Vers une Europe fédérale

Plateforme Politique 2007 de la JEF Europe

, par Traduit par Pauline Gessant, JEF Europe

Vers une Europe fédérale

La mondialisation a transformé le monde en une communauté de destin. Les États-nations sont de plus en plus inadaptés face aux grands défis mondiaux de paix et de sécurité, de justice internationale, de développement économique, de protection de l’environnement ainsi que face à toutes les autres questions mondiales. Tant le nationalisme que la simple coopération intergouvernementale sont des modèles du passé. L’Europe peut offrir un nouveau modèle au monde, le modèle du fédéralisme et de la démocratie internationale.

La fédération européenne est la meilleure garantie pour une Europe démocratique et efficace qui est proche de ses citoyens.

Les réformes à venir de l’Union européenne devraient conduire à une véritable fédération européenne qui impliquerait les caractéristiques suivantes :

Des Institutions démocratiques

Afin de respecter la séparation des pouvoirs qui est un des principes du fédéralisme, les institutions de la fédération européenne doivent être organisées ainsi : le Parlement européen, le Conseil, le Gouvernement et la Cour.

Le Parlement représente les citoyens de la fédération alors que le Conseil représente les intérêts des états membres, et, là où c’est nécessaire, ceux des régions avec un pouvoir législatif. Ils devraient à la fois détenir le pouvoir législatif de la fédération et être responsable pour toutes les procédures législatives, aussi bien que pour le contrôle du budget de la fédération européenne.

Le Parlement devrait élire le président du gouvernement. Les partis devraient proposer leur candidat pour ce poste avant les élections du Parlement. Au moins dix pour cent des membres du Parlement devrait être élu sur des listes européennes. Le Parlement, le Conseil et le Gouvernement devraient avoir le droit d’initiative en matière législative.

Le Conseil devrait agir seulement comme un corps législatif, abandonnant toutes ses fonctions exécutives actuelles au Gouvernement. Afin de représenter la diversité des états membres, il devrait y avoir une forme de présidence tournante. Les décisions prises en Conseil devraient être préparées par des Conseils sectoriels. Ceux-ci sont composés des ministres sectoriels respectifs des états membres ou des représentants des gouvernements régionaux conformément aux règles nationales. Les décisions devraient être prises à la double majorité, signifiant la majorité des états et la majorité de la population. Toutes les réunions du Conseil devraient être ouvertes au public et toutes les documents devraient être disponibles publiquement. La majorité qualifiée devrait seulement s’appliquer aux révisions de la Constitution et au niveau des ressources propres.

Le Gouvernement doit définir l’intérêt général de la fédération européenne et assurer la mise en œuvre de ses politiques. Le Président du Gouvernement, élu par la Parlement et soumis à l’approbation du Conseil, doit choisir les membres du Gouvernement sur base de leurs compétences, sans tenir compte de leur nationalité. Le Gouvernement en son entier doit être approuvé par le Parlement et est responsable à la fois devant le Parlement et le Conseil.

La division des compétences

La division des compétences entre les différents niveaux de prise de décision est une question majeure pour la fédération européenne afin que les citoyens sachent ce qui tombe sous la juridiction locale, régionale, nationale ou européenne. La distribution des compétences doit suivre le principe de subsidiarité. Selon ce principe, seules les questions d’intérêt authentiquement européen devraient être traitées au niveau européen. Nous croyons qu’une Constitution fédérale devrait comporter les 3 catégories de compétences suivantes :

1. Exclusivement européennes

2. Les compétences partagées entre la Fédération et les états membres, pour lesquelles la Fédération est responsable pour une certaine réglementation-cadre et les états membres sont en charge de la formulation des réglementations détaillées

3. Les compétences complémentaires, pour lesquelles les institutions fédérales se limiteront à soutenir et compléter les politiques nationales.

