à 2009. Forte de son engagement pour l’Europe, elle préside le Mouvement Européen – France de 2006 à 2010.

Sylvie Goulard

Sylvie Goulard est députée européenne depuis 2009 où elle est titulaire de la commission des affaires économiques et monétaires (ECON) et membre suppléante de la commission affaires constitutionnelles (AFCO). Cette fédéraliste convaincue a créé en 2010, avec Mario Monti, Daniel Cohn-Bendit et Guy Verhofstadt , l’intergroupe Spinelli au Parlement qui réunit les députés fédéralistes.

Marielle de Sarnez quant à elle, est élue au Parlement européen depuis 1999. Elle siégeait en tant que membre de la commission commerce international (INTA), au sein de laquelle elle a hardiment défendu le CETA (Traité de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada), et était membre suppléante de la commission affaires étrangères (AFET). Cette proche de François Bayrou, avec qui il fondera le MoDem, est également vice-présidente du groupe ALDE au Parlement européen. Elle s’engage très tôt en politique puisque après l’obtention de son baccalauréat elle participe activement à la campagne de Valéry Giscard d’Estaing en 1974 et à la fondation de l’Union des Démocrates Français (UDF). Elle conjugue engagement national et européen puisqu’elle fut membre puis directrice de cabinet de François Bayrou lorsqu’il était Ministre de l’Éducation sous le gouvernement d’Edouard Balladur. Marielle de Sarnez a participé à la création du Parti Démocrate Européen (PDE), ainsi qu’à celle du désormais célèbre programme d’échange de jeunes en Europe : le programme Erasmus.

Marielle de Sarnez

Deux trajectoires différentes vers l’engagement politique

Sylvie Goulard a choisi la voie de l’administration : le Ministère des affaires étrangères, puis la Commission européenne avant de se présenter dans la circonscription de l’Ouest (2009) puis du Sud-Est (2014). A l’inverse, Marielle de Sarnez entre en politique par la voie du militantisme puisqu’elle s’engage pour la campagne de Valéry Giscard d’Estaing et plus tard au sein de l’UDF. Sylvie Goulard n’a jamais exercé de mandat national, alors que Marielle de Sarnez a cumulé pendant plusieurs années responsabilités nationales et européennes. Cependant, elle reconnaît elle-même qu’il est difficile d’être sur tous les fronts en même temps et démissionne de ses fonctions au Conseil de Paris en avril 2010. Le journaliste Jean Quatremer nous confie que ça n’a pas toujours été le grand amour entre Sylvie Goulard et François Bayrou, et encore moins avec Marielle de Sarnez avec qui elle entretenait des relations « houleuses » [1]. Espérons seulement que les deux ministres sauront s’entendre pour porter conjointement les sujets européens à leur agenda.

L’agenda européen des 2 ministres

Sylvie Goulard, en charge des Armées, devra s’atteler à la lourde tâche de faire avancer le dossier de l’Europe de la défense. Nicolas Dupont-Aignan dit que sa nomination l’inquiète : « on risque de revoir venir la CED [Communauté Européenne de Défense, ndlr] » [2]. La Communauté européenne de défense avait été proposée en 1950 par Jean Monnet afin de mettre en place à terme une armée européenne placée sous le contrôle d’une autorité européenne politique et militaire unique. Ce projet fut rejeté par l’Assemblée nationale française qui avait peur de sauter le pas d’une plus forte intégration européenne et craignait le réarmement de la République Fédérale Allemande, puisque des soldats allemands auraient été de facto intégrés à cette armée européenne.

La Ministre devra trouver les mots pour convaincre nos partenaires européens qu’assurer la sécurité et la défense des citoyens de l’Union passe par une défense européenne forte et capable d’être une alternative à l’OTAN. Néanmoins, cela ne pourra se concrétiser que grâce à une coopération plus étroite entre les Etats membres. Mme. Goulard est proche de son homologue allemande, Ursula Von Der Leyen, et tentera de la convaincre qu’une plus grande mise en réseau des programmes d’information à l’échelle européenne est nécessaire en vue de lutter plus efficacement contre le terrorisme, voire qu’elle trouve les arguments pour inciter l’Allemagne à participer à l’effort mené contre les groupes terroristes, notamment par la France.

Marielle de Sarnez sera Ministre auprès du Ministre de l’Europe et des Affaires Etrangères, chargée des affaires européennes. Elle devra donc travailler main dans la main avec son homologue Jean-Yves Le Drian, auparavant Ministre de la Défense sous la présidence de François Hollande, afin d’engager la France dans les réflexions sur l’avenir du projet européen et de faire des propositions concrètes pour faire avancer l’Europe. Sur sa feuille de route est également inscrit que l’Allemagne doit être un partenaire stratégique et qu’il faudra donner un nouveau souffle au tandem franco-allemand.

Toutefois, on peut regretter qu’un véritable ministère des affaires européennes indépendant, n’ait pas été créé. Cela aurait permis d’envoyer un message clair : l’Europe est une priorité et la France souhaite conduire une politique ambitieuse en la matière.

L’Europe a été un point de clivage important pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron disait vouloir faire de l’Europe une priorité, alors que la candidate de l’extrême droite prononçait un discours profondément anti-européen. Ainsi, faire le choix de nommer deux Européennes convaincues et engagées dans son gouvernement est un premier pas, mais le président devra aller plus loin s’il veut convaincre et entamer véritablement une réforme de l’Union européenne.

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