En 1871, à la signature du traité de Francfort, qui entérine la cession de l’Alsace-Lorraine à l’Empire allemand par la France, les négociateurs prévoient un droit d’option pour les Alsaciens-Lorrains. Le principe est simple : jusqu’en 1873, les citoyens des territoires annexés peuvent prendre la nationalité allemande ou bien opter pour la nationalité française. Cette option doit cependant s’accompagner d’un changement de résidence sous peine de se voir annuler à l’issue de la période délimitée par le traité.
Sans parallélisme entre cette situation et celle de l’Union d’aujourd’hui, la question de l’option peut se poser pour une citoyenneté européenne séparée de celles des Etats membres.
L’option pour les citoyens britanniques
Depuis quelques mois, les citoyens britanniques qui fréquentent ou résident dans l’espace européen communautaire se bousculent dans les administrations des États membres. Plusieurs choisissent la nationalité de leur pays de résidence pour être assurés de conserver la citoyenneté européenne, et continuer ainsi à écrire le destin commun des 500 millions de citoyens de l’Union européenne. Alors que les négociations sur le Brexit se poursuivent, la place des citoyens britanniques expatriés, contraints de postuler à une double nationalité pour rester liés à la citoyenneté européenne, remet en question le lien entre nationalité et citoyenneté européenne.
Tout citoyen d’un État membre est citoyen européen. Or, pourquoi les Britanniques résidant dans un autre État membre de l’Union européenne, qui souhaitent conserver la citoyenneté européenne, devraient-ils recourir à une autre nationalité pour rester citoyen de l’Union ? Pourquoi postuler à un autre attachement national alors qu’ils pourraient simplement conserver une citoyenneté européenne qui leur est déjà acquise ? Les citoyens britanniques qui veulent poursuivre l’épopée de la construction européenne doivent pouvoir le faire sans changer de nationalité, en choisissant de garder leur citoyenneté européenne, en renouvelant leur volonté d’adhérer à cette communauté de destin. Outre la violence que peut engendrer son retrait, l’Union européenne doit accorder ce droit à ses citoyens, et ainsi reprendre en main le contrôle de sa citoyenneté.
La création de facto d’une citoyenneté de résidence
En effet, laisser aux citoyens britanniques résidant dans l’Union, ou de tout autre État sortant, la possibilité d’opter pour la citoyenneté européenne, c’est leur garantir la préservation de leurs droits de citoyens européens dans leur pays de résidence, tout en continuant de pouvoir exercer pleinement la citoyenneté de leur État national. Un Britannique vivant à Bruxelles pourra continuer à voter aux élections municipales et européennes, tout en profitant des protections que lui assurent la citoyenneté européenne dans l’espace commun ou à l’international. Cette disposition créera de fait une citoyenneté de résidence garantissant la préservation des droits des citoyens européens d’États sortants. Cette citoyenneté de résidence pourrait alors être élargie aux résidants dans l’espace européen qui souhaiteraient faire la démarche d’acquisition de la citoyenneté européenne, indépendamment d’une citoyenneté nationale, choisissant d’adhérer à des valeurs et à un projet de société commun.
Créer une citoyenneté européenne de résidence émancipée du lien à la citoyenneté d’un État-membre contribuera également à mieux la faire vivre chez ses propres détenteurs. Qui aujourd’hui peut comprendre ce qu’apporte ou ce que signifie qu’être citoyen européen si elle demeure enchaînée à la nationalité ? Sortons la citoyenneté européenne du carcan national, et profitons du Brexit pour entamer ce processus de refondation de la citoyenneté européenne.
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