Ukraine

Des élections cruciales pour l’avenir des Ukrainiens

, par Charlotte Clément

Des élections cruciales pour l'avenir des Ukrainiens

Dimanche 26 décembre 2004, j’ai fait partie de ces milliers d’observateurs internationaux venus suivre le troisième tour de l’élection présidentielle en Ukraine. Les événements en Ukraine m’ayant interpellée, j’ai souhaité me rendre là-bas afin de pouvoir juger « de mes propres yeux ».

En effet, les médias européens ne permettent pas toujours d’analyser la situation dans la plus grande neutralité. Très vite, des questions me sont venues à l’esprit : pourquoi ce soudain intérêt pour l’Ukraine ? quelle est l’importance de l’enjeu ukrainien pour l’Union européenne ? Membre des Jeunes Européens France, je suis sensible au débat sur les frontières de l’Europe et il me semblait donc essentiel d’en savoir plus sur l’évolution politique en Ukraine.

Envoyée à Lugansk, deuxième ville du Donbass, près de la frontière russe, j’allais enfin pouvoir connaître le visage de l’autre Ukraine, celle qui a majoritairement fait le choix du candidat soutenu par la Russie, Viktor Yanukovych. Etant données mes motivations de départ, cette région de déploiement ne pouvait que me satisfaire. Dans la région de Lugansk, les élections se sont dans l’ensemble déroulées dans le calme. Mon coéquipier et moi-même avons été très bien accueillis, non seulement par les commissions électorales mais aussi par les électeurs. La participation électorale élevée m’a impressionnée. Dès l’ouverture des bureaux de vote, les Ukrainiens ont été nombreux à s’y rendre tôt dans la matinée, rien à voir avec nos taux d’abstention élevés !

Cependant, les Ukrainiens ne sont pas aussi politisés que l’on pourrait se l’imaginer. J’ai davantage rencontré des Ukrainiens inquiets pour l’avenir de leurs enfants et aspirant à la stabilité que des Ukrainiens me tenant un discours pro-Yushchenko ou pro-Yanukovych.

Très sensible à la présence d’observateurs internationaux, la majorité des personnes rencontrées dans les bureaux de vote s’est réellement intéressée à mes motivations personnelles. Il est arrivé que des passants m’interpellent dans la rue (les observateurs internationaux étaient reconnaissables à leur badge et à leur brassard.) Certains insistaient sur le fait que dans l’est de l’Ukraine, les habitants n’étaient pas stupides, qu’ils n’étaient pas manipulés et même parfaitement informés sur les deux candidats. En général, ils finissaient leur discours sur ces mots : « Dites-leur, aux gens de l’Ouest ! ». Ce genre de rencontre était courant le jour des élections.

L’Union européenne ? Les Ukrainiens que j’ai rencontrés dans la région du Donbass y songent sans trop y croire. Car d’après eux, l’Union européenne n’aurait aucun intérêt à ouvrir des négociations avec l’Ukraine : « Cela fait longtemps que l’Union européenne nous a oubliés, la preuve, vous ouvrez des négociations avec la Turquie sans même penser à faire de même avec l’Ukraine ». Marqués par une histoire tumultueuse, les Ukrainiens en sont devenus presque fatalistes. L’immigration, ils y pensent, « si jamais la situation ne se stabilise pas après les élections », où ? « « la Russie peut-être car la situation politique et économique est plus stable qu’en Ukraine ». Pour les Ukrainiens, l’immigration vers l’Union européenne est presque impossible : elle reste à l’état de rêve. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’Occident ne laisse donc pas complètement indifférent les Ukrainiens de l’est. Il est vrai que les habitants de l’est du pays parlent russe et ont accès aux médias russes. De plus, l’industrie dans cette région dépend des investissements russes. Mais cela ne signifie pas que les Ukrainiens de l’est s’identifient aux Russes. En effet, les Ukrainiens que j’ai rencontrés semblent être partagés entre le désir de se rapprocher de l’Occident et la nécessité de conserver de bonnes relations politiques et économiques avec la Russie. Le nouveau président de l’Ukraine va désormais devoir mener une politique du « juste-milieu » entre l’Europe et la Russie.

Durant mon court passage dans la région de Lugansk, j’ai eu le temps d’apprécier l’intérêt des Ukrainiens pour la France. En majorité très francophiles, nombreux sont ceux qui ont essayé de me citer des noms d’acteurs ou de chanteurs français, voire de prononcer quelques mots de français. Mais nous, manifestons-nous autant d’intérêt pour leur pays ? Notre intérêt pour l’Ukraine semble s’être bien estompé depuis la fin des élections.

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