L’Union européenne et la santé de ses citoyens

Les citoyens de l’Union Européenne : des points communs mais des différences notables d’état de santé selon les Etats.

, par Mathilde Marmier

L'Union européenne et la santé de ses citoyens

Les statistiques démographiques concernant les citoyens de l’Union Européenne mettent en évidence des différences d’états de santé alarmantes entre les différents Etats membres.

Ainsi, si l’on se penche sur l’espérance de vie à la naissance, celle des nouveaux entrants est largement inférieure à celles de la majorité des pays d’Europe Occidentale. L’espérance de vie des hommes des pays baltes est en moyenne de 65 ans, là où elle est de presque 77 ans dans les pays de la zone euro. Chez les femmes, elle est respectivement de moins de 78 ans contre 82,2 ans dans la zone euro.

Une femme bulgare a une espérance de vie de huit ans inférieure à celle d’une française (respectivement 76,3 ans et 84,4 ans). Chez les hommes, l’écart maximal s’établit à 14 ans. Les différences en terme d’espérance de vie en bonne santé sont plus marquées encore, allant jusqu’à 18 ans chez les femmes.

Les taux de mortalité liés aux maladies sont également très variables d’un pays à l’autre. Ainsi, les maladies cardiaques ischémiques (type infarctus) tuent 10 fois plus de femmes en Littuanie qu’en France. On observe 25 fois plus de cas de tuberculose en Roumanie qu’à Chypre. La survenue de ces maladies est largement sous l’influence des conditions de vie et de l’accès à la prévention : facteurs de risque cardio-vasculaires (liés à l’alimentation, la consommation de tabac, la pratique d’exercice physique régulière…), conditions de logement et couverture vaccinale pour la tuberculose.

Dans l’ensemble de l’Union Européenne, on observe au cours des vingt dernières années un accroissement des inégalités de santé à l’intérieur des Etats, et ce malgré l’amélioration de l’état de santé global. Ainsi les inégalités d’espérance de vie en bonne santé en fonction du niveau socio-économique peuvent s’élever à plus de 10 ans chez les hommes, 5 ans chez les femmes. Des écarts similaires sont observés en comparant les populations migrantes à la population générale [1].

L’appartenance à l’Union Européenne a-t-elle des répercussions sur l’état de santé d’un pays ?

Il est établi que l’origine de ces écarts ne se situe pas principalement au niveau de la qualité des systèmes de santé mais de façon majeure au niveau des conditions de vie et de l’environnement socio-économique d’une population.

La plus-value de l’Union européenne peut, dans le respect du principe de subsidiarité concernant les systèmes de protection sociale et de santé, se situer au niveau des déterminants de santé. Le niveau de développement économique d’un pays demeure étroitement lié à l’état de santé global de sa population. Demeurant hors de l’Union européenne, la Norvège et la Suisse ont en toute logique des états de santé comparables à ceux des Etats voisins.

Par ces déterminants, on peut supposer indirectement que le développement généré par l’entrée dans l’Union européenne améliore cet état de santé. Par l’intermédiaire d’aides telles que les fonds structurels visant à encourager le développement économique et de l’emploi de régions ciblées, les conditions de vie des populations peuvent s’en trouver modifiées. Toutefois, les conséquences sur les inégalités au sein même d’un pays sont inconnues. Elles pourraient désormais devenir quantifiables par la mise en place d’une politique volontariste à l’échelle européenne.

Et pour cause, le Parlement, la Commission et le Comité des régions ont ensemble approuvé la nécessité d’une intervention européenne pour s’atteler au problème des inégalités en 2007. A cet effet, divers leviers d’action ont été évoqués. Il est envisagé que l’Union Européenne, dans un futur proche, intègre la prévention de l’accroissement de ces inégalités aux objectifs prioritaires de l’ensemble de ses politiques.

Son intervention peut se situer au niveau d’un soutien direct aux Etats membres par l’encouragement à la coordination et aux échanges de bonnes pratiques entre Etats et l’attribution d’ aides financières (fonds structurels et autres). Elle dispose également de la possibilité d’organiser un suivi régulier de l’état de santé de sa population, et ce de façon régulière afin d’observer l’évolution de ces inégalités, non seulement entre Etats mais encore au sein même des Etats.

Quelles perspectives ?

Une requête est en cours et vise à consulter les Etats membres afin d’évaluer leurs suggestions et dispositions à voir une intervention européenne à divers niveaux dans un objectif d’amélioration de l’état de santé de leur population. Les résultats, attendus pour avril 2009, ne sont pas disponibles.