Les entités fédérées

Les autorités nationales, régionales et locales sont un niveau constitutif de la Fédération. Celle-ci doit respecter toutes les autorités nationales, régionales et locales existantes et leur donner les possibilités appropriées de participer aux affaires fédérales. Dans ce contexte, le rôle des parlements locaux, régionaux et nationaux doit être renforcés pour assurer une meilleure mise en œuvre d’un principe de subsidiarité. Par conséquent, les autorités nationales, régionales et locales doivent être impliquées dans le processus législatif, particulièrement quand il s’agit de débattre de la division des compétences entre les différents niveaux.

Fonctionnement

Des procédures simples doivent s’appliquer au processus de décision européen : un projet de loi doit uniquement devenir une loi si à la fois le Parlement et le Conseil sont d’accord sur le texte proposé. Toutes les procédures législatives devraient être systématiquement ouvertes au public, y compris les comités et les groupes de travail. De plus, le nombre d’instruments législatifs doivent rester aussi limité que possible :

1. La loi fédérale doit être contraignante pour toutes les institutions européennes, les institutions nationales et les citoyens européens, sans incorporation dans la loi nationale ;

2. La loi-cadre fédérale devrait être un cadre contraignant dans lequel les états membres ont une certaine liberté pour adopter des lois nationales ;

3. Les règlements sont des règles de mises en oeuvre pour les lois et les lois-cadres. Ils devraient être destinés aux états membres et aux citoyens européens et doivent être promulgués sous la seule responsabilité du gouvernement européen.

La coopération renforcée

Pour maintenir l’intégrité de la fédération, des dispositions doivent être prévues pour les états-membres qui souhaitent mettre en commun leur souveraineté dans des domaines où d’autres peuvent ne pas souhaiter être impliqués. Cette coopération renforcée serait nécessairement « ouverte », dans le sens où tout état membre souhaitant être impliqué dans un tel processus se verrait accorder le droit automatique de le faire. La JEF rejette catégoriquement la notion de noyau fédéral fermé ou quelque forme de coopération qui exclurait des Etats membres souhaitant y prendre part. La JEF croit que la mise en commun exclusive de souveraineté en dehors de l’acquis conduirait à la division et serait contraire à l’esprit de la Fédération.

Les ressources financières

Le financement de la fédération européenne devrait être basé sur un ordre fiscal fédéral, c’est-à-dire que les compétences dans certains domaines d’imposition et du budget devraient être au niveau fédéral européen. C’est important non seulement parce que le niveau européen dans certains cas peut lever des impôts plus efficacement mais aussi parce que le niveau fédéral a besoin d’une autonomie financière et ne devrait pas être dépendant des contributions des Etats membres.

Le financement de la Fédération devrait être basé sur les principes suivants :

Subsidiarité : la Fédération devrait uniquement financer ce qu’elle peut financer plus efficacement.  Démocratie : le Parlement en tant que représentation des citoyens devrait avoir la responsabilité de gérer l’argent des contribuables.  Solidarité : les citoyens et les Etats membres devraient contribuer en fonction de leurs capacités et les fonds devraient être dépensés de manière à ce que tous les citoyens soient assurés d’obtenir leur part équitable d’opportunités en Europe.  Durabilité : maintenir un budget équilibré devrait être un objectif pour éviter de créer une dette fardeau pour les générations futures.  Responsabilité : le Parlement, responsable devant l’électorat, devrait être le premier responsable pour la prise de décision budgétaire.

Transparence : le budget devrait avoir une structure transparente et le public devrait avoir le droit de savoir qui reçoit combien de financement.

Une nouvelle méthode constitutionnelle

Le modèle des conférences diplomatiques secrètes avec des décisions prises à l’unanimité doit être considéré à juste titre comme inefficace et non acceptable. Nous accueillons la méthode conventionnelle comme la méthode la plus démocratique et ouverte imaginée jusqu’à maintenant. La première Convention doit néanmoins être critiquée car elle était basée sur le consensus, qui assimile l’unanimité et sa nature bloquante. Dans une fédération européenne, une Convention constitutionnelle décidant à la majorité devrait être convoquée pour amender la Constitution.

Les changements constitutionnels majeurs devraient être soumis au peuple par un référendum pan européen, organisé selon les lignes suivantes : le format de ce référendum pan-européen requerra une majorité spéciale à la fois des états et de la population de l’Europe dans son ensemble pour adopter le résultat. Le référendum se tiendrait le même jour sur la même question dans toute l’Europe. Tous les pays ayant accepté la Constitution devraient alors agir sans tenir compte des réserves des pays qui n’ont pas encore ratifié la Constitution.

