Ainsi apparaît le fragile frêle esquif, l’asile précaire et dérisoire d’une humanité aux abois. Une Humanité au bord du gouffre pour avoir - une tragique nouvelle fois (celle de trop ?) - cédé aux sirènes destructrices de l’égoïsme national.
Une seule solution pour tenter de sauver ce qui puisse l’être encore, tant qu’il en est encore temps : l’union des hommes, la réunion des bonnes volontés, la fédération de leurs énergies…
Le thème de l’Humanité fédérée dans des circonstances exceptionnelles, exceptionnellement douloureuses (et exceptionnellement dangereuses pour sa survie même…) est l’une des thématiques récurrentes du cinéma ’’catastrophe’’, branche ’’post-apocalyptique’’ - parmi tant d’autres - de la SF contemporaine.
La trame narrative reste à chaque fois la même : si les raisons du drame sont assez diverses, quoi qu’il en soit les temps sont décidément bien graves pour une humanité déboussolée, aux abois, brutalement renvoyée à l’âge de pierre et à nouveau menacée par la destruction (voire l’extinction totale...).
Ici c’est le soleil qui est sur le point de s’éteindre (Cf. ’’Sunshine’’, de Danny Boyle en 2007) ; ailleurs c’est une nouvelle glaciation qui menace (Cf. ’’Le Jour d’après’’, de Roland Emmerich, en 2006) ; voire un astéroïde fonçant sur le globe (Cf. ’’Armageddon’’ de Michael Bay et ’’Deep Impact’’ de Mimi Leder, en 1997) et, là encore, c’est le noyau du globe terrestre qui ne tourne décidément plus très rond (Cf. ’’Fusion / The Core’’, John Amiel 2003).
Une idée qui fait son nid, jusque dans les salles obscures…
Mais toujours est-il qu’il est bien clair - dans de telles circonstances - que, cette fois-ci, aucune nation ne s’en sortira toute seule. Et que seule la fédération des intelligences, des ressources, des savoirs et des énergies pourra sortir l’Humanité entière du mauvais pas où - souvent - elle s’est encore fourvoyée vraiment toute seule.
Ainsi - souvent implicite, rarement explicite (par delà même les incohérences des scénarii envisagés, souvent naïfs où le spectaculaire l’emporte souvent sur le récit…) - c’est l’idée même de l’unité, dans l’adversité, du genre humain par le fédéralisme (et contre les accidents du destin, parfois nés des nationalismes…) qui fait lentement son nid douillet dans la culture populaire...
Une idée qui apparaît vraiment très clairement et de façon au combien explicite dans « Virus / Fukkatsu no hi » [1], le fameux film catastrophe de Kinji Fukasaku (1980). Un beau film des années 1980 (formidablement nostalgique) et un modèle de ce genre dramatique, aujourd’hui tombé dans un injuste oubli (car, décidément, sans doute trop sérieux et vraiment trop didactique ?!).
Un virus vraiment exemplaire…
Un récit qui voit pourtant là un millier de scientifiques rescapés (issus d’horizon nationaux divers et variés), réfugiés en Antarctique, s’unir pour survivre à la suite d’une terrible pandémie virale qui a exterminé quasiment toute l’humanité : la ’’grippe italienne’’. Un monstre froid qui extermine les êtres humains sans distinction de race ni de religion. Où l’on se rend compte que l’Humanité n’est décidément plus qu’ ’’une’’, unie dans la précarité des temps, face à l’extinction à venir… (ou pour faire face et reconstruire le monde ?!)
Reste à examiner l’agresseur. Ici, le ’’monstre’’ exterminateur, menaçant jusqu’à l’existence même de l’humanité, étant en fait une arme biologique (le redoutable virus MM88…) : diabolique invention par mégarde ’’échappée’’ des laboratoires les plus secrets d’une des grandes puissances de ces temps révolus de guerre… froide.
Condamnation explicite des nationalismes et de l’égoïsme national, refus de l’anarchie internationale, dénonciation de l’absurde de la guerre et de la course aux armements [2], souhait de mise en place d’une démocratie internationale susceptible de pouvoir contrôler les armements de destruction massive, Conseil fédéral et démocratique réunissant des survivants appartenant à toutes les nationalités [3], réunion des bonnes volontés et mise en commun des… moyens, réconciliations entre nationalités autrefois rivales et amours ’’transnationales’’ : tout y est.
Car - postulat de base du récit - on est décidément tous dans le même bateau. Et car aucune nation (aucune ethnie, aucune secte et, sans doute, aucun être humain…) ne s’en sortira tout seul face à un problème qui, à l’extrême évidence, les dépasse... Car aucun Etat, aucune super-puissance (souvent - elle-même - grandement responsable du cataclysme à venir...) ne sauvera l’humanité avec ses seuls petits bras... (pas même les USA).
Un film qui est donc un appel à l’unité du genre humain pour surmonter des épreuves contre lesquelles on sait bien que les Nations sont impuissantes (quand leurs Etats ne sont pas carrément coupables...). Un mondialisme ici au combien nécessaire pour sauver ce que l’Etat-nation voire l’Union continentale (fusse-t-elle même européenne...) seraient en fait bien incapables d’efficacement préserver.
Reste donc le trame générale d’un récit mettant en scène l’Homme finalement artisan de sa destruction totale, et l’Humanité s’unissant cependant - par delà les frontières - pour remédier aux erreurs tragiques de ses propres enfants égarés : tout un programme.
Et la morale édifiante reste décidément toujours la même : réunir les hommes et mutualiser leurs bonnes volontés et leurs énergies. Pour sauver la Terre et sauver l’Humanité, rien que ça…
Suivre les commentaires : |