L’Union européenne dispose d’atouts pour agir en amont, sur certains déterminants de santé. En revanche, les inégalités existantes ne trouvent pas de solution à l’échelon communautaire.

Au contraire, la libre circulation des patients et des professionnels, la carte vitale européenne ouvrant droit aux remboursements des soins dans l’ensemble des pays de l’Union européenne s’avèrent aller à l’encontre de la réduction des inégalités. En effet, ces dispositions ne règlent en rien la question des différences prégnantes concernant les performances des systèmes de soins nationaux. C’est une faible part des populations de chaque pays qui est à même de s’informer et se déplacer ensuite dans le but de bénéficier des soins optimaux, ces personnes appartenant, de façon générale, aux classes les plus favorisées. Certains Etats se trouvent également désertés par des médecins ayant des conditions d’exercice plus favorables en Europe occidentale.

Plus d’Europe, et notamment d’Europe sociale, s’impose désormais afin de lisser ces inégalités. Sans chercher à harmoniser les systèmes de santé, des solutions existent. La mise en place de méthodes d’évaluation communes, facilitant les comparaisons des résultats des systèmes, serait à envisager, de même que la mise en place de normes minimales et d’objectifs communs à tous les Etats membres. L’ objectif serait bien de favoriser les échanges de bonnes pratiques, voir d’apporter un soutien financier à certains.

Illustration : Centre chirurgical, salle d’opération

Source :Flickr, par thinkpanama

Notes

[1source : Eurostat.

Vos commentaires
  • Le 21 avril 2009 à 20:03, par Maël Donoso En réponse à : L’Union européenne et la santé de ses citoyens

    Au-delà des méthodes d’évaluation communes, des normes minimales et objectifs communs que l’Union serait capable de proposer, on pourrait réfléchir aux moyens d’harmoniser les études de médecine à l’échelle européenne, et d’une manière générale de promouvoir l’excellence des formations médicales et leur adéquation aux besoins de la santé publique. Pour le moment, les études de médecine sont une exception remarquable au système de Bologne, et restent peu concernées par les programmes d’échange européens.

    Parions que si une réflexion globale était menée sur la formation médicale en Europe, et que si les études de médecine étaient davantage ouvertes à la mobilité, l’instauration de méthodes d’évaluation et de normes communes seraient bien plus faciles. Cette harmonisation des formations médicales resterait sans doute un chantier complexe, mais c’est une piste de réflexion qu’il serait bon de considérer : la médecine ne pourra pas rester une éternelle exception dans un paysage universitaire européen qui se fédère d’année en année.

  • Le 21 avril 2009 à 22:52, par Laurent Nicolas En réponse à : L’Union européenne et la santé de ses citoyens

    les études de médecine sont une exception remarquable au système de Bologne, et restent peu concernées par les programmes d’échange européens

    et bien voilà un nouveau sujet d’article très intéressant :-P

  • Le 22 avril 2009 à 06:55, par Martina Latina En réponse à : L’Union européenne et la santé de ses citoyens

    Merci pour cet article. Au lendemain d’un dialogue avec P.-M. Coûteaux qu’avaient invité un groupe de jeunes citoyens préoccupés, à juste titre, par l’approche de l’échéance européenne, que LE TAURILLON me permette encore ce matin quelques images pour résumer la situation actuelle de l’Union européenne apparemment en pleine crise de croissance : il faut effectivement patience, espérance et projets pour passer de l’acné juvénile à la maturité saine et féconde. Mais, de grâce, empêchons que l’Europe soit confisquée aux citoyens, que les jeunes Européens voient l’horizon se refermer alors qu’ils se réjouissent de respirer enfin plus largement !

    Il nous faut bel et bien, surtout en matière d’études et de médecine, PLUS D’EUROPE, c’est-à-dire une concertation courageuse et généreuse, une ouverture active et inventive, une harmonisation réelle et visible : bref, il nous faut développer dans l’Union EUROPEENNE la transparence, certes impliquée par notre nom qui en grec signifia « Vaste-Vue », mais d’une part dynamique - dans le sillage des communications sur mer que perfectionna la région natale d’EUROPE - et d’autre part substantielle - grâce à l’écriture découverte, puis offerte, par le même peuple phénicien : d’ailleurs, les langues de l’Union EUROPEENNE constituent davantage des passerelles que des obstacles, étant presque toutes indo-européennes, donc aptes à... l’adaptation !