Citoyenneté et identité européenne

Une fédération européenne devrait être basée sur un concept inclusif de la citoyenneté européenne. Celui-ci devrait inclure les libertés et les droits fondamentaux garantis de manière égale à tous les citoyens de la Fédération.

La fédération européenne tire sa légitimité des croyances et des valeurs partagées formant l’identité européenne. Une telle identité ne devrait pas être fermée et devrait refléter la vision d’une Europe unie dans sa diversité. De même, une telle identité devrait refléter les valeurs implicites au fédéralisme : la règle de droit, le respect des droits de l’homme et la démocratie.

Le droit basique de la fédération devrait ainsi respecter à la fois les notions de citoyenneté et d’identité. La Constitution peut donc uniquement exister si elle est pleinement supportée par tous les citoyens européens.

La vie politique et la participation

Un des moyens de générer une plus grande légitimité pour une fédération européenne est de développer la vie politique européenne. C’est pourquoi la JEF croit que le développement d’un véritable système européen de partis politiques, de vraies élections européennes et des outils participatifs sont essentiels.

Un système européen de partis politiques devrait aller au-delà d’un simple regroupement des familles politiques nationales et devrait intégrer les divers intérêts politiques, sociaux et idéologiques. De tels partis politiques devraient suivre des divisions idéologiques plutôt que territoriales. De cette manière, ils seront essentiels pour la création du demos européen.

L’introduction d’une véritable démocratie de parti en Europe (incluant des programmes politiques paneuropéens et des candidats aux élections en tant que représentants de ces partis politiques) rendra la vie politique européenne plus ouverte et intégrée, ainsi que sujette à davantage de transparence et au contrôle du public.

De tels partis politiques européens devraient être candidats aux élections européennes, en présentant leurs visions et leurs propositions pour les questions européennes et proposant leurs candidats pour la présidence du futur gouvernement européen.

Les frontières de l’Europe

Les Jeunes Européens Fédéralistes voient l’Europe, et l’Union européenne, comme une communauté politique, basée non pas essentiellement sur une religion et une culture partagées mais sur les valeurs partagées de démocratie, de respect des droits de l’homme et de coopération économique pacifique. L’Union européenne devrait être ouverte aux pays dont les citoyens se considèrent eux-mêmes Européens et partagent les objectifs politiques, les buts et les aspirations de l’Union. Nous rejetons l’idée qu’il existe une seule base culturelle, ethnique ou religieuse pour être membre de l’Union européenne et nous refusons la notion selon laquelle la qualité de membre de l’Union européenne pourrait être accordée à un pays pour des raisons stratégiques, sans que le pays soit soumis aux mêmes critères que les autres candidats.

Nous croyons que les états qui sont membres du Conseil de l’Europe ont fait une déclaration claire de leur identité européenne. C’est pourquoi ces pays pourraient être considérés comme de possibles futurs membres d’une vraie fédération paneuropéenne. La JEF soutient la demande d’adhésion d’un pays européen qui partage les aspirations de l’Union européenne et souscrit à ses valeurs telles que présentées dans les critères de Copenhague : la démocratie et la règle de droit, le respect des droits de l’homme et des minorités et une économie de marché fonctionnant.

La fédération européenne et le monde

...la fédération européenne doit se voir accorder des pleins pouvoirs en matière d’affaires étrangères, de sécurité et de défense

Dans le domaine des compétences, une attention particulière devrait être accordée à la politique étrangère. Jusqu’à maintenant, face à de nombreux défis internationaux, l’Union européenne a montré des divisions. C’est pourquoi la fédération européenne doit se voir accorder des pleins pouvoirs en matière d’affaires étrangères, de sécurité et de défense par l’établissement d’une véritable politique étrangère unique (et non juste commune) de sécurité et de défense. La PESD devrait être fondée sur les valeurs démocratiques et humanistes de la Fédération. De même elle devrait chercher à promouvoir ces valeurs au travers le monde.

