Ce sommet (d’octobre dernier) a permis à l’UE d’avancer modestement sur les aspects internes et externes du défi de l’énergie, notamment vis à vis de la Russie.
Mais rien sur la question des droits de l’homme en Russie, ni sur les conflits tchétchène et géorgien. Realpolitik, quand tu nous tiens...
75 mesures pour économiser 20% d’énergie d’ici à 2020
Jeudi 19 octobre 2007, le commissaire à l’énergie Andris Piebalgs a présenté son plan d’action pour l’efficacité énergétique. Le plan est destiné à réduire la consommation européenne de plus de 100 milliards d’euros par an pendant les 14 prochaines années. Il permettrait également d’épargner à la planète environ 780 millions de tonnes d’émissions de CO2 par an.
Le paquet de mesures inclut la mise en place de normes minimales de performances énergétique pour certains appareils et équipements (chaudières, photocopieuses, téléviseurs et lampes), un meilleur étiquetage du rendement des appareils et équipements en question, l’établissement de normes de performance pour les bâtiments et l’encouragement dans ce domaine des « habitations passives » (c’est à dire à très faible consommation énergétique) ainsi que des facilités accrue pour le financement bancaire des investissements dans l’efficacité énergétique. Il est aussi question de promouvoir les meilleures pratiques, notamment en zone urbaine, via l’instauration d’un « pacte des maires ».
L’initiative, censée « renforcer la compétitivité de l’Union, relever le niveau de vie des citoyens européens, dynamiser l’emploi et augmenter les exportations de nouvelles technologies économes en énergies », a été jugée globalement positive. On peut toutefois apporter quelques bémols.
Sans surprise, les représentants de l’industrie ont exprimé leur crainte d’une hausse des coûts induite par les nouvelles normes, et par conséquent, d’une éventuelle perte de compétitivité des produits européens face à la concurrence internationale. De notre point de vue, et en accord avec les critiques des ONG écologiques, le plan aurait pu se concentrer davantage sur le secteur des transports, en encourageant plus le transfert modal de la route au rail, par exemple.
Quoi qu’il en soit, économiser 20% d’énergie d’ici 2020 semble réaliste, si cet objectif rencontre un degré suffisant de volonté politique au Parlement Européen et surtout dans les états membres – sans lesquels un grand nombre des mesures mentionnés ci-avant resteront lettre morte. Dans le même ordre d’idées, le succès de l’initiative repose sur un effort important de sensibilisation de l’opinion publique quant à la signification du plan d’action, afin d’éviter que les consommateurs européens profitent de leurs économies d’énergie pour renouveler leur parc automobile !
Par ailleurs, l’idée avancée par la Commission d’aborder l’efficacité énergétique dans le cadre d’accords internationaux est tombée à point nommé, puisqu’à la veille d’un sommet informel européen ou le Président russe devait rappeler ses conditions sur le renouvellement du partenariat énergétique avec l’UE.
Le Sommet informel de Lahti : à l’Est, rien de nouveau ?
Les chefs d’État et de gouvernement européens se sont réunis de façon informelle le vendredi 20 octobre sous les auspices de la présidence finlandaise autour d’un ordre du jour divisé entre innovation, immigration mais surtout énergie. Avec l’invitation de Vladimir Poutine au dîner de clôture, ce dernier point a largement dominé les discussions.
Les États membres ayant des visions et des attitudes divergentes face au géant énergétique, la capacité de l’Union à parler d’une seule voix avec le Président russe a été fortement mise en doute en amont du sommet. Finalement, l’UE ne s’en est pas trop mal sortie à cet égard : même Berlin et Varsovie, en désaccord sur la construction germano-russe d’un pipeline qui contourne la Pologne, ont adopté des positions similaires, notamment sur la sécurité des contrats d’approvisionnement énergétique passés entre la Russie [1] et l’Union.
Sur le fond néanmoins, le bilan du sommet est plus décevant. Certes, le Président Poutine s’est dit « prêt à adopter des principes communs » en réponse aux exigences de « transparence, réciprocité et d’accès au marché russe » réitérées par les dirigeants européens.
Au-delà de la déclaration de principes toutefois, les détails de la coopération énergétique entre les deux pays (reconnue de tous comme « mutuellement bénéfique ») ont été renvoyés à d’autres instances de négociations, à savoir le sommet EU-Russie et le Conseil Européen prévus en décembre.
Les futures relations euro-russes, sur quelles bases ?
Plus particulièrement, les parties en présence n’ont pu s’accorder sur la nature du document qui devra remplacer l’Acte de partenariat et de coopération (APC). Au sujet de la charte de l’énergie de 1994 toujours non ratifiée par la Russie (car elle signifierait la fin du monopole du groupe étatique Gazprom dans le secteur), M. Poutine n’a pas cédé, appelant à une « meilleure définition » de certaines dispositions.
En revanche, le président russe n’a pas manqué d’utiliser le sommet informel de Lahti pour se poser en victime dans le conflit qui l’oppose actuellement à la Georgie, en accusant publiquement le gouvernement de l’ex-république soviétique (pro-occidental) de préparer un « bain de sang » dans les territoires indépendantistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud.
Sur ce point, et alors même que le Président de la Commission Européenne José Manuel Barroso soutient que la « confiance mutuelle » avec la Russie ne saurait dépendre des seules questions énergétiques, il est surprenant que les dirigeants européens se soient contentés d’effleurer les problèmes liés à l’État de droit en Russie.
Si le meurtre récent de la journaliste Anna Politkovskaïa a été « évoqué » [2], d’autres sujets d’inquiétude, comme les nouvelles barrières administratives à la présence des ONG étrangères sur le sol russe, ont été passés sous silence.
Vos commentaires
Suivre les commentaires :
|