    Venue de si loin dans l’espace et la mémoire, formée d’une diversité tour à tour chaotique et chatoyante, portant les stimates à la fois des guerres anciennes et de sa récente naissance à la paix, après trois mille ans d’existence toponymique et historique, après un demi-siècle de construction européenne, après des élargissements successifs, l’heure semble venue pour que L’EUROPE sorte de son inertie comme de sa vieillesse, pour qu’elle corrige ses défauts conjoncturels en développant ses atouts essentiels, pour qu’elle grandisse en conscience, en sagesse, en engagements, pour qu’elle incarne enfin la jeune EUROPE abandonnant ses limites et sa timidité de manière à voir, aimer, créer.

  • Le 22 avril 2009 à 21:51, par krokodilo En réponse à : L’Union européenne et la santé de ses citoyens

    Danoso et Latina, est-ce que vous, personnellement, vous avez suivi un an de cours dans une langue qui vous est totalement étrangère ? Etes-vous capables de suivre un an de cours de biologie en italien, en allemand , en hongrois ? En outre, une fois de retour dans votre propre pays, vous ne connaitrez même pas le vocabulaire correspondant dans votre langue !

    Assez de démagogie : une langue étrangère n’est pas une passerelle mais un obstacle considérable et , si les études médicales ont échappé pour l’instant à cette folie d’harmonisation, qui, traduite du jargon européen, signifie anglicisation totale des études supérieures, tant mieux ! Nous ne sommes pas la Suède, dont la langue est vouée à la disparition à moyen terme, ayant déjà perdu son vocabulaire technique.

  • Le 24 avril 2009 à 21:27, par Maël Donoso En réponse à : De l’aptitude à écrire convenablement les noms propres

    Je comprends, un peu tardivement, que « Danoso » est une amusante déformation de mon nom, et donc que ce commentaire m’était adressé...

    Krokodilo, je conviens que mon nom est espagnol, et je sais que les langues étrangères constituent pour vous un « obstacle considérable » (sic), mais de grâce, ne m’écorchez pas aussi brutalement dans un message qui prône la maîtrise de la langue... :)

  • Le 25 avril 2009 à 18:10, par krokodilo En réponse à : De l’aptitude à écrire convenablement les noms propres

    Désolé, simple erreur de frappe ou de distraction, je ne me rappelle plus, n’y voyez aucune malice. Par contre, la simple mention « (sic) » me paraît un argument un peu court pour contester que les langues étrangères sont un obstacle considérable, et par de nombreux aspects. La récente affaire (enquête en cours) de présumé trafic de dipliômes universitaires achetés par des étudiants chinois à Toulon est également là pour nous rappeler à quel point étudier dans une langue étrangère est difficile, quoi qu’en dise la propagande européenne et les louanges béats sur Erasmus, et Erasmus mundus.

  • Le 25 avril 2009 à 19:45, par Laurent Nicolas En réponse à : De l’aptitude à écrire convenablement les noms propres

    Je trouve difficile d’interpréter comme vous le faitesl’affaire de Toulon. Cela ne remet pas en cause la difficulté d’étudier dans une langue étrangère, mais ce qui s’est passé à Toulon est un problème tout autre.

  • Le 25 avril 2009 à 21:08, par krokodilo En réponse à : De l’aptitude à écrire convenablement les noms propres

    A la radio, ainsi que sur l’article dont vous indiquez le lien, la question du niveau très faible en français de ces étudiants, donc de leur notes qui auraient été très basses sans favoritisme, a été évoqué :

    « Récemment, le président de l’université, Laroussi Oueslati, reconnaissait que certains étudiants n’avaient pas le niveau de français requis. Selon Le Monde, les enquêteurs pensent que des Chinois venaient acheter un diplôme français, qui embellissait leur CV une fois de retour en Chine. »

    C’est donc bien la difficulté d’étudier dans une langue étrangère qui est aussi en cause dans cette affaire (assez embrouillée pour l’instant), même si ce n’est qu’efleuré par Le Nouvel obs ou les commentateurs, sujet tabou comme toujours, surtout au Nouvel obs...

  • Le 28 avril 2009 à 21:35, par krokodilo En réponse à : De l’aptitude à écrire convenablement les noms propres

    Photocopié par l’AFrAV, un article du Parisien qui détaille davantage cet aspect du problème (bravo à eux pour cette honnêteté sur un sujet où les illusions règnent) : http://www.francophonie-avenir.com/Index_BL_Fraudes_des_universit%C3%A9s_autour_du_francais.htm

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