TAFTA : Pervenche Bérès veut un accord équilibré sinon rien

, par Maud Chastaing

TAFTA : Pervenche Bérès veut un accord équilibré sinon rien
Pervenche Bérès, eurodéputée socialiste, a exprimé de nombreuses réserves à propos de l’accord de libre-échange actuellement négocié entre les Etats-Unis et l’Union européenne. - European Parliament

Vendredi 21 novembre, la députée européenne Pervenche Bérès est intervenue à l’Ecole de droit de Clermont-Ferrand, dans le cadre d’une conférence organisée par le Mouvement Européen Auvergne et les Jeunes Européens Auvergne, afin d’évoquer les enjeux du traité de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Retour sur la position de l’eurodéputée socialiste et sur les enjeux des négociations sur le TAFTA.

Plus d’un an après l’ouverture des négociations du TAFTA [1], en juillet 2013, celles-ci devraient arriver à leur terme à la fin de l’année 2014. Le TAFTA, ou traité de libre-échange transatlantique est un accord visant à créer une zone de libre-échange, une sorte de marché commun entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Son but, constituer un partenariat entre deux blocs dans différents domaines comme l’accès aux médicaments, la sécurité alimentaire, etc. La députée européenne, Pervenche Bérès, est revenue sur le contexte des négociations, ainsi que sur le contenu et les enjeux de ce traité.

L’ambivalence du contexte économique de l’Union européenne laisse la négociation de ce traité sujette à controverses. Dans un climat de mondialisation, un partenariat libre-échangiste avec les Etats Unis serait « le fil conducteur de l’amélioration des économies », selon la députée européenne, réélue en mai dernier. Toutefois, après le scepticisme provoqué à la suite des élections européennes en mai 2014, l’importance de conserver un marché intérieur stable parait primordiale. En effet, la députée a évoqué la situation intérieure précaire de l’Union européenne et les déséquilibres présents entre les Etats membres, qu’ils seraient importants de corriger avant de conclure un accord avec un marché extérieur.

Néanmoins, la députée rappelle qu’en acceptant la négociation, l’Europe envisageait l’hypothèse d’accepter le traité. Avec ou sans le TAFTA, les Etats-Unis continueront à mener leur propre économie, et les Européens « les plus offensifs » feront de même de leur côté.

Ces négociations porteraient entre autres sur la suppression des barrières tarifiées entre les Etats, en somme la suppression des tarifs douaniers, qui serait avantageuse pour les consommateurs. Le traité représente des enjeux stratégiques pour les deux parties. Les Européens cherchent notamment des investisseurs dans le secteur industriel, et les Américains dans l’exploitation de l’or noir.

Il faut rappeler cependant les disparités entre les économies américaines et européennes. La députée mentionne en particulier le problème de la protection des données personnelles. Considérées comme des « marchandises » aux Etats-Unis, vendues aux entreprises pour cibler leurs consommateurs notamment, elles représentent des données privées à protéger pour l’Union européenne. La députée cite aussi la question de l’arbitrage entre les Etats et les entreprises en cas de litiges, et la possibilité pour les multinationales de saisir un tribunal arbitral ad hoc pour régler leurs différends avec les États-Unis ou l’Union européenne et ses Etats membres, quand elles sont lésées par la juridiction d’un pays où elles investissent, remettant en cause le principe libre-échangiste du traité et les règles de la concurrence. Jean Claude Juncker, président de la Commission européenne, s’est montré fermement opposé à de tels tribunaux dans son discours d’investiture du 15 juillet 2014, à Strasbourg. Il n’acceptera pas de telles instances, considérant que ces tribunaux représenteraient « des régimes spéciaux » qui limiteraient les juridictions des tribunaux des Etats membres. Ce traité divise toujours les élus européens et les citoyens. Les socialistes français eux-mêmes sont partagés au sujet de la signature d’un tel traité, partagé entre les bénéfices possibles pour l’économie européenne et la peur du nivellement par le bas des normes européennes, tant sociales, qu’environnementales.

Ayant déclaré auparavant que le TAFTA « représentait une machine de guerre pour l’Europe », la députée envisagerait-elle la non ratification de ce traité ? Ne faut-il pas d’abord harmoniser le marché européen avant de signer un pareil accord ?

Pervenche Bérès a nuancé sa réponse. Elle considère qu’il ne faut pas y renoncer, mais les négociations se poursuivent dans l’optique de ne pas léser l’Union européenne. Dans la salle, des grondements des opposants au TAFTA s’élèvent. Pervenche Bérès rappelle alors que si les Etats Unis ne signent pas l’accord avec l’Union européenne, ils le feront avec d’autres Etats, notamment la Chine, ce qui laisserait l’Union européenne dans une position critique.

Dans une tribune du 20 mai 2014, intitulée « Un accord de juste échange sinon rien », cosignée notamment par Pervenche Bérès et publiée dans Le Monde, elle émet des exigences et des conditions à la signature du TAFTA. Selon elle, les négociations peuvent se faire si elles sont orientées en fonction des normes et des valeurs de l’Union européenne. Des normes dont les Etats-Unis ne souhaitent pourtant pas.

Notes

[1TAFTA, Transatlantic Free Trade Area, qui est l’objet du TTIP, Transatlantic Trade and Investment Partnership.

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