Prise de conscience et autonomie dans les années 2000
La transition énergétique est décrite comme une réorientation du bouquet énergétique en faveur des énergies renouvelables, au détriment des énergies fossiles, le tout accompagné du développement de l’efficacité énergétique, notion apparue dans les années 2000 en Europe.
L’action européenne en matière de politique climatique au début des années 2000 est caractérisée par une intervention sectorielle ainsi que des mesures autonomes, non liées entre elles.
L’Union européenne a par exemple introduit l’étiquette énergie en 1992 pour la plupart des appareils électroménagers, étendue en 2004 à d’autres domaines tel que l’automobile, afin d’aider les consommateurs à faire des économies en choisissant des produits moins énergivores et encourager les entreprises à innover dans des produits à consommation d’énergie plus faible.
L’Union européenne s’est également attaquée aux émissions de gaz à effet de serre avec la mise en place du système d’échange de quotas d’émission (SEQE) le 1er janvier 2005. Celui-ci repose sur le principe de plafonnement et d’échange des droits d’émission et vise une série de grands émetteurs industriels, les producteurs d’électricité et les compagnies aériennes.
La Commission a également présenté, le 22 novembre 2007, le Plan stratégique européen pour les technologies énergétiques (Plan SET) ayant pour but d’accélérer le développement et le déploiement au meilleur coût des technologies à faible intensité carbonique. Ce plan comprend des mesures portant sur la planification, la mise en œuvre, les ressources et la coopération internationale en matière de technologies énergétiques.
Pour autant, l’Union semble laisser de côté un projet plus large de stratégie climatique au niveau international, malgré quelques initiatives. En effet, il est important de rappeler que l’Union a initié de nombreux projets à l’échelle internationale en matière de climat dès les années 1990. En effet, l’Union et ses États membres ont signé la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC), adoptée en 1992, afin de lutter contre le changement climatique. Cinq ans plus tard, l’Union a signé le Protocole de Kyoto, seul instrument mondial juridiquement contraignant visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre jusqu’à l’accord de Paris de 2015.
Un nouveau paradigme dans la politique énergétique européenne
Une nouvelle étape dans la politique climat-énergie européenne va entièrement changer la donne dans la manière d’appréhender les enjeux climatiques au sein de l’Union. En effet, les chefs d’État et de gouvernement des États membres ont décidé, lors du Conseil européen de printemps 2007, d’élaborer une politique climatique et énergétique intégrée. Dès lors, l’intervention européenne en la matière n’est plus sectorielle mais transversale. Ainsi, ils ont adopté un triple objectif nommé les « 3x20 » qui sont les suivants :
– réduire d’au moins 20 % les émissions de gaz à effet de serre par rapport aux niveaux de 1990,
– porter à 20 % la part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique de l’UE,
– améliorer l’efficacité énergétique de 20 %.
L’objectif est de contenir les effets du réchauffement climatique et de limiter, au niveau mondial, la hausse moyenne de la température à deux degrés Celsius (2°C) au maximum par rapport au niveau préindustriel.
S’en est suivi l’adoption du premier Paquet Énergie-climat adopté en mars 2009, sous l’impulsion de la présidence allemande au Conseil de l’Union européenne. Ce Paquet a pour but d’établir des mesures visant à permettre la réalisation de l’objectif 3x20 et mettre en place une politique européenne commune de l’énergie plus soutenable et durable afin de lutter contre le changement climatique.
S’est ajouté à cela l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le 1er décembre 2009, qui a intégré un chapitre « énergie » ayant pour objet l’efficacité énergétique, les économies d’énergie et le développement des énergies nouvelles et renouvelables. L’article 194 TFUE dispose cependant que les États membres restent souverains concernant la mise en place de leur politique énergétique. Une action coordonnée à 28 semble encore difficile.
Mais la Commission a poussé sa réflexion au-delà de 2020 et a envisagé des mesures à l’horizon 2030 puis 2050. Elle a notamment publié un livre vert intitulé « Un cadre pour les politiques en matière de climat et d’énergie à l’horizon 2030 » en 2013. De tels objectifs à plus long terme permettent à l’UE d’apporter un cadre plus serein pour d’éventuels investisseurs et stimuler la recherche.
La Commission Juncker établie en 2014 va donner une nouvelle impulsion dans la politique énergétique européenne en établissant une Union de l’énergie comme l’une des 10 priorités de celle-ci. Cette Union de l’énergie a pour but de permettre à ses citoyens et à ses entreprises de disposer d’une « énergie sûre, abordable et respectueuse du climat ». La Commission a dès lors publié le 5 mars 2015 sa stratégie européenne pour l’Union de l’énergie reposant sur le cadre pour le climat et l’énergie à l’horizon 2030 fixant trois objectifs :
– réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % par rapport aux niveaux de 1990,
– porter la part des énergies renouvelables à au moins 27 %,
– et améliorer l’efficacité énergétique d’au moins 27 %.
