Christophe Grudler : « Sur la transition énergétique, l’Europe est pour une fois leader »

, par Théo Boucart

Christophe Grudler : « Sur la transition énergétique, l'Europe est pour une fois leader »
Christophe Grudler lors de l’Univerdité d’été des Jeunes Européens - France. Crédits : Les Jeunes Européens - France.

Véritable temps fort de l’Université d’été des Jeunes Européens – France, tenue du 25 au 29 août dernier en région parisienne, la réflexion politique (appelée familièrement « CoPo » pour « Commission Politique ») a notamment eu pour thématique la transition énergétique et le Pacte Vert pour l’Europe. Invité d’honneur de la réflexion politique, l’Eurodéputé Christophe Grudler (Renew Europe) a exposé sa vision d’une Union européenne pionnière dans le domaine.

« La transition énergétique est un enjeu majeur de la mandature. Et pour une fois, l’Union européenne est leader ». Le député européen Christophe Grudler n’y est pas allé par quatre chemins pour louer l’action de l’Union européenne dans la lutte contre le changement climatique. Lors d’un débat organisé en clôture de la journée du vendredi 26 août, entièrement dédiée à la réflexion politique, le parlementaire a expliqué sa vision de la politique développée intensément par la Commission von der Leyen depuis près de deux ans.

Point d’orgue de cette politique et dont « tout le monde a entendu parlé » : le Pacte Vert pour l’Europe. Louant « l’ambition » de ce programme censé faire de l’Europe le premier continent neutre « climatiquement » d’ici 2050, Christophe Grudler a pointé pour autant un certain nombre de difficultés inhérentes aux bouleversements des systèmes énergétiques et électriques.

Nucléaire : Gros clivage

L’un des défis les plus importants concerne l’énergie nucléaire, un « gros clivage » selon l’eurodéputé Grudler. Deux facteurs de divisions sont pointés par le membre de la commission ITRE au Parlement européen : le fait que le bouquet énergétique soit déterminé avant tout par les Etats membres eux-mêmes, et la division croissante entre les détracteurs de l’atome et ceux qui considèrent le nucléaire comme une énergie au moins de transition, voire une énergie qui a pleinement sa place dans un bouquet énergétique et électrique bas-carbone et propre.

Pour Christophe Grudler, l’énergie nucléaire est un scénario que l’Union européenne doit prendre en compte pour atteindre la neutralité climatique car « il faudrait 11% d’énergie nucléaire pour atteindre dans les temps cet objectif ». Un équilibre en idéaux écologistes et réalisme s’agissant de la transition qui doit aussi prendre en compte les différents réseaux électriques ou une production et une consommation trop importante peuvent provoquer des blackouts importants en Europe.

Ainsi, malgré « l’exclusion des projets énergétiques nucléaires dans les fonds européens comme le Fonds de transition juste ou encore le FEDER », Christophe Grudler affirme que la question de la pertinence nucléaire est nuancée par de plus en plus de monde, en particulier des écologistes de la première heure, comme Brice Lalonde (ancien ministre de l’environnement sous François Mitterrand et sous-secrétaire général de l’ONU, ndlr).

Une nécessité de reconsidération qui semble venir aussi de l’innovation énergétique dans le secteur, notamment dans la fusion nucléaire « l’énergie produite avec la plasma reproduisant l’énergie solaire ». Pour l’eurodéputé, « cette technologie avance au niveau mondial. Avec la fusion nucléaire, le changement climatique, c’est fini ». Sans pour autant tomber dans l’optimisme extrême, il semble nécessaire d’étudier l’ensemble des solutions technologiques à notre disposition pour créer un bouquet propre, renouvelable et durable.

Question de l’hydrogène

Outre le nucléaire, l’hydrogène est un autre cas sur lequel l’Union européenne devrait se pencher, selon Christophe Grudler. Mais au fait, de quel hydrogène parle-t-on ? « Alors que près de 11 millions de tonnes d’hydrogène gris, c’est-à-dire réalisé avec du gaz naturel, sont produits chaque année dans l’Union européenne, l’hydrogène vert, réellement propre, est encore trois fois plus cher. Il faudrait donc arriver à faire converger les prix entre hydrogène gris et vert ».

L’hydrogène commence à avoir un rôle central dans les transports, un secteur particulièrement polluant, et en particulier le transport aérien. Tandis que Monsieur Grudler a tenu à nuancer la pollution induite en avançant que la part de celui-ci dans les émissions de gaz à effet de serre était de moins de 3%, contre 10% pour le numérique, l’hydrogène pourrait permettre aux avions de devenir encore plus propres.

L’hydrogène pourrait également être une source d’énergie plus propre pour la fabrication de l’acier,« même si celui-ci coûte en moyenne 40 à 50% plus cher que celui des concurrents européens ».

Autonomie stratégique du continent européen

Fer de lance politique de l’eurodéputé au Parlement et « action totalement centrale », l’autonomie stratégique est un sujet qui a été puissamment remis sur le devant de la scène avec la pandémie de COVID-19, car « il s’agit d’avoir notre propre destin en main ». En effet, au-delà de la transition énergétique même, l’Europe s’est aperçue abruptement de sa dépendance extérieure dans le secteur pharmaceutique, « 80% des produits pharmaceutiques proviennent de Chine », souligne Monsieur Grudler.

Concept forgé en France et défendu par le commissaire Thierry Breton, l’autonomie stratégique prône une certaine forme de protection, mais aussi des incitations pour innover sur le continent européen. S’agissant de la transition énergétique, toujours selon Monsieur Grudler, au lieu de faire du « greenwashing », certaines entreprises devraient donc s’approprier la transition énergétique pour acquérir des avantages dans le grand jeu de la concurrence internationale.

La production d’énergies renouvelables est également concernée par ces impératifs d’autonomie stratégiques. En effet, la production de panneaux solaires notamment exige l’utilisation de métaux rares (dits aussi « critiques »), extraits en particulier en Chine, au Kazakhstan et en Afrique. L’Europe possède des gisements, mais le coût d’exploitation est « 5 à 6 fois plus cher qu’ailleurs ».

Loin de faire l’unanimité dans les arcanes des institutions européennes – Christophe Grudler souligne que certains ultralibéraux sont contre quelque forme de protection que ce soit, le concept d’autonomie stratégique sera au cœur de l’activité de l’eurodéputé, « avec la parution en octobre ou novembre d’un livre sur la question ».

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