Naufrage de migrant.es en Grèce : un drame de plus en Méditerranée

, par Eva Karaduman, Le Courrier d’Europe

Naufrage de migrant.es en Grèce : un drame de plus en Méditerranée
Illustration : Des réfugié.es traversant la mer Méditerranée en bateau, depuis les côtes turques jusque l’île grecque de Lesbos, le 29 janvier 2016. Wikimedia Commons

Ce mercredi 14 juin, quelques jours seulement avant la Journée mondiale du réfugié, une embarcation surchargée a fait naufrage au large des côtes grecques.

Dans la nuit du mardi 13 au mercredi 14, la Méditerranée a été une nouvelle fois le théâtre d’un drame. Un bateau de pêche parti de Libye pour rejoindre l’Italie a coulé aux larges des côtes grecques alors qu’il transportait entre 400 et 750 personnes.

Selon les autorités grecques https://www.dw.com/en/greece-migran..., plus de 500 personnes auraient péri alors que 104 personnes ont pu être secourues grâce aux opérations de sauvetage. Un bilan concret reste difficile à établir. Ce drame est, selon Le Monde, l’un des plus meurtriers depuis 2016. Depuis le début de la crise migratoire, la mer Méditerranée s’est transformée en véritable cimetière – sans tombe, ni plaque commémorative.

A la suite de cet événement tragique, le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis a décrété un deuil national de 3 jours.

Une histoire, plusieurs versions et des zones d’ombre

L’embarcation avait été repérée par Frontex dès le mardi après-midi. Selon les dires de l’agence européenne de garde-frontières et garde-côtes fondée en 2004, les passager.es auraient refusé toute assistance, juste avant de chavirer. Les différents témoignages des rescapé.es et les déclarations des ONG sur place viennent contredire la version annoncée par Frontex.

De sérieuses accusations ont été faites concernant les actions et décisions de l’agence. L’envoyé spécial du Haut Commissariat aux réfugiés pour la Méditerranée occidentale et orientale, Vincent Cochetel, a recueilli des témoignages glaçants https://www.mediapart.fr/journal/in... auprès des survivant.es : Selon eux, le bateau aurait basculé alors que les gardes-côtes le tiraient « en dehors de la zone de secours en mer grecque. » Les accusations de push-backs (refoulement en mer des migrants) par Frontex ne sont pas nouvelles. Elles ont été largement dénoncées par Jean Ziegler dans son ouvrage Lesbos, la Honte de l’Europe.

Une autre technique, développée notamment par Frontex, se révèle particulièrement efficace : le bateau garde-côtes tourne à grande vitesse et à distance de plus en plus rapprochée autour du Zodiac des réfugiés, provoquant des vagues violentes, qui secouent l’embarcation, menaçant à chaque instant de la faire chavirer

En ce sens, l’Organisation Internationale pour les Migrations et le Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés ont ensemble rappelé que « l’obligation de secourir sans délai les personnes en détresse en mer est une règle fondamentale du droit maritime international. » https://www.unhcr.org/fr/actualites.... De nombreuses ONG telles que Médecins Sans Frontières et Humans Rights Watch ont, elles, appelé l’Union européenne à agir afin de proposer un sauvetage européen plus efficace. Depuis 2015, ces ONG documentent les opérations push-backs de l’Union européenne.

En raison de ces zones d’ombres, la Cour suprême grecque a ouvert une enquête afin de mieux comprendre ce qu’il s’est réellement passé.

Le droit international constamment violé

Lorsque les migrant.es parviennent à traverser les mers internationales, faisant face aux nombreuses menaces, qu’elles soient naturelles ou non, le combat continue.

En juin 2018, le groupe parlementaire européen des Verts/ALE publiait un rapport intitulé “The EU-Turkey statement and the greek hotspots, a failed European pilot project in refugee policy” dans lequel quelques député.es faisaient part de leurs inquiétudes concernant - entre autres - la violation du droit international et la transformation des hotspots en lieux de détention insalubres.

Dans ces hotspots, les ONG remarquent constamment la violation des droits fondamentaux des réfugié.es, des demandeur.ses d’asile et des migrant.es aux frontières européennes. A titre d’exemple, en raison du sous-effectif de l’EASO (Agence de l’Union européenne pour l’asile), le droit fondamental de déposer une demande d’asile est sans cesse violé. Les délais d’attente sont bien trop longs et les migrant.es doivent parfois attendre des années avant que leur demande d’asile soit prise en compte.

Une autre contrainte apparaît lorsque le rendez-vous est obtenu : les durées d’entretien entre les demandeur.ses d’asile et les fonctionnaires de l’EASO sont jugées bien courtes pour pouvoir expliquer convenablement les raisons de la demande.

Embarcations surchargées : la survie est un miracle

Les conditions de traversée des migrant.es dans les eaux internationales sont connues pour être rudimentaires et dangereuses. Les naufrages sont donc tristement fréquents. Par ailleurs, cet événement tragique met à nouveau en lumière les pratiques risquées des passeurs qui profitent de la détresse des migrant.es pour maximiser leur profit. En effet, pour réduire l’encombrement sur l’embarcation, les passeurs ont l’habitude d’interdire les gilets de sauvetage aux passager.es. La survie relève alors du miracle.

Ainsi, neuf passeurs ont été arrêtés dans le port de Kalamata suite au naufrage en Méditerranée. Ces derniers, âgés de 20 à 40 ans, sont soupçonnés de trafic illégal d’êtres humains.

Les traversées en mer ont doublé en 2023

Frontex rapportait il y a quelques jours une augmentation des entrées irrégulières en Méditerranée centrale, la route migratoire principale. L’agence a enregistré les chiffres les plus élevés depuis 2017. Il est néanmoins nécessaire de faire la distinction entre le nombre d’entrées et le nombre de personnes pour éviter une instrumentalisation malhonnête de ces chiffres. Selon le travail de fact-checking de l’Agence France Presse https://factuel.afp.com/doc.afp.com..., l’agence Frontex comptabilise le nombre de passages et non pas de personnes, une même personne pouvant tenter de traverser plusieurs fois la frontière en cas de renvoi.

Version anglaise de l’article : https://www.thenewfederalist.eu/mig...

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