L’Union européenne a-t-elle encore besoin d’une politique commune sur l’immigration ?

, par Daniela Vidaicu, Traduit par Vincent Carriou

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L'Union européenne a-t-elle encore besoin d'une politique commune sur l'immigration ?
migrants arrivant sur l’ile de Lampedusas, crédits Sara Prestianni

Il est toujours ardu de s’imaginer 27 pays débattant autour d’une seule table, au sujet d’une politique commune traitant de l’immigration, politique à la fois efficace et forte.

Le domaine de la Justice, la Liberté et la Sécurité - auquel les gouvernements font communément référence sous l’appellation « politiques intérieures et justice » - constitue un ensemble assez vaste de politiques incluant les droits fondamentaux, la citoyenneté, la sécurité et la lutte contre le terrorisme, le droit criminel et civil et la coopération policière, au même titre que l’immigration, les demandes d’asile, la gestion des frontières et des visas.

Au cours des dernières années, celui-ci est devenu un des ensembles les plus prolifiques en termes d’actions menées, de coopérations ou de législation.

Difficile de s’imaginer 27 pays négociant autour d’une même table une politique commune d’immigration...

Les frontières avec les pays de l’Est de l’UE, les relations de proximité avec les pays du Nord de l’Afrique, l’égalité de droit pour les pays nouvellement entrés au sein de l’UE, les flux migratoires au sein de l’UE suite aux révolutions ayant éclatées en Tunisie et en Egypte, et la guerre actuelle en Libye... L’UE a besoin de mettre en oeuvre un programme clair pour les politiques d’immigration.

Les principes de base qui devraient être respectés par l’UE ont été divisés ainsi :

  • développement d’une politique d’immigration commune basée sur le principe de traitement juste des ressortissants de pays tiers et en toute légalité.
  • une politique d’intégration qui rende comparable les droits et obligations des résidents provenant d’un pays du tiers monde et ceux des citoyens de l’UE.
  • les résidents de longue durée issus du tiers monde doivent se voir garantir que leurs droits se rapprochent autant que faire se peut de ceux des citoyens de l’UE.

Une nouvelle vague d’immigrants contre de approches et des principes vieillis

Les plus importants groupes de ressortissants de pays tiers dans l’UE proviennent de Turquie (2,3 millions), du Maroc (1,7 millions), d’Albanie (0,8 million) et d’Algérie (0,6 million).

La dynamique des flux d’immigration dépend de différents facteurs tels que l’instabilité sociale et économique, les réunifications familiales, des régimes politiques autoritaires, les études et des salaires plus élevés, une certaine attente en vue d’une vie meilleure, la non-existence d’une politique de sécurité sociale... Ces facteurs varient au gré des changements politiques, sociaux, culturels et internationaux tels que les guerres, la pauvreté et l’incertitude.

Alors que de nouveaux défis internationaux viennent affecter l’UE, on peut se demander si l’actuel cadre légal et institutionnel est suffisant ou bien s’il est nécessaire de réviser la plateforme d’immigration et d’en créer une nouvelle qui correspondrait mieux aux nouvelles conditions et situations des immigrants.

Quelques 30 années auparavant furent publiées les premiers écrits au sujet de la « nouvelle » vague d’immigration en Europe. Ces premières études comparatives replaçaient cette vague dans son contexte post-Seconde Guerre Mondiale et du rattrapage économique qui lui fut inhérent, et se montraient optimistes quant à une possible intégration au travers des structures politiques et sociales existantes.

Le concept d’immigration a beaucoup évolué de nos jours, et les membres de l’UE sont désormais moins favorables à une politique d’intégration. Ils le sont d’autant moins quand il s’agit de la concurrence sur le marché du travail, en particulier concernant les citoyens les moins éduqués et les moins qualifiés qui craignent de rentrer en concurrence avec des immigrants peu qualifiés.

Les immigrants ont besoin de sécurité, de libertés et de stabilité. C’est la raison pour laquelle ceux-ci choisissent l’UE comme seule et unique variante possible pour assurer une bonne éducation et un certain respect de leur vie privée, de leurs conceptions religieuses et de leurs idées politiques.

