En ce premier jour de la COP 24, tentons de dresser un bilan de l’action européenne en faveur de la préservation de l’environnement.
Un bilan mitigé pour l’Union européenne et ses Etats membres
En 2010, lorsque la Commission européenne présentait la Stratégie Europe 2020, une stratégie de développement à moyen terme de l’Union européenne pour une « croissance intelligente, durable et inclusive », elle affichait des objectifs plutôt ambitieux pour le climat. En effet, la Commission promettait une réduction de 20% des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2020 par rapport au niveau préindustriel, une augmentation de 20% de la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique européenne et une augmentation de 20% de l’efficacité énergétique. Arrivés en 2018, les Européens ont de quoi se réjouir puisque les calculs d’Eurostat indiquent que l’UE va atteindre son objectif de réduction de 20% d’émissions de CO2 par rapport au niveau de 1990.
Cependant, si l’on s’attarde sur les projections à l’horizon 2030 ou 2050, on remarque rapidement que l’Europe est loin d’être sur le bon chemin pour atteindre les objectifs qu’elle s’est fixée. L’Agence Européenne de l’Environnement affirmait récemment que les politiques et mesures actuellement mises en place par les Etats ne suffiront pas à atteindre l’objectif d’une réduction de 40% des émissions de C02 de l’UE à l’horizon 2030.
Mettre en œuvre ces objectifs nécessiterait donc une accélération radicale et rapide des efforts des Etats en faveur de la transition écologique. Or, les performances individuelles des Etats sont très disparates, comme le montre le graphique ci-dessous. Certains Etats ont déjà largement atteint leurs cibles et contribuent donc davantage au partage de l’effort, allant même jusqu’à compenser pour d’autres pays qui sont encore loin du compte, comme Malte ou la Pologne.
Selon ce même rapport de l’Agence Européenne de l’Environnement, l’UE doit encore faire des efforts pour développer les énergies renouvelables puisque la part de ces dernières dans la consommation totale d’énergie était seulement de 17% en 2016. La troisième cible concernant l’efficacité énergétique est plus difficile à atteindre dans un contexte où la consommation énergétique, après avoir légèrement diminuée entre 2010 et 2014, se remet à augmenter. Nous sommes donc face à un constat mitigé…
Des annonces ambitieuses de la part de la Commission européenne pour l’horizon 2050
Quelques jours avant l’ouverture de la COP24, le Vice-Président de la Commission européenne responsable de l’Union de l’Energie, Maroš Šefčovič, et le Commissaire en charge de l’Action pour le Climat et de l’Energie, ont présenté ce 28 novembre sa stratégie de décarbonisation à long terme couvrant la période jusqu’à 2050. En effet, l’ambition affichée est que l’UE réduise ses émissions de CO2 de80 à 95% par rapport au niveau de 1990 et atteigne la neutralité carbone en 2050, c’est-à-dire que les émissions de gaz à effet de serre soient au moins équivalentes sinon plus basses que la capacité de la planète à absorber ce C02 que nous rejetons tous les jours.
Cette nouvelle stratégie à long terme présente différents scénarios pour atteindre la neutralité carbone et ne remet pas en question les objectifs visés à l’horizon 2030 qui sont : la réduction des émissions de CO2 par 40% au moins par rapport à 1990, l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique européen pour atteindre au moins 27% dans la consommation énergétique totale, et l’augmentation de l’efficacité énergétique pour la porter à 27%. Toutefois, cette stratégie ne s’accompagne pas d’objectifs chiffrés, mais annonce de grandes étapes à atteindre, ce qui limite de fait son caractère opérationnel. A ce titre, Bas Eickout, eurodéputé du groupe des Verts / ALE au Parlement européen et depuis très récemment Spitzenkandidat du parti au côté de Ska Keller, a vivement critiqué cette stratégie pointant du doigt le renoncement de la Commission à agir rapidement, puisqu’elle prévoit une accélération de la transition à l’horizon 2030. Pour le député européen, nos sociétés ne peuvent pas attendre que le changement climatique s’aggrave pour accélérer la transition écologique.
Les enjeux de cette COP 24 sont nombreux. Il s’agira tout d’abord de réaffirmer l’Accord de Paris et ses ambitions après le retrait des Etats-Unis, de faire un premier bilan des efforts mis en œuvre par la communauté internationale, mais surtout cette COP devra se concentrer sur l’application concrète des objectifs de l’Accord. La communauté internationale réunie en à Katowice en Pologne devra décider de règles et de lignes directrices précises pour prévenir l’augmentation de la température de la planète largement en dessous de 2°C. Laurence Tubiana, ancienne ambassadrice de la France lors de la COP 21, s’inquiète de la léthargie des Etats et d’une démobilisation croissante, alors qu’il est chaque jour plus urgent d’agir.
Le chemin est encore long et semé d’embuches pour atteindre la neutralité carbone, l’Union européenne a évidemment un rôle majeur à jouer dans ces négociations internationales puisqu’elle affiche un niveau d’ambition important. Maintenant, nous verrons si Michał Kurtyka, secrétaire d’État au ministère polonais de l’Environnement, qui a été nommé président de la COP24, arrivera à dépasser « la diplomatie polonaise minée par le charbon » pour jouer ce rôle de modération et faire en sorte que cette COP ne reste pas lettre morte.
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