L’UE en Bosnie Herzégovine

, par Stefan Madeja, traduit par Anne-Laure Maclot

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L'UE en Bosnie Herzégovine

Baptême du feu de la politique européenne de défense et de sécurité

Défis de la toute première mission de l’UE

Lorsque la Bosnie-Herzégovine (BiH) s’est déclarée indépendante par rapport à la Yougoslavie en 1992, une brutale guerre civile a éclaté en l’espace de quelques mois, guerre qui devait durer jusqu’en 1995. Comme les priorités les plus hautes de l’UE sont la paix et la stabilité et qu’une guerre dans l’« avant-cour » se heurtait à la mauvaise humeur, il fallait agir. Cependant, les instruments faisaient défaut, et l’OTAN devait intervenir sous le commandement des USA. En 1995, selon les accords de Dayton, la BiH fut divisée en deux parties : la République serbe de Bosnie ou Republika Srpska et la fédération croato-bosniaque de BiH, entre lesquelles il existe encore des tensions aujourd’hui. En 2003, presque dix ans après le début de la guerre, la toute première mission débutait sous couvert de la politique européenne de sécurité et de défense (PESD), qui relayait les troupes de l’ONU.

Seuls contre la mafia

La mission policière de l’Union européenne en Bosnie-Herzégovine (EUPM) a commencé en 2003. Le mandat actuel de la mission, forte de 500 travailleurs, se termine fin 2011. Alors que les précédentes missions de l’UE ont empêché le déclenchement d’une nouvelle guerre civile, l’EUPM, non armée, détient une fonction de conseil et de surveillance, et se concentre sur la réforme urgente et nécessaire de la structure politique. Celle-ci est très dissipée et il existe plusieurs troupes policières indépendantes ainsi que plusieurs domaines de compétences – un terrain favorable à la criminalité organisée et à la corruption dans le pays.

Alors que l’EUPM a permis des progrès considérables, le processus de réformes n’est, à l’inverse, pas encore accompli. Cela ne tient pas à la mission elle-même, mais bien plus à des faits extérieurs complexes issus d’un contexte politique, économique et culturel.

De Goliath à David

En 2004 le Conseil européen décida de démarrer une autre mission en BiH : EUFOR Althea (du nom de la déesse grecque de la guérison), qui rassemblait à l’origine 7000 soldats et remplaçait la mission SFOR de l’OTAN. La mission SFOR fut un réel succès, en ce sens qu’elle empêcha le déclenchement d’une nouvelle guerre civile. Comme l’UE avait été incapable de réagir pendant la guerre, elle voulait alors participer activement au maintien de la paix. Les points centraux furent l’élimination des reliquats de la guerre, le soutien des émissaires de l’UE et des administrations locales présentes pour combattre la criminalité organisée. Comme Althea n’avait jusque là été impliquée dans aucune mission de combat, et que les pays participants voulaient réduire les coûts de la mission, le nombre de troupes fut réduit à 1600. Ainsi, actuellement la mission joue seulement un rôle de représentation. Le mandat actuel prend fin le 31 août 2011 et ne sera probablement pas prolongé.

But à long terme : l’entrée dans l’UE

Les buts principaux des deux missions de l’UE consistent en la création d’un Etat stable, pacifique et multiethnique. Depuis 2003, la BiH appartient aux hypothétiques pays candidats à l’entrée dans l’UE, par conséquent, le pays prétend à des fonds : pour l’année actuelle, ils sont estimés à 108,1 millions d’euros. Les fonds seront utilisés principalement pour encourager l’économie et la société civile. Toutefois le pays est encore loin d’entrer dans l’UE, et une adhésion avant 2020 parait irréalisable.

A vouloir trop bien faire, on finit par mal faire

L’engagement en BiH fut réellement le baptême du feu de la PESD. Après de nombreux retards et désaccords, elle fonctionne enfin – tout en sachant que l’Europe manque de concertation et de coordination. La raison à cela ne vient pas seulement des Etats membres, mais surtout des institutions européennes. En effet, entre les deux missions de l’UE, il y a eu des problèmes de coordination : elles outrepassaient partiellement leurs devoirs, par exemple les missions étaient toutes deux impliquées dans la lutte contre la criminalité organisée, ce qui s’est révélé être contre productif. Cependant, l’UE est parvenue à régler les problèmes grâce à des directives et des principes de coordination communs.

Un autre problème apparaît dans le cadre de l’élargissement et des éléments-PESD. L’instrument d’aide de préadhésion (IAP) prévoit des actions comme le développement de l’organisation, le déminage et la lutte contre la corruption. Ces actions sont déjà prévues dans la mission PESD. Jusque là, l’UE n’a pas réussi à y réagir et à introduire des mesures de coordination. L’IPA est coordonné par la direction générale pour l’élargissement de la Commission européenne, tandis que l’EUPM et Althea émanent de trois directorats différents du Secrétariat général du Conseil de l’Union européenne.

Lors de la mise en œuvre des réformes, la PESD se heurte à des problèmes locaux : la BiH est en outre ethniquement polarisée et l’administration politique fragmentaire dans le pays applique difficilement les réformes. Le pays est de manière factice un protectorat, qui se met soi-même des bâtons dans les roues en ce qui concerne l’accession à sa propre souveraineté. En raison de ce morcellement, une simple constitution reste hypothétique. L’UE ne peut l’aider, en raison du manque de fondements institutionnels et juridiques, et ne peut que l’inciter à travers des aides financières et de la formation continue.

Le traité de Lisbonne ne règle que partiellement les problèmes

Depuis le 1er janvier 2011, le Service européen pour l’action extérieure (SEAE) sous la direction de Catherine Ashton est en fonction. Il doit permettre une meilleure coordination de la PESD, qui est désormais rebaptisée Politique de sécurité et de défense commune (PSDC). De manière compréhensible, il est encore trop tôt pour mesurer les effets du SEAE. Toutefois il rassemble les bases d’une politique de sécurité plus adaptée en BiH. Il faut garder à l’esprit que le pays fait face à de violents défis d’ordre politique, économique et civil, qu’il doit régler lui-même. L’UE ne peut qu’encourager ce processus.

Photo : « EUFOR », par David Andersson, certains droits réservés

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