L’UE et ses Etats-membres mettent en place des méthodes incohérentes voire parfois incorrectes pour traiter de l’immigration, qu’elle soit légale ou illégale, et ce pour cause de mauvaise gestion.

Dans le domaine de l’immigration subsiste une action qui n’est pas coordonnée par ces pays et qui, de ce fait, encourage les réseaux de contrebande et de trafics, les abus concernant les droits de l’Homme et les crimes aux frontières.

L’UE a toujours de gros problèmes concernant l’intégration, aussi bien dans l’acceptation de ces populations que par rapport aux attitudes discriminatoires à leur égard. Des règles existent cependant, afin de guarantir un minimum de sécurité et d’inclusion sociale, pour permettre les réunifications familiales ainsi que la reconnaissance juridique de capacités professionnelles.

Une nouvelle politique d’immigration pour changer l’Europe

La crise économique, les dérèglements politiques et institutionnels ont fait de 2009 une année moins propice à l’élaboration d’un agenda innovant au sujet de l’immigration et de la gestion des asiles dans le cadre de l’UE.

Un changement de politique s’impose. Celui-ci devrait pouvoir s’appuyer sur une approche prenant en compte les aspects humanitaires, en commençant par respecter l’ensemble des clauses relatives au droit international des êtres humains. De nouveaux principes pourraient être définis :

Multiculturalisme et anti-discrimination : le slogan de l’UE « unis dans la diversité » devrait aussi concerner les citoyens vivant sur le territoire européen tout en étant immigrants. Le slogan devrait agir en tant que garantie pour tout un chacun.

Des normes dans le cadre de la législation du travail : Le marché du travail de l’UE doit pouvoir intégrer les immigrants dans des domaines tels que l’agriculture, les technologies ainsi que le BTP et les services. La capacité de l’UE à mettre en place une politique de l’emploi pour les immigrants qui soit cohérente, légitime et conforme aux droits des migrants est, aujourd’hui plus que jamais, à un tournant du fait des priorités fixées par le plan stratégique de l’UE pour 2020.

Cadre familial et éducationnel : il existe déjà des droits reconnus, tel que l’accès à l’emploi et à l’éducation, à la formation, de même que l’égalité de traitement. Cela dit, l’UE devrait adopter de vrais outils afin de s’assurer du respect de ces droits.

Participation et accès à une administration qui leur soit propre : Il s’agirait de développer ou bien améliorer des plateformes qui permettraient aux immigrants de participer à l’administration des communautés immigrantes, diasporas... au moyen d’autorités locales ou nationales.

cohésion et intégration : l’intégration de ressortissants des pays tiers est un processus mutuel d’accomodation entre les sociétés d’accueil et les immigrants. Il s’agit d’un aspect essentiel afin de mesurer l’ampleur des bénéfices qui peuvent être tirés de l’accueil de populations immigrantes, raison pour laquelle il est essentiel de former un esprit de coopération parmi les citoyens de l’UE et les populations immigrantes, afin de travailler de concert avec les populations afin de leur permettre d s’adapter aux normes européennes.

démographie et développement social : En Janvier 2006, les ressortissants de pays tiers qui résidaient sur le territoire européen étaient approximativement 18,5 millions, soit 3,8% de la population totale (493 millions). L’immigration reste le motif principal de la croissance démographique. Le nombre de migrations nettes, qui était compris entre 0,5 et 1 million par an dans les années 1990, a considérablement augmenté et se trouve compris entre 1,5 et 2 millions par an depuis 2002.

Dans ce contexte, il est impératif de proposer une politique d’immigration unique qui serait mise en place par l’action de la Commission européenne et gérée par un bureau en charge de l’immigration sous le contrôle démocratique du parlement européen qui en déterminerait le cadre légal.

Enfin, cette politique unique sur l’immigration devrait prendre en compte la capacité de réception de chacun des Etats membres et aider les pays qui reçoivent un grand nombre d’immigrants sur le plan financier. Pour finir, il est indispensable d’encourager les administrations ainsi que les agences des Etats membres à travailler en partenariat et avec transparence avec le bureau chargé de l’immigration de la Commission.

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