Tous venus pour, selon les paroles mêmes de François Hollande - maître de cérémonie - « clore le processus » constitutionnel ?!
Non, bien entendu. Quoique...
Il s’agissait de mettre fin aux rencontres thématiques organisées dans le cadre de l’élaboration du projet socialiste pour les élections de 2007. Le dernier sujet traité lors des Etats généraux du projet était la politique étrangère. L’Europe n’en étant qu’une des composantes.
C’est à l’atelier 1 : « L’Europe, un choix pour la France », animé par Benoît Hamon qu’il fallait se rendre pour savoir de quelle manière et dans quelle mesure l’Europe aurait une place dans le projet socialiste.
Benoît Hamon, député européen et secrétaire national aux affaires européennes (et chantre du « non » à la Constitution) était entouré de Pervenche Bérès (Présidente de la Commission des Affaires économiques et monétaires du Parlement européen), Philip Cordery (Secrétaire Général du Parti des Socialistes Européens), Laurent Ghékière (Délégué auprès de l’UE de l’Union sociale pour l’habitat), Michel Guerlavais (de l’UNSA) et Pierre Larrouturou (de la Direction Nationale du PS). La composition même du groupe donnait une indication de l’orientation que le débat allait prendre.
L’Europe sociale au cœur du projet socialiste. Et la Constitution ?
De fait, l’Europe sociale semble bien être au cœur du projet socialiste, une Europe dotée de ressources propres, de l’harmonisation fiscale, d’une politique des grands projets, une Europe, enfin, capable de se doter d’un traité social ambitieux. Cette Europe qui n’est possible ou envisageable que si l’on ne s’attache à construire une Europe politique fondée sur une Constitution, ciblant ses objectifs et lui donnant les moyens institutionnels pour agir.
Et c’est là que le bât blesse. Il aura fallu attendre plus d’une heure de débat et que la parole soit enfin donnée aux participants pour entendre parler de réformes institutionnelles et de Constitution européenne. Tant dans la manière d’orienter le débat, qu’à travers les propos des intervenants, il apparaît bien, au PS, que l’urgence n’est pas à la relance constitutionnelle. L’urgence, ce sont des politiques concrètes, « l’Europe des projets » comme l’Europe de l’énergie évoquée par Pervenche Bérès.
On reconnaît bien là le refrain fonctionnaliste désormais mâtiné de préoccupations sociales : on ne pourra relancer la construction européenne que lorsque les citoyens se seront réapproprié l’Europe. Il faudrait donc d’abord redonner confiance en l’Europe en adoptant un traité social et en établissant des coopérations renforcées dans ce domaine.
On le sait, cette méthode est un échec, mais ce samedi, à Strasbourg, rares étaient ceux qui avaient le courage de le reconnaître. Le traité constitutionnel était le meilleur compromis envisageable dans l’Europe des 25 où règne la règle de l’unanimité. Même les nonistes en conviennent. Comment peut-on dès lors envisager que nos partenaires acceptent une plus-value sociale avec les partis xénophobe et libéral en Pologne, avec Angela Merkel en Allemagne, avec la nouvelle majorité libérale en République tchèque ? Croire à « l’Europe des projets », c’est ignorer les blocages institutionnels de l’Union européenne, qui restera structurellement incapable d’évoluer vers plus d’harmonisation fiscale ou sociale tant qu’elle ne sera pas dotée d’une vraie Constitution.
La tendance qui se dégageait de cet atelier ne fut qu’amplifiée par la prestation de François Hollande, en conclusion des États Généraux. L’Europe, selon lui, doit avant tout séduire nos concitoyens, les rassurer tant dans ses objectifs qu’en fixant clairement ses frontières. Là sont les priorités. Ce n’est qu’après, plus tard, peut-être, qu’on pourra envisager de rediscuter d’une éventuelle Constitution européenne.
Un rendez-vous raté
Dans un premier temps, on se dit alors que le Parti socialiste met la charrue avant les bœufs en voulant atteindre ses objectifs d’Europe sociale sans cadre institutionnel qui lui permette de les réaliser.
Dans un second temps, on s’inquiète plus. On repense à ce qui a été dit et on tente d’imaginer alors une Europe où il serait possible se mener des politiques avec certains Etats membres en utilisant des mécanismes que tous les spécialistes s’accordent pour déclarer impraticables (les « coopérations renforcées » prévues par les traités actuels sont extrêmement difficiles à mettre en œuvre et probablement contre-productives dans les domaines fiscal ou social) ou illégitimes (en dehors des traités, celles-ci ne sont que des négociations intergouvernementales, la Cour de Justice n’a pas de pouvoir de contrôle, le Parlement européen n’a pas son mot à dire).
On essaie également de se présenter une relance du processus constitutionnel où l’éventualité d’une assemblée constituante n’est évoquée que par les nonistes, où le principe d’un référendum pan-Européen n’est même pas abordée par François Hollande, qui semble se contenter d’un nouveau référendum national sur un texte simplifié, après une conférence intergouvernementale dans la bonne vieille tradition diplomatique qui a enfanté le malheureux Traité de Nice. A croire que les leçons du 29 mai n’ont pas réellement été tirées.
Ce samedi, à Strasbourg, il était finalement plus question de politique étrangère que d’Europe. Un rendez vous raté, en somme.
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