La Fédération devrait utiliser les moyens préventifs sociaux, économiques et politiques pour contribuer à prévenir ou à trouver des solutions aux conflits, sans tenir compte de leur origine. Toutes les décisions législatives dans le domaine de la PESD doivent être prises par le Parlement et le Conseil. Elles doivent être soumises au contrôle de la Cour.

L’utilisation d’une future armée européenne doit être soumise à la majorité des deux tiers au Parlement et au Conseil ; des opting-out nationaux doivent être autorisés quand l’armée est utilisée. La Fédération européenne doit parler d’une seule voix unie dans toutes les organisations internationales, remplaçant les sièges actuels des Etats-membres.

Le Fédéralisme mondial

La création d’un gouvernement de niveau régional (comme en Europe) est le véhicule indispensable pour rendre plus efficace, plus juste et plus démocratique, le fonctionnement de toutes les organisations internationales. La Fédération européenne ouvrira la voie à la formation d’un nouvel ordre mondial basé sur des groupements régionaux d’états et la réforme de la société internationale en établissant des institutions fédérales mondiales.

Les caractéristiques fédéralistes générales identifiées par la JEF s’applique à l’échelle mondiale aussi bien que pour atteindre les buts fédéralistes dans le monde.

Une structure mondiale fédérale est le seul moyen d’assurer la paix, la règle de droit et la démocratie dans le monde.

Illustration : logo de la JEF - Europe.

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Vos commentaires
  • Le 29 mars 2008 à 20:07, par ? En réponse à : Vers une Europe fédérale

    « Il est temps de montrer que nous sommes vivants et que nous annonçons quelque chose de nouveau »

    Gabriel Celaya

    Lettre ouverte du collectif

    Nouvelle Europe

    Semons ce qui demeure, ô passants que nous sommes !

    Le sort est l’abîme, et ses flots sont amers.

    Au bord du noir destin, frères, semons des hommes,

    Et des chênes au bord des mers.*

    Victor Hugo en 1870 imaginait une Europe unie. Mais aujourd’hui, 138 ans plus tard, le seul constat que l’on puisse tirer au sujet de cette union est celui d’un échec. L’échec de la construction européenne, n’est pas une banalité, une chose dont on parle comme d’un fait divers, un hochet à la mode qu’agite le monde politique. C’est l’échec d’une idée, d’un grand mouvement d’espérance, la fin d’un rêve humain. Rêve de paix, de fraternité, de droit de l’homme, de raison, de liberté, de tolérance et de progrès. De l’histoire riche et tragique de notre continent, de guerres et de millions de morts, d’autodafés et de fratricides, du chaos, nos aînés ont tiré des leçons d’idéal. Et loin de toute utopie ils ont mis en oeuvre ce que nous nommons aujourd’hui « construction européenne ». Terme galvaudé, dénaturé, sali même, qui signifiait pour eux le début d’une aventure humaine considérable puisqu’elle visait à unir des peuples qui n’avaient cessé de se haïr et de se combattre. Tel était leur rêve pratiquement devenu réalité : unir sous un même drapeau, porteur de grandes valeurs et chargé d’une histoire commune douloureuse, les nations d’un continent enfin apaisé et ouvrir alors une nouvelle ère de l’histoire humaine. Mais que reste-t-il de ce prodigieux élan, de cette promesse de futur ? Rien, ou presque.

    La constitution européenne, qui devait être un aboutissement de cette construction, a été rejetée, n’y revenons pas. Elle a été remplacée par un traité simplifié qui élimine toute idée de constitution, puisqu’il ne consiste qu’en aménagements des traités passés et a été expurgé de l’essentiel des questions touchant aux institutions. Ne demeurent à ce sujet que quelques aménagements anodins, accessoires et pour tout dire inutiles. Mais, au reste, cela n’a rien d’étonnant. Et depuis longtemps déjà il était prévisible que l’on en arriverait là. Car on a voulu, et c’était sans doute plus simple, réduire cette construction européenne à l’élaboration d’une zone économique commune. On a ainsi donné l’ascendant à l’économique sur le politique et on a enfin obtenu un marché commun, de mieux en mieux adapté – traités après traités – à la libre concurrence et à l’économie de marché mais sans jamais se soucier d’institutions démocratiques. Cela manquait d’imagination et d’audace et nous a conduit au fiasco. Car il paraît évident que nous aurions dû nous préoccuper de doter l’Europe d’institutions fortes capables de gouverner notre union bien avant d’envisager de coordonner (et c’est un bien grand mot au regard de la réalité) l’économie.

