Création d’une section des Jeunes Européens Fédéralistes en Roumanie

, par Radu Dumitrescu, traduit par Théophile Rospars

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Création d'une section des Jeunes Européens Fédéralistes en Roumanie
Première réunion de la section JEF-Roumanie, brandissant le drapeau fédéraliste.

Après les succès des mouvements de la société civile au législatives de décembre 2016, puis lors des manifestations géantes de février 2017, des jeunes ont choisi de s’engager et de lancer la section roumaine des Jeunes Européens Fédéralistes afin de porter une voix résolument fédéraliste et pro-européenne dans le débat public.

Pourquoi s’engager pour l’Europe ?

Qu’est-ce qui pousse quelqu’un, dans le monde actuel, à s’engager pour le destin des autres, à se préoccuper des envies et besoins d’étrangers qu’il ou elle ne rencontrera probablement jamais ?

Ces dernières années ont été dominées par une résurgence d’un populisme haineux sur notre vieux continent. Certains ont réagi aux prétendues « vagues d’immigrés » venant du Moyen Orient et à l’arrivée de réfugiés de guerre, aux errements du système économique et aux difficultés politiques de la démocratie par une forme simpliste de nationalisme. D’anciens antagonismes furent ressuscités tandis que d’autres étaient accentués.

En même temps, en Roumanie et partout en Europe, des politiciens ont enrichi leur discours en liant dans leurs déclarations « patriotisme » et « changements radicaux ». Le plus souvent ce discours permettait de désigner comme ennemi un groupe ou une idéologie, au lieu de chercher des solutions pour les citoyens et le pays. Aujourd’hui cette tendance semble s’essouffler, voire s’inverser, les prêcheurs de haine étant maintenant battus, et peut être même renvoyés aux oubliettes de l’Histoire.

Une de leurs cibles phares était la communauté de droit, économique et politique, que nous appelons Union européenne. Présentée comme une force étrangère et lointaine, notamment pour des pays plus périphériques comme la Roumanie, imposant des normes, l’Union était un bouc émissaire facile pour les populistes qui cherchaient un « ennemi tout puissant » contre lesquelles le peuple devait être protégé.

L’UE a été attaquée de façons multiples. Pour certains elle représentait une barrière au développement économique de leur pays – quand bien même toutes les études démontraient l’inverse. Pour d’autres, « Bruxelles » était un appareil par lequel des élites mal intentionnées essayaient de voler la souveraineté du peuple, et corrompre la pureté de la patrie en permettant l’invasion de migrants porteurs de maladies infectieuses, qui en plus n’étaient ni blancs, ni même chrétiens. Sauf que tout ceci est absolument faux.

L’UE est l’exemple le plus abouti de démocratie de compromis. Son fonctionnement est complexe, constitué de réseaux d’institutions et d’agences, qui ont besoin d’armées de spécialistes pour avancer. Ceci rend sa défense plus compliquée que son attaque. Imaginez une seconde un équivalent pro-européen au bus de campagne du Leave où était marqué « Nous donnons à l’UE 350 millions de livres par semaine » pour justifier le Brexit. A quoi aurait-il ressemblé ? La vérité est que l’UE participe à notre qualité de vie. En tant que citoyen d’un des pays membres les plus récents, j’ai pu voir depuis 10 ans un nombre incroyable d’écoles, d’hôpitaux, sans compter de projets de développement économique, cofinancés et soutenus par l’UE. Malgré leurs défauts, les politiciens roumains ont placardé le drapeau roumain sur chaque institution, chaque agence, de telle sorte qu’il est impossible de se promener dans les rues de Roumanie sans voir la bannière aux douze étoiles ! Après savoir si c’est pour s’attribuer une part de la légitimité de l’UE, c’est une autre histoire…

L’UE a fait avancer la démocratie en Roumanie. Ainsi avec le processus d’adhésion, la corruption a commencé à être combattue, et la transparence des institutions a progressé. Avec le soutien de l’UE, des activistes de la société civile, des journalistes et les magistrats ont commencé à s’attaquer au clientélisme institutionnalisé qui dominait dans la société roumaine. Cette gouvernance plus efficace a permis d’améliorer notre quotidien, en allant de la qualité de l’eau du robinet et de la nourriture au comportement des politiciens en matière fiscale. Avec la remise en cause de la légitimité européenne, la vieille nomenklatura corrompue tente de reprendre le terrain perdu.

