Une délégation européenne aux Jeux olympiques ?

, par Charles Nonne

Une délégation européenne aux Jeux olympiques ?

Les derniers Jeux olympiques de Londres ont révélé, une fois de plus, la domination des nations américaine et chinoise dans cette compétition : les deux vainqueurs incontestables des Jeux ont respectivement décroché 46 médailles d’or et 38 médailles d’or. Une fois de plus, les nations européennes, malgré le talent, la compétence et le patriotisme de leurs athlètes, n’ont pas pu atteindre le podium (à l’exception du Royaume-Uni). Ils ont ainsi quitté les Jeux en ordre dispersé, malgré une position honorable pour beaucoup d’entre eux. La désunion caractéristique des Européens pourrait trouver une solution par la constitution d’une unique équipe européenne lors des grandes compétitions sportives internationales. Le fédéralisme qu’appellent de leurs vœux de nombreux dirigeants européens et une partie de la société civile européenne pourrait-il être transposé au sport ?

Le sport, élément structurant de l’identité européenne

Depuis quelques siècles, le sport s’est développé en Europe jusqu’à devenir une partie intégrante de l’identité et de la conscience européennes. La première rencontre sportive internationale de l’Histoire eut lieu en 1872, à l’occasion d’un match de football entre l’Angleterre et l’Écosse, deux nations intégrées au même empire. Trente ans plus tard, en 1902, l’Autriche et la Hongrie, deux autres nations d’un même empire, s’affronteront. La première rencontre entre deux États véritablement indépendants aura lieu en 1904, entre la France et la Belgique, toujours en football.

L’Europe fut ainsi le premier continent qui contribua au développement du sport en tant que composante des relations internationales. La première fédération internationale de sport, le Bureau des fédérations européennes de gymnastique, naquit en 1881, à l’initiative de la Belgique. C’est un Français – Pierre de Coubertin – qui eut et défendit l’idée de recréer les Jeux olympiques, dont la première édition aura lieu en Grèce, en 1896.

Si l’on reconsidère les scores effectués par les différents pays aux derniers Jeux olympiques, l’addition des médailles d’or obtenues par des États européens surpasse de loin les performances des États-Unis et de la Chine. Comme pour la crise de la dette, il est probable qu’une Europe unie fasse mieux entendre sa voix sur la scène internationale et surpasse les États-Unis et la Chine à l’occasion de cette compétition. Seule une organisation institutionnelle efficace et transparente permettrait de réaliser cette ambition.

Une décision conditionnée à la volonté politique des nations européennes

Il semble bien entendu exclu qu’à l’image de la diplomatie européenne, des délégations nationales coexistent avec une délégation unifiée de l’Union. Par ailleurs, tant en termes techniques que juridiques, la constitution d’une délégation européenne unique aux Jeux olympiques semble être un objectif réalisable, uniquement conditionné par la volonté politique des différents États membres. Quelques amendements de la Charte olympique devraient permettre à une organisation internationale d’être représentée en substitution de ses États membres.

Certes, la présence d’une unique délégation commune aux États membres de l’Union diminuerait mathématiquement le nombre d’athlètes européens représentés aux Jeux. A ce titre, l’exemple de l’Allemagne, avant et après la réunification, peut sembler révélateur. Contrairement aux espérances des leaders allemands, l’Allemagne réunifiée n’est pas parvenue à atteindre le même nombre de médailles que les deux anciens États allemands additionnés.

Néanmoins, le parallèle entre l’Allemagne et l’Union européenne reste à établir. Un nombre réduit d’athlètes pourrait signifier une plus grande compétition pour obtenir le droit de concourir, et par là-même, un processus de sélection des athlètes plus poussé.

Certains pessimistes pourront considérer que les nations européennes ne pourront jamais s’accorder sur des abandons de souveraineté dans un domaine touchant autant au patriotisme que le sport. Cependant, des compromis sont envisageables, notamment pour que les plus petits États soient représentés aux Jeux. L’Union européenne pourrait alterner entre délégations « nationales » et délégation « unique », avec une alternance tous les quatre ans. Mieux encore, l’Union et les États membres pourraient se « partager » les différentes épreuves, les différents États s’accordant sur des disciplines qu’ils seraient prêts à « transférer » à une délégation unique. En escrime, par exemple, l’Italie est particulièrement performante au fleuret, la Hongrie est la nation européenne la plus qualifiée au sabre tandis que l’épée est (traditionnellement) maîtrisée par les Français. Une délégation unique permettrait d’exploiter utilement les performances des différents pays européens, mais au bénéfice d’une seule équipe.

Le sport, initiateur d’un patriotisme européen ?

C’est grâce au sport que certaines entités non étatiques ont pu se faire connaître au monde, à l’image de l’Écosse qui continue à avoir une équipe distincte de l’équipe d’Angleterre lors des compétitions internationales de football. C’est également grâce au sport que la cohésion de certaines nations a pu se renforcer, comme au Brésil. L’Union européenne (ou toute autre organisation européenne) pourrait donc profiter de cette occasion pour renforcer l’attachement de ses peuples à notre continent.

Une dernière inconnue pourrait largement conditionner le succès d’une telle entreprise : il s’agit de la volonté des athlètes de représenter l’Europe en tant qu’entité. En effet, le succès d’une nation lors d’une compétition sportive peut dépendre grandement de la « fierté nationale » que ressentent ses compétiteurs. Les Jeux olympiques pourraient dès lors constituer un formidable outil pour déterminer si un authentique patriotisme européen peut se développer et prospérer dans les consciences.

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