    C’est pourquoi il nous semble aujourd’hui urgent de libérer le politique du joug de l’économique. Car en effet comment penser en termes de démocratie quand l’instance élue du peuple est contrainte dans son action par les logiques économiques imposées par le marché. Pour autant il ne s’agit pas de nier ou de remettre en cause la nécessité, le bien fondé ou la fatalité d’une économie de marché, mais de chercher à créer des institutions démocratiques capables d’en être indépendantes.

    À cela, seule une proposition audacieuse et sans compromis nous semble capable d’apporter une réponse réaliste et viable. L’Europe doit, si elle veut surmonter son passé et inventer son avenir, se tourner vers le fédéralisme. Elle doit repenser son organisation en terme de réseau et unifier, sous l’égide d’une institution supra-nationale puissante, des régions autonomes dotées de parlements propres. Les crises politiques graves que traversent aujourd’hui plusieurs pays d’Europe, dont la France, nous montrent chaque jour l’urgence qu’il existe à réorganiser la démocratie partout dans l’union. Or il ne s’agit pas d’éloigner davantage les instances dirigeantes des citoyens qui les élisent. Il est au contraire nécessaire de créer un système propre à fédérer des institutions locales, plus représentatives que les institutions actuelles, sous l’autorité d’une seule et unique instance dirigeante élue, elle aussi, par tous les citoyens de l’union.

    Il s’agit donc de produire une constitution qui organise le fonctionnement démocratique à deux niveaux. Au niveau local, le territoire européen doit être divisé en régions de tailles à peu près comparables. Ces divisions administratives doivent être essentiellement fondées sur la question des identités culturelles tout en cherchant à produire des zones de populations équivalentes. Ces régions devront alors posséder un parlement autonome, élu au suffrage universel direct duquel sera issue un gouvernement local aux prérogatives néanmoins strictement définies par la constitution. Au niveau global, un gouvernement de l’union, doté lui aussi d’un parlement, aura le pouvoir, non seulement de contrôler et de coordonner l’activité des parlements régionaux mais aussi de gérer la politique européenne globale dans des domaines comme la défense, les affaires étrangères, le budget ou encore l’organisation sociale.

    Bien entendu un tel projet nécessite de renoncer définitivement à ce qu’il est coutume de nommer la « souveraineté nationale ». Mais l’histoire ne nous enseigne-t-elle pas ce qu’a pu engendrer d’horreur l’attachement à cette notion devenue d’ailleurs parfaitement inactuelle ? Ne nous sommes nous pas encore rendus compte à quel point ces mots nous enchaînent à un passé stérile voire mortifère ? Car il ne s’agit pas de renoncer à nos identités culturelles par ailleurs souvent aussi régionales que nationales. Bien au contraire, un développement de la démocratie locale favoriserait sans aucun doute les pluralismes culturels européens et une telle organisation constituerait en outre un barrage bien plus solide que nos vieilles nations souveraines contre la haine, la xénophobie, la peur de l’autre et l’individualisme grandissant. Tous ces maux qui minent l’Europe doivent enfin disparaître avec l’idée que nous nous faisons d’une nation et nos identités culturelles, si fortes et si belles n’en seront que plus vivantes. Enfin un tel modèle permettrait d’accroître la représentativité des élus, favorisant ainsi la démocratie et offrirait à une Europe enfin unie la possibilité d’occuper dans le monde une place de premier plan.

