Fédéralisme

Bon anniversaire Altiero Spinelli !

Le 31 août 2007 est le centennaire de sa naissance

, par Samuele Pii

Toutes les versions de cet article : [English] [français] [italiano]

Bon anniversaire Altiero Spinelli !

Altiero Spinelli est né le 31 août 1907. Sa vie a été marquée d’une manière exceptionnelle par une adhésion aux évènements historiques du dernier siècle. Dans ses mémoires, il était ouvert par sa « concordance » entre sa vie personnelle et l’Histoire qu’il vécut autant qu’en spectateur qu’en protagoniste.

Ulysses en prison

La jeunesse d’Altiero Spinelli a été marquée par l’engagement politique et son emprisonnement par les fascistes. En 1924, il a commencé à étudier le droit à l’Université et à rejoindre le Parti communiste à Rome. Il a commencé une activité fertile qu’il a continué dans la clandestidinité sous le pseudonyme d’Ulysse. Il est arrêté à Milan et emprisonné 16 ans et 8 mois dans différentes prisons (Lucca, Viterbo, Civitavecchia) et est interné dans les îles de Ponza et Ventotene. Son emprisonnement a été parmi l’un des plus longs des antifascistes, mais il n’a jamais laissé tomber ses propres idées et il a terminé sa formation en prison. Dans les années 30, il a progressivement abandonné l’idéologie communiste, incité aussi par la politique cynique de Staline. En 1937 sur l’île de Ponza, il quitte définitivement le Parti Communiste et une période de profonde solitude s’ouvre devant lui.

En juillet 1939, il est transféré sur l’île de Ventotene où il y restera jusqu’en août 1943 (de l’âge de 32 à 26 ans). Ce fut des années importantes pour lui. Et c’était dans l’Île Ventotene que Spinelli a écrit son Manifeste pour une Europe libre et unie ensemble avec Ernesto Rossi et Eugenio Colorni, qui devait devenir connu comme le Manifeste Ventotene selon lequel une fédération européenne était la priorité d’action dans la période de l’après-guerre pour toutes les forces démocratiques. Une Europe fédéral et unie était la nouvelle proposition politique pour sauvegarer la paix pour les peuples européens et pour vaincre toute expression du nationalisme. Spinelli a cru dans son intuition tout au long de sa vie et en tant qu’homme libre a travaillé dur pour l’accomplir. Une nouvelle idée nécessitait un nouvel instrument : c’est pourquoi Spinelli fonda le Movimento Federalista europeo (MFE) en 1943 avec d’autres anti-fascistes. C’était une organisation qui n’avait pas pour but de créer un quelconque autre parti politique qui le soutiendrait dans ses batailles d’avant-gardes et c’est toujours aujourd’hui un atelier de nouvelles idées et une arène politique pour de nombreux jeunes gens.

Pas seulement le conseiller du Prince

Entre 1943 et 1945, Spinelli travailla sur « une hypothèse d’une impétueuse renaissance démocratique » espérant dans la création immédiate d’une Assemblée constituante européenne qui qui fonderait une Etat européen fédéral. En observant la reconstruction des Etats nationaux, Spinelli voyait la fin d’une Révolution fédéraliste : c’est à ce moment-là qu’il commença à travailler sur l’hypothèse d’assigner aux « grans politiciens européens modérés » la tâche de créer une Europe fédérale, encouragée par le Ministère des Affaires étrangères américain et la peur de l’influence soviétique.

Dans les faits, entre 1947 et 1954, une Union européenne semblait inévitable. Spinelli, dans le rôle d’un discret conseiller, persuada De Gaspieri de supporter le projet d’une armée européenne et la proposition d’une Communauté de défense européenne (CED) à condition qu’une Communauté politique européenne soit créée avec un gouvernement démocratique et une Charte constitutionnelle. Après la chute de la CED, résultat du vote négatif de l’Assemblée nationale française en juin 1954, les gouvernements ont choisi la voie à une intégration économique européenne ratifiée par les Traités de Rome en 1957. C’est à cette période que Spinelli devint le leader politique européen capable d’établir un dialogue avec les têtes des Etats et les personalités comme Jean Monnet et le président des Etats-Unis (Eisenhower).

