Présidentielle 2007 et Europe

Guillaume Klossa : la société civile européenne n’a pas su se mobiliser dans la campagne présidentielle

Utilisons les États généraux sur l’Europe comme tremplin !

, par Fabien Cazenave

Guillaume Klossa : la société civile européenne n'a pas su se mobiliser dans la campagne présidentielle

À l’occasion du cinquantenaire du Traité de Rome, la société civile pro-européenne s’est fortement mobilisée à Lille pour les États généraux sur l’Europe. Guillaume revient avec nous sur cet évènement et constate que les candidats à la présidence de la République ont préféré éviter l’Europe comme sujet central dans la campagne.

Le Taurillon : Quelques semaines après les États Généraux de l’Europe de Lille du 17 mars dont vous avez été l’initiateur, quel bilan tirez-vous de cet évènement ?

Guillaume Klossa : D’abord, grâce à cet événement populaire, la France a célébré dignement le 50e anniversaire du traité de Rome, ce qui n’était pas gagné d’avance puisque, quelques mois plutôt, aucun événement d’une telle ambition n’était prévu. Cela n’a été possible que grâce à l’extraordinaire mobilisation des différents partenaires et soutiens dont le Ministère des Affaires européennes, le Parlement européen, la Ville de Lille, la Région Nord Pas de Calais…

Ensuite, quelques chiffres : ces États généraux ont réuni plus de 3.000 participants, dont une moitié de la jeune génération (18-35 ans), beaucoup de français bien sûr mais aussi des européens de tout le continent de la Suède à la Grèce. C’était également 16 ateliers, 110 intervenants de toutes générations et de tous les domaines de la société ( monde associatif, intellectuel, syndical, politique, des médias, de l’entreprise, de la culture…).

Ce qui m’a frappé personnellement, c’est l’esprit de sympathie et la foi européenne qui ont régné pendant cette journée, mais mon avis d’organisateur est peut-être trop subjectif. Alain Lamassoure qui était présent, m’a confié qu’il n’avait pas vu une manifestation européenne aussi ambitieuse et réussie depuis 1988, Jacques Delors a parlé de véritable bonheur tandis que Frédéric Martel qui a organisé « la nouvelle critique sociale » à Grenoble l’année dernière s’est dit totalement bluffé.

Le Taurillon : Les supporters de l’Europe se sont mobilisés à Lille. Etait-ce un simple feu de paille à l’occasion des 50 ans du Traité de Rome ?

Guillaume Klossa : On verra ce que l’histoire en retiendra, mais au sens de nombreux participants, ces États généraux de Lille constituent un moment refondateur de la dynamique européenne en France. Tout sera mis en œuvre pour que ceux qui n’ont pas pu y participer physiquement puissent avoir accès à la mémoire de cette manifestation clé.

Les débats des 16 ateliers sont en cours de retranscription et seront bientôt mis en ligne. Les deux plénières, celle d’ouverture que j’animais autour de Delors, Barnavi, Donfut, Biasini et Rozès… ainsi que celle de clôture animée par Sylvie Goulard autour de Padao Schioppa, Guigou, Lequiller, Bourlanges ont été filmées et seront également disponibles en ligne.

Une première synthèse réalisée par Yves Bertoncini d’EuropaNova et Gaétane Ricard Nihoul de Notre Europe – les deux rapporteurs du 17 mars - avec le soutien de nos différents partenaires vient d’être envoyée aux candidats à la présidence de la République.

Comme prévu, nous remettrons un rapport au Conseil européen des Chefs d’États et de gouvernement de juin avec des propositions concrètes pour renforcer la fierté européenne qui était le thème des États généraux. Enfin, lors de la réunion de débriefing avec les différents partenaires (dont EuropaNova, Le Mouvement Européen, Notre Europe mais également l’UNSA, la CFDT, l’ARRI, l’UEF, Confrontations, les Jeunes Européens,…), il a été décidé l’organisation de seconds États généraux au début de la présidence française de l’Union avec une dimension véritablement européenne.

Les syndicats ont exprimé le souhait qu’une procédure de « cahiers de doléances », en termes positifs de remontée des attentes citoyennes, soit organisée dans les 27 États membres de l’Union. Tout cela est très ambitieux et va requérir la mobilisation de bonnes volontés, de moyens et d’une énergie considérables, mais le message est clair, pour la première fois, des organisations très différentes sont prêtes à travailler main dans la main pour faire avancer l’idée européenne en France et en Europe.

Le Taurillon : Quelles sont les grandes idées qui en sont ressorties ?

Guillaume Klossa : Six propositions en sont ressorties autour des valeurs fondamentales qui donnent sens à l’Union. Par exemple :
 en matière de démocratie, la volonté de mettre en œuvre tous les moyens pour éviter que nos dirigeants continuent à faire de l’Europe le bouc-émissaire facile de leurs défaillances en renforçant notamment la transparence du Conseil de l’Union européenne.
 en matière de diversité, faire de la diversité culturelle une force de l’Union dans les négociations internationales.
 en matière de liberté de circulation, faire de la mobilité des jeunes notamment les moins favorisés la priorité en ayant le courage d’y mettre les moyens nécessaires notamment financiers, ce qui suppose une réévaluation du budget européen…

Je vous invite à lire le détail des propositions sur le site www.fierteeuropeenne.eu et sur les sites des différents partenaires.

Le Taurillon : Est-ce que la société civile européenne peut être satisfaite de la campagne présidentielle ?

Guillaume Klossa : Jusqu’à présent, l’Europe a été la grande absente du débat. Certes, les Monsieur et Madame Europe des principaux candidats étaient présents aux États Généraux mais leurs patrons ont manifestement préféré éviter un sujet qu’ils considèrent comme trop diviseur.

les candidats ont manifestement préféré éviter un sujet qu’ils considèrent comme trop diviseur.

Parlons franchement, nous, société civile, n’avons pas non plus réussi à nous organiser pour nous faire entendre, nous devons apprendre à mieux peser, il nous faut nous donner des porte-parole et peut-être mettre en place une coordination permanente des associations qui veulent faire vivre l’Europe dans le débat public au delà des organisations strictement européennes.

On ne peut pas éternellement rejeter la faute sur les médias qui ne feraient pas écho à nos initiatives, même s’ils ont une part de responsabilité. Il faut être aussi capable d’écrire des documents de nature à être repris or souvent, nos positions communes sont excellentes sur le fond mais pas assez audibles sur la forme. Nous devons également apprendre à utiliser le symbolique, le politiquement incorrect or nous sommes sans doute trop bien élevés face à des politiques qui ne réagissent qu’à des rapports de force.

Sur cette élection présidentielle, tout n’est pourtant pas joué, il ne serait pas absurde par exemple de nous rassembler pour auditionner entre les deux tours les candidats sur la base des propositions issues des États généraux.

Illustration : photographie de Guillaume Klossa, président-fondateur d’Europanova.

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