Comment souhaitons-nous nous engager ?

Les ennemis de l’Europe n’utilisent pas des arguments rationnels – car ils échouent systématiquement lorsqu’ils s’engagent sur ce terrain – mais s’adressent à nos émotions. Nous relevons ce défi, nous refusons de répondre de façon simpliste en parlant d’amour, de paix, de prospérité et de fraternité, nous voulons faire face à la réalité : la Roumanie est un petit pays, avec une économie fragile et une armée minuscule. La population est vieille, les opportunités pour les jeunes insuffisantes et les capacités d’innovation ainsi que le système éducatif sont en mauvais état.

Pour les infrastructures aussi la situation est effrayante. Les nouvelles routes se délabrent au bout d’un an seulement, les médecins gagnent trois fois rien tandis que des parasites soutenus par la classe politique s’en mettent plein les poches. Le pays le plus visité par les roumains est la Bulgarie et la plupart des ruraux n’ont jamais vu une personne de couleur ou asiatique en dehors de la télévision. On voit encore des charrettes sur les routes de campagne, et 90% des roumains considèrent encore que c’est à l’Etat de leur trouver un travail.

L’UE est la réponse à ces problèmes. La seule condition est qu’il faut faire plus. Les Etats-nations sont le résultat de la paix de Westphalie de 1648, et sont aussi obsolètes que les querelles religieuses que ce traité devait résoudre. Nous avons besoin d’une Union non seulement pour améliorer notre quotidien mais surtout pour garder notre rang économiquement et politiquement.

Notre sentiment d’appartenance se fait par cercles concentriques, de notre quartier à notre continent, à travers un processus d’identification basé sur des ressemblances et des différences. Dans le passé, nous nous parlions de pays à pays, il est temps désormais de considérer l’UE comme notre pays, notre continent, notre patrie, comme le phare de la liberté et des droits de l’Homme, de l’innovation, de la performance économique et de la démocratie. Pour cela nous devons changer le paradigme. Sur la question de savoir s’il faut unifier l’Europe nous devons changer le débat pour ne plus se demander pourquoi mais plutôt pourquoi pas. Ce qui nous unit est plus important que ce qui nous divise. Et au-delà du désir de fraternité nous avons besoin les uns des autres d’une manière égoïste, égotique. Mon bien-être dépend de celui des allemands, des français, des italiens et de chaque européen. C’est pour cela que nous avons besoin d’un groupe qui porte le combat fédéraliste et pro-européen en Roumanie, par le débat, des articles, des événements, des rencontres officielles, de la pédagogie, etc.

Mais qui défendra l’Europe ?

Tout le monde sait qui sont les opposants à l’Europe, ceux qui déchaînent les passions, qui montrent du doigt l’étranger pour en faire un bouc émissaire, qui râlent dès que possible contre la Commission européenne ou le Parlement sans aucun argument.

Mais qui est là pour l’Europe ?

Pourquoi ne serait-ce pas notre rôle ? Pourquoi ne serait-ce pas aux jeunes qui n’ont jamais connu la guerre, ni la dictature communiste, qui ont vécu dans un Etat de droit avec des gouvernements respectueux des libertés économiques et du bien-être des citoyens ? Pourquoi ne serait-ce pas à nous, la jeunesse instruite, informée, lettrée et ouverte sur le monde ? Ne serait-ce pas notre rôle de monter les premiers sur les barricades pour un avenir meilleur ?

Nous, à la JEF Roumanie, nous pensons que si, c’est à nous d’y aller.

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