    Or, il semble absolument nécessaire d’inventer aujourd’hui un modèle, social, politique et économique radicalement neuf et l’Europe, si elle parvient à s’unir réellement, peut tirer de se son passé des enseignements porteurs d’un véritable renouveau. Mais il semble évident que les nouvelles nations qui nous entourent, de plus en plus puissantes, ne feront pas grand cas de nos idéaux si nous ne parvenons pas à dépasser nos conditions de petites nations devenues impuissantes. De plus notre continent est sans doute de ceux qui portent aujourd’hui le plus d’espoirs sans cesse déçus. Nous avons donc le merveilleux mais difficile devoir d’actualiser ces grands espoirs que nous avons vu naître dans le passé, à travers une nouvelle puissance capable d’inventer un système viable et autonome qui replace l’humain au coeur de la politique et qui rende à cette dernière sa force et sa noblesse. Non ! Les grands mots : Progrès, fraternité, mission de l’Europe, Droits de l’Homme, raison, tolérance ne sonnent pas creux ! Mais il nous a manqué au cours du siècle passé l’union pour les porter et l’audace de nous unir !

    Sachez que nous pouvons faire sortir de terre

    Le chêne triomphal que l’univers attend,

    Et faire frissonner dans son feuillage austère

    L’idée au sourire éclatant.*

    *Victor Hugo, "En plantant le chêne des états-unis d’Europe", dans les quatre vents de l’esprit.

  • Le 29 août 2008 à 13:03, par Un Français (avant tout) qui croit en l’Europe En réponse à : Vers une Europe fédérale

    L’Europe fédérale n’aura qu’un seul fédérateur, les États-Unis…

    L’utopie politique d’une Europe fédérale n’est pas possible avant au moins deux-cents ans ! Condamner les nations a la soumission totale au fédéralisme européen conduirait à des guerres civiles entre les communautés qui y résident (la nation étant la construction politique la plus stable pour assurer la paix civile a travers une identité, une langue, une histoire et des valeurs communes à ces communautés), reviendrait à vassaliser, par la politique étrangère et de défense commune, cette Europe aux USA car les pays de l’est et l’Angleterre n’aspirent qu’à l’alliance atlantique et au parapluie américain (pour se protéger des russes) et que les Italiens et les Espagnols n’en sont aussi que les moutons (a ce titre le traité de Lisbonne qui crée une politique étrangère commune mais qui laisse aux nations le choix d’avoir aussi la leur est un bon compromis), détruirait toutes les structures de protection sociale propres à mon pays (la France) et soumettrait par la fin des frontières et le libre échangisme total nos populations au pire capitalisme ultra libéral prôné par la commission (dominée par les technocrates anglais, allemands ou hollandais et très loin de ma culture !) détruisant tous les grands acquis sociaux. Enfin elle priverait les nations de leur souveraineté et transformerait des états millénaires (dont le miens) en simple province ! L’Europe bien qu’elle se retrouve sur certaines valeurs ne forme pas un peuple et par la même n’a pas vocation a devenir un état ! Mais le souverainisme est aussi inenvisageable que votre utopie... L’Europe doit donc rester une union de nations souveraines et indépendantes qui acceptent de mettre certaines compétences en commun pour pouvoir être plus fortes dans un monde globalisé. (commerce, recherche, monnaie, immigration) Il doit exister une politique étrangère européennes pour les points où nous sommes d’accord et permettre aux nations en cas de désaccords d’avoir la leur (ex : France). Enfin l’Europe doit respecter les souverainetés nationales dans les domaines politiques, militaires et sociaux car ces domaines sont propres aux peuples et à leurs histoires. En fait je suis pour l’Europe de Monnet, Schuman, Adenhauer ou De Gaulle et certainement pas pour celle de Mendelson ou Bolkenstein ni pour l’utopie de Hugo.

  • Le 30 août 2008 à 10:38, par Fabien Cazenave En réponse à : Vers une Europe fédérale

    Cher anonyme, pensez à vous exprimer avec au moins un pseudo, comme ça, vous serez sûrs que votre message sera publié.

     ;-)

    Maintenant, pour vous répondre, l’utopie politique de là où en est l’Union européenne n’était pas possible non plus avant des siècles il y a 60 ans... Pensez donc, une monnaie commune !