Parallèlement, l’Union européenne s’est engagée en la matière sur la scène internationale en signant l’historique Accord de Paris en décembre 2015, lors de la conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP 21). Cet accord signé par 195 États a notamment pour objectif de contenir l’augmentation de la température moyenne de la planète en dessous de 2°C, voire 1,5°C.
Afin de répondre aux exigences d’un tel accord, la Commission européenne a publié, en novembre 2016, la proposition d’un « Paquet Énergie Propre pour tous les Européens » et a adopté trois règlements, quatre directives et la révision du règlement de l’Agence de coopération des régulateurs de l’énergie.
Le paquet définit trois priorités :
– donner la primauté à l’efficacité énergétique
– parvenir au premier rang mondial dans le secteur des énergies renouvelables,
– mettre les consommateurs au cœur du système énergétique.
Selon la Commission européenne, « les propositions de réglementation et les mesures de facilitation présentées dans le présent paquet de mesures visent à accélérer, modifier et consolider la transition de l’économie de l’UE vers une énergie propre et, ce faisant, à créer de l’emploi et à générer de la croissance dans de nouveaux secteurs économiques et de nouveaux modèles d’entreprises ».
Un Pacte Vert à deux vitesses
Les élections européennes des 23 au 26 mai 2019 ont bien illustré la montée de l’urgence climatique comme sujet central politique européen, avec une augmentation de 40% du nombre de députés écologistes au Parlement européen.
En novembre 2019, la Banque européenne d’investissement a annoncé la suppression des soutiens financiers aux combustibles fossiles à partir de 2022 afin de « soutenir l’avènement d’une économie européenne climatiquement neutre d’ici à 2050 ».
Durant le même mois de novembre, l’état d’urgence climatique est déclaré par une résolution du Parlement européen. Les députés européens appellent la Commission à soumettre dès que possible sa stratégie à long terme pour atteindre la neutralité climatique à l’horizon 2050.
Un mois plus tard, le 11 décembre 2019, la Commission présente son Pacte vert pour l’Europe. La Commission entend s’attaquer à un grand nombre de secteurs — tels que l’agro-alimentaire, la biodiversité… — et souhaite établir la première « législation européenne sur le climat ». Elle annonce également son « mécanisme pour une transition juste » visant à soutenir les régions les plus touchées par le changement climatique. Le lendemain, le Conseil européen donne son accord sur le Pacte vert pour l’Europe et détermine l’objectif de neutralité climatique de l’Union d’ici 2050, en dépit du refus de la Pologne. Les 10 et 11 décembre 2021, les chefs d’États et de gouvernements se fixent un nouvel objectif de réduction nette des émissions de gaz à effet de serre dans l’UE d’au moins 55 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 1990.
Le plan d’investissement du Pacte Vert doit mobiliser jusqu’à 1 000 milliards d’euros dans les dix prochaines années, fondés sur des investissements publics et privés.
Un accord provisoire sur la loi climat a été trouvé par la Commission européenne, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen après des mois de dialogue en la matière. Celui-ci fixe le niveau de réduction d’émission de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport au niveau observé en 1990 à -55 % afin d’atteindre l’objectif de neutralité climatique du Pacte vert pour l’Europe.
Enfin, dans le cadre de ce Pacte Vert, la Commission a établi une série de stratégies, telles que la Stratégie de l’UE pour la durabilité dans le domaine des produits chimiques, la Stratégie en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030 ou encore la stratégie « De la ferme à la table », afin d’élargir l’action européenne au plus grand nombre de secteurs.
Depuis la fin des années 2000, l’Union européenne revendique le chef de filat mondial d’une transition énergétique qui vise l’abandon progressif des énergies fossiles au profit du développement des énergies renouvelables. Mais celle-ci doit faire face à d’autres pays, tels que la Chine — premier producteur mondial d’équipements d’énergie renouvelable — qui se place ainsi comme un leader concurrent.
1. Le 20 juin 2021 à 17:28, par Jeanne En réponse à : Climat-énergie : l’Europe à deux vitesses depuis 20 ans
Article très intéressant résumant de manière claire et concise les 20 dernières années d’évolutions en matière d’écologie et de développement durable au sein de l’UE. Quelques arguments critiques utiles à la compréhension des enjeux de demain. Félicitations
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