Spinelli qui ne voulait pas laisser tomber son projet d’unité politique, travaillait depuis 1961 sur l’hypothèse qu’il était possible « de donner une impulsion au sentiment répandu d’une Europe unie » dans les sociétés des Etats membres. Les initiatives citoyennes locales pour un recensement des européens mis de côté, avec les élections pour le congrès européens qui seraient fondées sur le modèle venant de Ghandi du Congrès du peuple indien découlant de la déligitimation pacifique des gouvernements nationaux. Malgré le fait que ces actions ne fussent pas réussies, elles ont le mérite historique d’avoir été les premières consultations populaires supranationales.

En dehors de la politique puis Commissaire européen

Dans le même temps, dans les années du boom économique, les fédéralistes demandaient l’élection directe du Parlement européen et une monnaie unique pour le marché commun, inventant même quelques échantillons appelés … « l’euro ». Entre 1961 et 1970, Spinelli s’est presque retiré de l’action politique, mais pas du culturel. En fait, il a gardé un poste enseignant à l’Université John Hopkins à Bologne et était parmi les associés de la fondation de la maison d’édition « Il Mulino », mais il a étudié en particulier le travail de la Communauté Economique Européenne et ses potentielles évolutions. En attendant, il était devenu le conseiller de Pietro Nenni et profitant de la chance d’être nommé par le gouvernement italien, il retourna à la vie publique comme commissaire européen avec le portefeuille des affaires industrielles.

Durant son mandat à la Commission de 1970 à 1976, Altiero Spinelli laissa des traces durables derrière lui. En considérant l’hypothèse que la Commission était comme un réel gouvernement de l’Europe, Spinelli s’est distingué dans la proposition d’un plan d’action dans divers secteurs de la Communauté et dans l’adoption de choix courageux dans ses méthodes de travail. Il suffit pour se rappeler qu’il a nommé un Anglais comme directeur de son Cabinet : son choix a été fondé sur des critères de compétence plutôt que sur ceux de nationalité. Cela a créé un scandale parce que le Royaume-Uni ne faisait pas encore partie de la Communauté. En matière industrielle, le mémorandum qui a été adopté sous sa direction vaut toujours la peine d’être considéré. De la même manière, il a commencé une politique environnementale commune et a mis les bases de la politique commune pour la recherche et le développement technologique. Ainsi, il a montré qu’il était « un visionnaire réaliste », capable de pragmatisme et visionnaire en même temps, d’avoir des idées et des instruments tant juridiques que politiques pour les réaliser. Après son mandat à la Commission, peut-être parce que fatigué du processus législatif lent de la Communauté, Spinelli reprit sa vie politique militante.

Le « projet Spinelli », la bataille finale

En 1976, il est élu au Parlement italien après avoir été nommé au Parlement européen où il a été reconfirmé comme député dans les premières élections directes en 1979. Spinelli est devenu proche de nouveau du Parti communiste, ou, comme il a dû dire, c’était le Parti communiste qui était devenu « Spinelli-semblable » en référence à l’attitude plus favorable de ces partis de gauche au sujet de l’intégration européenne. En réalité, il a fortement cru que le projet européen avait besoin de l’appui de masses populaires, de là l’écriture de son « PCI, que faire ? Réflexions sur la stratégie et les objectifs de partis de gauche » (Einaudi éditeur, 1978).

Dans ses dernirèes années, Spinelli a travaillé sur une nouvelle initiative pour une assemblée constituante dans laquelle le Parlement européen aurait à jouer le rôle principal. Le 14 février 1984, le Parlement de Strasbourg fit passé par une grande majorité « un projet de traité sur l’Union Européenne », mieux connu comme « le projet de Spinelli ». Après la CED, c’était le deuxième essai pour donner une constitution appropriée à la Communauté. Malgré l’appui initial du Président français Francois Mitterand, les gouvernements ont rejeté le projet en adoptant l’Acte unique européen, moins ambitieux et entièrement consacré à l’accomplissement du marché intérieur. Le protagoniste de cette dernière bataille est mort le 22 mai 1986 ; son tombeau peut être trouvé dans le Cimetière de l’Île de Ventotene bien que ses cendres aient été dispersées en mer, suivant ainsi ses dernières volontés. De toute façon, comme auparavant, beaucoup d’innovations dans ce projet ont été prises en compte dans le Traité de Maastricht, en commençant par le principe de subsidiarité, la primauté de droit européen et la reconnaissance du Conseil européen parmi les institutions de l’Union. Tous ces éléments sont aussi inclus dans le projet mis au point selon la Convention européenne et, de façons diverses, insérés dans le traité qui est discuté à l’intérieur dla Conférence intergouvernemtale.

