Charlie Hebdo : Courage au cœur et sourire aux lèvres

, par Boris Benne

Charlie Hebdo : Courage au cœur et sourire aux lèvres
Des rassemblements spontanés ont eu lieu à travers le monde grâce à la diffusion d’un appel sur les réseaux sociaux pour rendre hommages aux victimes de l’attentat qui a eu lieu à la rédaction de Charlie Hebdo. Ici, le rassemblement solidaire du 7 janvier, place Luxembourg, à Bruxelles. - Valentina Calà

Ce mercredi 7 janvier 2015, un sauvage attentat perpétré contre la rédaction du journal Charlie Hebdo, a coûté plusieurs vies humaines. En réaction à cet acte de barbarie, des regroupements pacifiques se sont formés spontanément pour rendre hommage aux victimes, dans de nombreuses villes en France, mais aussi dans toute l’Europe et au-delà. Aux quatre coins du monde, les manifestants défendaient symboliquement la liberté d’expression, en brandissant un crayon dans leur poing. De Madrid à Honk-Hong, de Berlin à Bogotá, l’on pouvait entendre cette phrase : « Je suis Charlie ».

Aux quatre coins du globe, nous sommes Charlie

François Hollande, président de la République française, a décrété que le 8 janvier 2015 journée de deuil national [1]. À cette occasion, une minute de silence a été observée en France, mais aussi à Bruxelles par le Parlement européen [2] et par des agents de Scotland Yard, dans l’exercice de leurs fonctions [3]. Des témoignages de solidarité ont été donnés partout dans le monde et malgré l’extrême tristesse de l’événement, l’union des peuples autour de cet idéal commun : la liberté d’expression, a été l’espace d’un instant, plus qu’une simple utopie. Depuis des années déjà, les victimes de cet attentat, se savaient menacées par des individus envieux à les faire taire, mais cette épée de Damoclès, loin de les détourner de leur travail, n’a fait que renforcer leur détermination.

Ainsi, si l’on devait chercher un sens quelconque à cette tragédie, l’on dira que leur sacrifice nous a au moins donné la force de nous unir face à la tyrannie, venant autant de l’extérieur, que de nos peurs les plus intimes. Aujourd’hui ne l’oublions pas, le 8 janvier 2015, des hommes et des femmes de toute origine et de toute nation ont été Charlie : des êtres singuliers liés par leur volonté commune de défendre leur droit à l’expression. Nous étions unis dans la diversité au nom de nos valeurs, ceux qui font notre civilisation.

Récupérations en tout genre : Où est Charlie ?

Mais le temps du recueillement, aussi intense soit-il, cède déjà sa place aux vautours. Au cours de la même journée, moins de 24 heures après le terrible attentat, la guerre médiatique pour la récupération électorale a déjà commencé. De gauche à droite prêtons l’oreille, pour entendre le mouvement des pions, couverts par des discours aux apparences trompeuses.

Dans l’enregistrement de ses vœux, modifiés à la hâte pour mieux refléter l’actualité, Jean Luc Mélenchon soutient l’union nationale et dénonce les récupérations. Néanmoins dans les premières minutes de son discours il déclare, en parlant des dessinateurs assassinés, dont les caricatures satiriques ont régulièrement moqué le grand capital : « Quand les violents tuent, c’est souvent les nôtres qui meurent. » [4].

Pendant ce temps, le PS et d’autres acteurs associatifs, politiques ou syndicaux, organisent une marche républicaine prévue pour le dimanche 11 janvier [5]. Nicolas Sarkozy est invité à cette manifestation citoyenne, mais le Front National et ses nombreux adhérents n’y sont pas conviés. L’oubli probablement volontaire, du « carton d’invitation » fait déjà polémique et ramène toute l’histoire aux devants de la scène politique [6]. Bien entendu, les discours du Front National ne sont pas, eux-mêmes, de nature à rassembler l’ensemble de la population française, mais compte tenu des circonstances exceptionnelles d’empathie générale, il conviendrait de permettre à tous de participer. Emmanuelle Cosse, secrétaire générale d’Europe Ecologie Les Verts, peine déjà à justifier les raisons de cette mise à l’écart [7]. A l’UMP, on profite de l’aubaine pour dénoncer les organisateurs de la marche.

De son côté, Marc Fresneau (Modem) nous offre un discours presque sans faille. Mais dans son empressement, à décrire les belles réactions françaises en soutien aux victimes, il en oublie de mentionner les témoignages similaires venant du monde entier. Ainsi, son intervention destinée visiblement qu’à flatter le public français et lui seul, ne laisse aucun doute sur ses intentions électorales [8].

Enfin, Marine Le Pen et Nicolas Dupont-Aignan déclarent notre nation « en guerre », la première en profitant pour relancer le débat sur la peine de mort [9], le second pour appeler à la suspension de Schengen [10], tandis que Florian Philippot nous présente un lien supposé évident, entre l’immigration et le fondamentalisme islamique [11]. Mais lorsque son interviewer lui rappelle que les suspects de l’attentat sont nés en France, il bafouille et se perd en conjectures sur la possibilité de leur double nationalité franco-algérienne.

Malheureusement, en marge de ce macabre banquet, alors que ces animaux médiatiques se conforment aux désirs de leur instincts électoraux, des innocents payent déjà le prix d’une insatiable soif de sang [12]. Alors après seulement quelques heures d’hommages sincères, devons nous déjà demander : « où est Charlie ? »

Journalistes et citoyens, vous êtes Charlie !

Une fois encore, notre scène médiatique ne s’est pas montrée à la hauteur. Tandis que des hommes politiques font volontairement des amalgames en tirant ici les ficelles de la compassion et là celles du mépris, vous seuls êtes capables de plaider enfin la cause de l’unité. Que vous soyez souverainiste ou fédéraliste ; socialiste ou capitaliste, si vous lisez ceci, soyez sûr qu’en ces temps difficiles où quelques sinistres personnages veulent nous enrôler dans leurs conflits sans intérêt, l’heure est venue de revendiquer nos liens, dans l’aspiration commune de la paix et de la liberté.

Aux victimes du 7 janvier 2015, comme vous, puissions nous semer l’humour et trouver le courage.

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