    J’ai l’impression que vous plaquez le modèle français très centralisateur et jacobin sur « notre » Europe fédérale... car si c’est pour faire un fédéralisme à l’australienne (je vous invite à lire notre fiche sur le fédéralisme en Australie), non merci. Si le concept de nation est certes à dépasser, cela ne veut pas dire non plus qu’il n’y aura plus demain de Français ou d’Allemands, remplacés par des Européens tous les mêmes.

    Regardez aux USA, les Texans ne sont pas prêts de se trouver semblables aux New-Yorkais, et pourtant ils sont bien tous Américains... surtout vus de l’extérieur. C’est pareil pour les Européens. On peut se concentrer sur nos divergences... ou sur ce qui nous unit.

    Le fédéralisme repose pas mal sur le principe de subsidiarité : à savoir des compétences claires entre le niveau fédéral et celui « fédéré ». Par exemple, la question du traitement de la protection sociale peut être donnée aux niveau « fédéré ». Mais quand on voit comment la France s’est ridiculisée vis-à-vis de la Chine et combien on pèse peu quand on ne s’exprime pas tous ensemble au niveau diplomatique... croyez-vous que la meilleure solution reste dans un intergouvernementalisme latent où il faut que tout le monde soit d’accord pour qu’on puisse avancer d’un pouce ?

  • Le 30 août 2008 à 11:45, par Ronan En réponse à : Vers une Europe fédérale

    Enfin elle priverait les nations de leur souveraineté et transformerait des états millénaires (dont le miens) en simple province !

    Incroyable et invraisemblable est l’ignorance crasse des français à propos de ce qu’est le fédéralisme. Terrifiante est leur imprégnation jacobine : telle qu’ils s’imaginent donc que le projet fédéraliste européen est la stricte reproduction - sur plus grande échelle géographique - d’un centralisme qu’ils acceptent (voire revendiquent) pour la France mais refuseraient donc pour l’Europe (belle incohérence).

    Alors reprenons : ce qu’est le fédéralisme et ce qu’il n’est pas. D’abord, ce qu’il n’est pas : il n’est pas l’extrême centralisation, il n’est pas non plus l’extrême centralisation, il n’est pas non plus l’anéantissement des souverainetés (et certainement pas de la souveraineté populaire).

    Ce qu’il est : la « segmentation » de la souveraineté et la répartition des diverses compétences de gouvernement sur plusieurs niveaux de gouvernement (chacun étant souverain dans la sphère de compétence qui lui est - contractuellement - reconnue). Ce qui implique également un contrôle démocratique - exercé par les citoyens - sur chacune de ces différences instances (quelqu’en soit le ressort géographique : municipal, régional, national, communautaire européen, etc).

    Quant à la répartition des compétences (fruit d’un contrat passé entre signataires), elle peut varier suivant les contextes... Mais avouez que - par exemple - si on confie la direction des forces armées au « tout », il devient alors peu probable que les « parties » se fassent la guerre entre elles... (sauf si le « tout » en question est édifié contre l’extérieur...).

    Bref : l’Europe idéale des fédéralistes, ce n’est pas l’UE (attention à ne pas commettre d’amalgame...), c’est une Europe plus démocratique, plus transparente : régie par une Constitution rédigée en termes accessibles et compréhensibles pour les citoyens.

    PS : Monnet, Schuman, Adenauer et De Gaulle n’avaient absolument pas du tout - à eux quatre - la même vision de l’Europe (mais plutôt contradictoires). Les retrouver ainsi « réunis » dans la même phrase autour d’une conception strictement intergouvernementale est, somme toute, assez comique : pour De Gaulle, ça colle (pour Adenauer, à la rigueur...) mais pour les autres, non.

    Pour mémoire : Le 5 août 1943, « on » a dit ça : « Il n’y aura pas de paix en Europe (pour l’après-guerre) si les Etats sont reconstitués sur la base de la souveraineté nationale. Les pays européens sont trop petits pour garantir à leur peuples la prospérité et le développement social nécessaire. C’est pourquoi ils doivent se réunir dans une fédération ou une entité européenne qui fasse une unité économique commune. ». Qui ça « on » ? : Jean Monnet !

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