En effet, si nous considérons la question de manière plus approfondie, la méthode de la Convention européenne provient de l’avis, partagé expérimenté par Spinelli dans le Parlement européen, selon lequel les gouvernements ne peuvent pas être les seuls auteurs d’une charte constitutionnel.

Aujourd’hui et demain

Ceux-ci sont les nombreux visages d’un même homme qui, avec son associé Ursule Hirschmann, a représenté un exemple d’honnêteté morale dans le monde politique italien et européen. Il était capable de prendre n’importe quelle opportunité offerte par les changements historiques sans perdre de vue l’objectif d’Union Européenne : en cela, il a montré des qualités de rapidité, de précision et de clarté.

Pour Spinelli, l’Europe était le point de départ pour résoudre les problèmes du monde et non pas seulement le dernier pas pour surmonter les expressions de nationalisme. Une Europe tout près des besoins des citoyens, ensemble avec les États, construisant la base d’une grande démocratie supranationale. Aujourd’hui, Spinelli vit dans la mémoire des institutions. Un bâtiment dans le Parlement européen dans Bruxelles porte son nom et il est souvent cité dans les mots du Président de la République italienne, Giorgio Napolitano, qui a collectionné les discours lui étant dédié (« Altiero Spinelli et l’Europe », Il Mulino, 2007) et qui veut se considérer comme son héritier politique et intellectuel.

Aussi son idée d’une Europe unie est devenue populaire parmi des Européens, malgré le résultat négatif des référendums en France et des Pays-Bas, renvoi d’un projet de Constitution fait par des gouvernements. Les raisons en faveur d’une Europe plus forte et plus démocratique dans la voie montrée par Spinelli sont toujours valables aussi bien que le besoin d’une action commune dans beaucoup de secteurs : de la protection européenne civile qui peut se battre contre les feux, à une politique commune et efficace concernant l’économie, des questions sociales, l’immigration, l’énergie, mais la liste pourraient être sur la politique étrangère plus longue avec la défense, la sécurité et l’antiterrorisme.

Aujourd’hui, l’Union Européenne est composée d’éléments typiques d’une organisation internationale et les caractéristiques d’un système fédéral complexe. C’est vrai, la paix a été réalisée, mais le projet est toujours incomplet et fragile. Comme indiqué par la résistance récente de quelques gouvernements pour partager leur souveraineté au nom de la protection de leurs intérêts nationaux, oubliant ainsi qu’une Union Européenne plus forte est la seule garantie pour tous les 27 membres qui seraient biens seuls et sans défense face aux challenges mondiaux.

Nous voudrions penser qu’après les résultats de la Conférence intergouvernementale, nous aurons un projet de Traité de Réforme pour remplacer le Traité Constitutionnel ; le fédéraliste de Ventotene aurait dit, « Peut-être c’est un pas en avant, mais ce n’est pas assez. Mettons-le en marche de nouveau ! », en misant sur les élections européennes 2009 et les citoyens européens pour lancer de nouveau une nouvelle initiative pour une constituante.

« Cher Altiero - nous qui ne l’avons pas connu pourrions répondre - une nouvelle génération of Jeunes Européens Fédéralistes est prêt à le faire, Happy Birthday ! ».

Illustration :
 photographie d’Altiero Spinelli prie par les services du Parlement européen, source : Wikicommons.
 dans le croquis, Altiero Spinelli (avec une pipe dans sa bouche) et Eugenie Colorni pendant une promenade sur la plage de Ventotene. Illustration peinte par Ernesto Rossi, source : Comitato Spinelli

Vos commentaires
modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?

Pour afficher votre trombine avec votre message, enregistrez-la d’abord sur gravatar.com (gratuit et indolore) et n’oubliez pas d’indiquer votre adresse e-mail ici.

Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Suivre les commentaires : RSS 2.0 | Atom